Worlds 2022 ⎜ XCO Hommes : et à la fin, c’est Schurter qui gagne !
Par Adrien Protano -
Dernier rendez-vous de cette longue semaine de championnats du monde, le XCO Elites Hommes fait aussi figure, pour beaucoup, d’épreuve phare. Il faut dire qu’entre les armadas suisses et françaises, le retour de Tom Pidcock et les outsiders qui se sont révélés cette saison, on pouvait s’attendre à du spectacle ! Toutefois, c’est de XC qu’on parle et en la matière, il n’y a qu’un seul maître : 18 ans après son premier sacre chez les Juniors, Nino Schurter a décroché aux Gets son 10e titre Elite, le 13e toutes catégories confondues. Retour sur une course intense :
En pleine confiance après sa victoire au Mont-Sainte-Anne il y a trois semaines (lire Mini-interview – Titouan Carod : « Désormais, je sais que je peux gagner ! »), Titouan Carod prend le meilleur départ et emmène le peloton à l’assaut des sept tours de circuit prévus cette après-midi. Dans sa roue, Henrique Avancini, Nino Schurter, Vlad Dascalu, Filippo Colombo… Tout le monde est là !
Tout le monde… sauf Tom Pidcock. La grille de départ étant déterminée d’après les points UCI, le tout frais champion d’Europe ne part que depuis la 5ème ligne. Pour lui, aujourd’hui, c’est la remontada ou rien !
Forcément, personne ne souhaite lui rendre la vie facile et malgré un tracé exigeant avec ces deux longues montées, le départ est très rapide. Résultat, des écarts se forment rapidement, notamment sous l’impulsion de Nino Schurter.
Le deuxième tour arrive vite et Jordan Sarrou prend les commandes du groupe de tête, animé on l’imagine par l’envie de retrouver le maillot arc-en-ciel sur ce circuit qui lui convient bien. Pas pour longtemps : il bute dans cet endroit piégeux dans le sous-bois où l’on a vu de nombreuses femmes perdre du temps un peu plus tôt.
La sanction tombe immédiatement, Schurter en profite pour reprendre sa position habituelle de leader et augmente légèrement le rythme. Peut-être une manière de rendre plus difficile le retour de Tom Pidcock, déjà revenu dans les quinze premiers et qui demeure un des principaux rivaux du Suisse.
Toutefois, dans ces conditions ultra-rapides, rien n’est jamais acquis. Sam Gaze, qui paraissait très en forme, nous le prouve en partant à la faute sur le passage des tables lors de ce deuxième tour. Abandon pour le Néo-Zélandais, visiblement bien touché. Un tour plus loin, ce sera au tour de Nino Schurter lui-même de glisser dans un virage en herbe et en dévers, heureusement sans conséquence autre qu’une petite perte de temps.
Lui reste sur son vélo… pour l’instant : déjà revenu sur Alan Hatherly, Tom Pidcock rattrape enfin le groupe de tête au milieu du troisième tour et passe devant dans la foulée. C’est inattendu et cela secoue la joyeuse bande, qui semblait bien organisée jusque-là. Nino Schurter et Luca Braidot parviennent à suivre mais Jordan Sarrou, David Valero et Alan Hatherly accusent un peu plus le coup.
Dans le quatrième tour, un trio de tête commence à se dessiner : David Valero a maintenant pris les commandes et il est suivi par Nino Schurter, accompagné d’un Luca Braidot très régulier depuis le départ et toujours bien placé.
Après sa remontée spectaculaire, Tom Pidcock commence lui à faiblir et à faire l’élastique derrière le trio, tantôt au contact tantôt à quelques secondes.
Il faut attendre le sixième et avant-dernier tour pour voir la tension monter d’un cran : comme il en a l’habitude, le nonuple champion du monde lance une puissante attaque pour tester ses adversaires et cette fois, David Valero est le seul à pouvoir l’accompagner.
Derrière, Luca Braidot et Tom Pidcock regardent le duo partir et préparent leur bataille pour la médaille de bronze. Une bataille qui va tourner court : l’Anglais n’est pas dans un grand jour et enchaîne les fautes de pilotage dans les passages technique. Pire encore, il doit bientôt s’arrêter en zone technique pour changer de roue, victime d’une crevaison à l’arrière. Manque de lucidité, mauvais état de forme ? Quoi qu’il en soit, cela laisse le champ libre à Luca Braidot pour la troisième place.
L’histoire n’est pas la même dans le duo de tête : les deux athlètes sont au coude à coude et se testent mutuellement. Solidement accroché à la roue arrière de Nino Schurter, David Valero tente plusieurs fois de passer devant mais le Suisse défend sa première place avec expérience et fermeté, dans son style habituel.
