World Cup XC 2023 #5 | Portfolio : 7 faits marquants de Vallnord
Par Léo Kervran -
Après un été dédié aux divers championnats (nationaux, continentaux et du monde), la coupe du monde reprenait ses droits ce week-end en Andorre. Particulièrement longue et chargée, cette deuxième partie de saison emmènera les pilotes jusque début octobre avec la finale au Canada et ce week-end de reprise nous a bien montré que les vérités du printemps ne sont pas celles de la fin de l’été… En attendant le prochain rendez-vous aux Gets dans deux semaines, voici ce que nous avons retenu de Vallnord :
Mona Mitterwallner, l’ambition de la jeunesse
6 victoires en 6 coupes du monde, championne d’Autriche, d’Europe et du monde : c’est peu dire que Mona Mitterwallner a marqué les esprits en 2021. Pour sa première saison chez les Espoirs, la jeune Autrichienne alors tout juste âgée de 19 ans avait tout raflé dans la catégorie, surpassant des athlètes souvent 3 à 4 ans plus expérimentées qu’elle.
Vous comprendrez donc que ses grands débuts chez les Elites étaient particulièrement attendus et il n’a pas fallu attendre longtemps : dès 2022, à seulement 20 ans, elle fait le choix de courir dans la catégorie reine pour se frotter aux meilleures et jouer une qualification olympique. Elle impressionne dans les courses de préparation et décroche un podium dès l’ouverture de la coupe du monde au Brésil avec la 5e place derrière sa compatriote Laura Stigger.
La suite de la saison ne sera que progression : 3e à Albstadt, 2e à Vallnord, 2e au Mont-Sainte-Anne. Un bilan impressionnant pour une première année en Elites, encore plus pour une athlète surclassée censée courir avec les Espoirs jusque fin 2024 mais pas suffisant pour Mona Mitterwallner qui vise déjà la victoire. 2023 commence timidement (12e à Nove Mesto, 7e à Lenzerheide) mais à partir de Leogang, la machine est lancée et elle enchaîne les podiums : 2e à domicile, 2e des championnats d’Europe, 5e à Val di Sole, championne nationale et 4e des championnats du monde.
L’Autrichienne est l’une des athlètes les plus régulières sur le podium en course internationale ces deux dernières saisons mais la victoire lui échappe toujours. Entre autres causes, son départ : Mitterwallner part lentement et monte en puissance au fil des tours, de façon impressionnante mais souvent trop tard pour revenir sur la tête de course. Ce n’est pas un hasard si elle est déjà double championne du monde de XC marathon…
A Vallnord, sur un site difficile (altitude, conditions météos souvent extrêmes dans un sens ou dans l’autre) et un parcours qui convient bien à ses qualités, le week-end avait déjà bien commencé avec une 9e place sur le XCC. A chaque fois qu’elle est rentrée dans le top 10 sur le format court, l’Autrichienne est montée sur le podium sur l’épreuve olympique et la statistique s’est vérifiée de la meilleure des façons le dimanche.
Un départ correct (36 s de retard sur la tête à la fin du premier tour tout de même), des conditions difficiles qui durcissent la course et jouent en sa faveur, aucun problème technique… Comme elle l’expliquait à l’arrivée, « tout s’est enfin mis en place ». Ce dimanche, rien ne pouvait se mettre en travers de son chemin et le duel avec Alessandra Keller pour la première place durera quelques centaines de mètres seulement. De quoi faire le plein de confiance et avec l’automne qui s’annonce ainsi que d’autres circuits à sa mesure, on pourrait la revoir très vite sur la plus haute marche du podium…
Mathias Flückiger de retour au sommet
Autre course, autre vainqueur mais même libération. Suspendu de façon irrégulière par l’agence suisse anti-dopage l’été dernier puis innocenté après avoir prouvé sa bonne foi et mis en évidence les errements de l’organisation (lire Dopage | Mathias Flückiger innocenté et de retour en 2023 ?) Mathias Flückiger a vécu une fin d’année 2022 agitée.
Depuis la décision de justice qui lui a donné raison, le Suisse n’avait qu’une idée en tête : revenir en compétition et retrouver son meilleur niveau, celui qui lui a permis de remporter six victoires en coupe du monde depuis 2018 et le classement général de la coupe du monde en 2021.