Dernier tour, première montée, rien. Deuxième montée, rien. Les deux athlètes sont inséparables et dans la zone d’arrivée, on commence alors à envisager l’éventualité d’un sprint. Cependant, Nino Schurter voit les choses autrement : il parvient à creuser un petit trou dans les passages techniques en sous-bois du haut du parcours et plonge dans la dernière descente avec quelques secondes d’avance.
L’écart est infime, 2 ou 3 secondes à peine mais en descente, ils sont bien peu nombreux à pouvoir rivaliser avec le Suisse et David Valero ne fait pas partie de ceux-là…
En bas, l’avance de Nino Schurter a doublé et les sections les plus dangereuses sont désormais derrière lui. Il peut commencer à savourer ! 18 ans après son premier sacre chez les Juniors, ici même aux Gets, il remporte son dixième titre de champion du monde Elites !
L’histoire est faite pour Monsieur VTT qui confie : « Je n’en reviens pas… 2004 est un souvenir magnifique et je suis content de regagner ici. Aujourd’hui était une course difficile et je ne voulais pas que Tom Pidcock revienne si facilement. Puis j’ai dû imposer un gros rythme pour piéger David Valero, c’était le seul à suivre. Je savais que le dernier tour allait être très dur, j’ai dû fermer toutes les possibilités pour Valero de passer et puis c’était full gaz jusqu’en bas. Je suis content de ne pas être tombé, mais c’est le VTT, vous devez saisir votre chance quand elle se présente. »
Un an après sa médaille de bronze aux Jeux Olympiques de Tokyo, David Valero prend la médaille d’argent sur les championnats du monde tandis que Luca Braidot repart avec la médaille de bronze.
S’il semble un peu déçu (et on peut le comprendre, après deux victoires en coupe du monde cette saison), c’est tout de même son meilleur résultat sur cette épreuve si particulière.
Visiblement dépité, Tom Pidcock échoue finalement au pied du podium. Le nouveau champion d’Europe de VTT devra remettre à plus tard son rêve de conquérir le maillot arc-en-ciel dans toutes les disciplines (il l’est déjà en cyclocross, il lui manque encore la route… et le VTT). En revanche, le Suisse Marcel Guerrini a de quoi être satisfait : avec sa 5e place, il signe sa meilleure performance à ce niveau, coupes du monde comprises.
Premier Français, Jordan Sarrou termine 6ème. Il revient en quelques mots sur cette course : « J‘ai tenté de rester devant en début de course, j’ai tout donné mais je n’avais pas les meilleures sensations aujourd’hui. La foule m’a permis de ne rien lâcher : c’était incroyable, et même si le résultat n’est pas forcément celui que j’espérais, je me souviendrai toute ma vie de cette course. Je n’ai pas eu une saison facile et même si j’aurais évidemment aimé avoir une médaille, je suis content de ma 6ème place. Bravo à Nino, c’est impressionnant, ça reste le champion de tous les temps. »
Victor Koretzky rentre lui aussi dans le top 10, avec une 8e place. Réaction : « J‘ai été malade depuis le championnat d’Europe à Munich et, sur les premiers tours de roues, je ne me sentais pas trop bien. La foule m’a motivé et emporté. Grâce à elle, je n’ai rien lâché ! J’avais l’impression d’être en tête de la course tout du long, c’était énorme. Forcément, sur un championnat du monde, on a envie de gagner une médaille, mais 8ème c’est un joli résultat ! C’est de bon augure pour la suite : sans pépins physiques je peux faire mieux. Bravo à Nino, que de respect pour lui ! Je suis content pour les Francais, on s’est vraiment régalés ce week-end avec la DH qui lance le truc, Pauline qui est double championne du monde, tout le monde qui répond présent… »
17e, Thomas Griot nous confie : « Mon début de course a été plus compliqué, mais une fois que les sensations sont revenues, j’ai réussi à remonter un peu. Même si sportivement cela n’a pas été la journée espérée, c’était une expérience extraordinaire, on ne s’entendait pas faire du vélo, le public était fou ! »
Antoine Philipp, qui avait déjà signé une belle performance en coupe du monde sur ce parcours, est cette fois plus loin. Il est 26e et il devance d’une place Maxime Marotte, 27e et pas dans un grand jour à cause de soucis d’estomac qui ont gâché sa semaine. La déception est encore plus grande pour Titouan Carod et Joshua Dubau, qui ont vécu une journée très difficile : 51e place pour le pilote BMC, « sans énergie », et 58e pour le pilote Rockrider.
Côté Belges, Pierre de Froidmont (en arrière-plan) n’a pas réussi à rééditer l’exploit du Mont-Sainte-Anne (où il a terminé 5), sur ce circuit qui convenait un peu moins à ses qualités. Il se classe tout de même à une belle 12ème place. Journée plus difficile pour Jens Schuermans, qui n’a pu faire mieux que 23ème ce dimanche. Enfin, Daan Soete se classe 43e.
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