A l’instar de Mona Mitterwallner, il a déjà brillé à Vallnord (2e en 2018, absent en 2022) et il affectionne les conditions froides et boueuses. Avant même le départ, on mettait déjà une pièce sur lui en découvrant la météo dimanche matin et il a fait ce que tout le monde attendait de lui. Passé tout près de la victoire à Leogang en juin, 2e à Val di Sole en juillet derrière son rival de toujours Nino Schurter, il n’a laissé aucune chance à ses adversaires.
Partir en raid solitaire dès le deuxième tour pouvait sembler ambitieux mais au final, cela donne une victoire avec la manière. Irréprochable techniquement, Flückiger a géré sa course de main de maître et même le retour de Thomas Griot à moins d’une dizaine de seconde dans l’avant-dernier tour n’a pas semblé l’inquiéter plus que cela.
Après 5 mois « perdus » l’année dernière selon ses propres mots, cette victoire vient parachever son retour… et il reste encore trois manches de coupe du monde à disputer. En attendant, il n’est pas le seul que ce succès réjouit puisque certains des plus grands noms du milieu sont venus le féliciter après la course, sur place ou sur les réseaux sociaux : Henrique Avancini, José Hermida, Loïc Bruni, Brook MacDonald, Hans Rey, Claudio Caluori, Maja Wloszczowska, Maxime Marotte…
Une première défaite depuis deux ans pour Tom Pidcock
Tom Pidcock en coupe du monde de VTT Elites, c’est 4 victoires en 6 départs et ses seuls échecs, ils les a connus en 2021 avant son titre olympique (5e à Albstadt, abandon aux Gets). Depuis, personne n’a réussi à la battre. Forcément, le Britannique en est conscient et il n’hésite pas à jouer avec. En début de saison, à quelques heures de l’ouverture de la coupe du monde il s’amusait ainsi à dire qu’il n’avait jamais perdu à Nove Mesto. De l’arrogance ? Peut-être mais quand les résultats suivent, que faire ?
Sacré champion du monde Elites pour la première fois de sa carrière il y a deux semaines, on aurait pu penser qu’il allait survoler le circuit de Pal Arinsal comme il l’avait fait avec celui de Glentress mais aujourd’hui, il n’était pas aussi facile que d’habitude. Ou plutôt, il l’était mais trop tard comme en témoignent ses temps au tour : 7e, 15e, 16e, 1er, 3e, 2e, 1er.
Le froid ? Le retour à la compétition après quelques jours de repos ? En tout cas, une porte semble s’être ouverte et Tom Pidcock n’apparaît plus aussi infaillible. Voilà qui pourrait être intéressant si on le revoit sur des coupes du monde d’ici le mois d’octobre… Et en attendant, on remarquera que même avec une mise en route compliquée, la porte s’est vite refermée : le Britannique est remonté de la 10e à la 3e place entre le troisième tour et la ligne d’arrivée.
Pour l’anecdote, on notera que comme lors des championnats du monde, il a terminé à la même place que sa coéquipière chez Ineos Pauline Ferrand-Prévot : les deux ont remporté le titre mondial à Glentress, et les deux ont terminé à la troisième place ce dimanche !
Puck Pieterse, le schéma se répète ?
Une pilote archi-dominante en début de saison qui commence à perdre du terrain en milieu d’année… Ça vous rappelle quelque chose ? Rebecca Henderson en 2022, Loana Lecomte en 2021 voire Kate Courtney en 2019, la coupe du monde Elites Femmes semble suivre un certain schéma depuis quelques saisons. Ces trois pilotes ont eu beaucoup de mal à terminer la saison et Henderson a même perdu le classement général tandis que Courtney l’a récupéré in extremis sur la dernière manche.
On n’en est pas encore là pour Puck Pieterse mais pour la première fois de la saison, championnats du monde compris, la Néerlandaise n’est pas montée sur le podium ce dimanche à Vallnord. Cela sans souffrir de malchance puisque son classement à l’arrivée (7e) reflète bien ses temps au tours. Aux championnats du monde, déjà, elle ne semblait pas avoir les moyens de se battre avec Ferrand-Prévot et Lecomte même si elle décroche une médaille de bronze pour une première saison Elites (comme Mitterwallner, elle devrait d’ailleurs courir chez les Espoirs jusqu’en 2024).
On ne lui souhaite évidemment pas la même trajectoire que ses prédécesseures mais cette récurrence interroge. Pour Courtney, Lecomte et Pieterse si cela se confirme, leur âge pourrait être une piste de réponse : les trois se sont retrouvées dans cette situation lors de leurs débuts chez les Elites, dès la première année pour la Française et la Néerlandaise ou dans la deuxième pour l’Américaine. Toutefois, cela n’explique pas la saison 2022 de Rebecca Henderson. Peut-être l’euphorie de la première victoire, tant attendue, qui permet de tirer encore et encore sur le corps comme le mental jusqu’à dépasser la limite ?
On ne connaît pas la réponse mais du côté des athlètes et de leurs staffs, il y a certainement des leçons à tirer pour éviter de se retrouver dans ces situations difficiles. Le haut niveau est un jeu d’équilibre et chaque année, des pilotes nous montrent qu’il est extrêmement difficile à trouver…
Des conditions difficiles mais des écarts réduits
Habituellement, les conditions difficiles comme les pilotes en ont connu ce dimanche à Vallnord donnent lieu à des écarts importants, parfois abyssaux. La pluie, la boue, le froid (entre 4 et 7°C dans la journée) usent les organismes et demandent aux pilotes bien plus d’énergie que sur les courses disputées dans des conditions plus clémentes.
Toutefois, à Vallnord, on a eu la surprise de voir des pilotes arriver plutôt rapprochés, parfois même au sprint. Chez les femmes notamment, une minute sépare la 3e de la 9e place et en deux minutes, on passe de la 7e à la 19 place. A titre de comparaison, il y avait plus d’écarts l’année dernière ici même par temps chaud et sec ou à Val di Sole cette année, pourtant couru sous un ciel et des températures bien plus cléments.
C’est moins marqué chez les hommes mais la tendance reste la même : le top 15 de cette année se tient dans les mêmes temps qu’un top 19-20 l’année dernière, ce qui n’est pas énorme comme différence. On avait déjà eu l’occasion de l’évoquer plus tôt dans la saison mais les catégories Elites sont aujourd’hui plus denses que jamais, signe d’un sport qui se porte bien ! Et vu l’émulation ainsi que la diversité qui règnent actuellement dans les catégories Espoirs chez les femmes comme chez les hommes, le XC a encore de beaux jours devant lui.
La France aux JO : 3 pilotes pour 2 places ?
On aura l’occasion de revenir plus en détail sur ce point en début d’année prochaine mais sachez que les règles de participation aux Jeux Olympiques ont changé et que même les nations les mieux classées ne peuvent plus y envoyer que deux pilotes par catégorie (femmes et hommes), contre trois auparavant. Un sacré casse-tête pour certains pays, qui avaient déjà du mal à retenir seulement trois athlètes et qui vont désormais devoir en laisser un de plus à la maison…
En France, la situation est claire chez les femmes avec Pauline Ferrand-Prévot et Loana Lecomte nettement au-dessus de leurs concurrentes mais chez les hommes, c’est bien plus compliqué. Joshua Dubau (deux podiums, 2e place en meilleur résultat) et Jordan Sarrou (deux podiums, 3e place en meilleur résultat) avaient réussi un beau début de saison mais la 2e place de Thomas Griot, déjà monté à deux reprises sur des podium avant cela (5e à Nove Mesto et 4e à Lenzerheide) vient secouer les choses.
Le processus de qualification pour les pays n’est pas terminé, celui de sélection des athlètes par les fédérations nationales encore moins mais à l’heure actuelle, un joli casse-tête se profile pour le sélectionneur Yvan Clolus. Et avec encore trois manches restantes cette saison, tout peut encore arriver, y compris une victoire de Victor Koretzky ou un retour au premier plan de Titouan Carod après ses ennuis de santé du début de saison…
Filippo Colombo, fini les blessures ?
Une nouvelle rassurante pour terminer : Filippo Colombo a fait son retour sur le circuit à l’occasion de cette coupe du monde de Vallnord ! Aux avant-postes la saison passée sous les couleurs de BMC, le Suisse a signé cet hiver avec Scott-Sram en VTT et en parallèle avec Q36.5 Pro Cycling Team sur la route, une équipe de deuxième division mondiale. Toutefois, il n’aura pas eu l’occasion de porter ses nouvelles couleurs bien longtemps : une chute en avril sur la classique Parix-Roubaix, l’a laissé avec une fracture au coude gauche.
Le revoir au départ d’une coupe du monde de VTT fait donc chaud au cœur, lui qui avait déjà été victime d’une grave blessure en 2021 (fracture du pelvis à Albstadt). Le résultat est évidemment loin de son meilleur niveau (26e) mais on espère qu’il pourra revenir jouer devant sur les dernières courses de la saison, à Snowshoe et Mont-Sainte-Anne. Sinon, rendez-vous l’année prochaine !