Visite | CMT : le gravel titane à la française
Par Paul Humbert -
Artisan français depuis plus de deux décennies, CMT commence une nouvelle vie mais reste spécialiste de la conception de cadres en titane en France. La marque, installée en Haute-Savoie, développe sa gamme pour que le titane conserve ses lettres de noblesse. Visite :
Lancée il y a plus de 20 ans, la marque CMT s’est spécialisée dans la construction de cadres de vélo de route et de gravel en titane sur mesure. En même temps, quand le nom de l’entreprise est l’acronyme de « Custom Made Titanium », la promesse de Philippe Toinet, le créateur, était simple.
Adapter des cadres à toutes les envies, pratiques et morphologies, voilà l’intérêt du sur-mesure. Après un début d’activité réalisé avec des cadres produits par des sous-traitants, l’atelier est rapatrié en France. CMT se fait sa réputation et satisfait quelques passionnés de titane pendant de longues années. Les parcours de vie étant ce qu’ils sont, la marque ralentit son activité, la crise du Covid passe par là et l’entreprise est mise en sommeil.
Il faudra attendre 2022 pour que CMT renaisse, à la faveur du rachat de l’entreprise par Jean-Pierre Ramoul (au centre de l’image) et Guillaume Humbert, qui lui donnent une nouvelle vie. Pilier derrière son poste à souder, Bastien (à droite sur l’image) oeuvre à l’atelier depuis 2014 et est de retour à la faveur de ce rachat. L’équipe est renforcée par un alternant, Ioen, lors de notre passage dans leurs locaux.
Le titane, quel intérêt ?
Si le carbone s’est démocratisé pour les gravel et VTT moyen et haut de gamme, le choix de matériaux « alternatifs » reste possible avec des marques engagées et des artisans qui proposent acier, aluminium et titane.
Pour CMT, le choix de proposer du titane, c’est celui du confort et d’un matériau inaltérable. C’est également le choix de la réparabilité. Côté business, Jean-Pierre Ramoul annonce son ambition : « Il y a beaucoup d’aciers sur le marché, et il y a une place à reprendre sur le titane en France. »
Le titane est un matériau qui peut être réparé ou rénové. Il peut être dé-soudé, puis re-soudé en cas de fissure. La marque propose ainsi un forfait « rénovation » de ses vélos, et même de vélos d’autres marques (avec des garanties en moins car elle ne connaît pas la provenance des tubes). Dans ce forfait, les alignements son contrôlés, les axes sont re-taraudés, les finitions et les surfaces sont reprises pour redonner un aspect neuf au titane.
Les vélos CMT sur mesure
Si depuis la reprise, CMT a développé une gamme « catalogue », le sur-mesure reste dans l’ADN de la marque. Les modèles de série servent de base aux ajustements réalisés lors d’études posturales.
Pour adapter les vélos aux demandes et aux morphologies des clients, Jean-Pierre Ramoul s’est formé à l’étude posturale et aide ainsi à définir les cotes idéales. Certains clients cherchent parfois à réaliser une homothétie d’un vélo qui leur convient, et c’est également chose possible.
L’étude posturale est réalisée dans les locaux de CMT en Haute-Savoie, mais l’entreprise développe actuellement un réseau de magasins dans lesquels il sera possible de réaliser une étude et de concevoir son vélo. Le réseau s’étendra en France, en Belgique et en Suisse.
CMT propose principalement des montages complets sur la base des composants en stock, ou de commandes spéciales. Il est toutefois possible de n’acheter qu’un kit cadre. Le choix des composants a parfois des répercussions sur les choix techniques réalisés sur le cadre. Si vous souhaitez un vélo à transmission mécanique, des guides seront installés, mais votre cadre pourra en être totalement dénué si vous optez pour une transmission électronique.
La marque CMT a aujourd’hui une capacité de production d’une centaine de vélos par an et il faut compter 3 mois entre une commande et la réception d’un vélo complet.
La gamme gravel CMT
Le gravel apporte à CMT une base de clients plus jeunes et beaucoup d’adeptes de la longue distance.
CMT propose quatre modèles « offroad » : un vélo « allroad », baptisé RX, à mi-chemin entre la route et le gravel. Un modèle « gravel race » hérité du cyclocross, le CX. Un gravel « bikepacking », XP, et une déclinaison « aventure » avec des sacoches, le MX.
La gamme est complétée par deux vélos de route. Tous les vélos sont proposés en cinq tailles. Sur la balance, les cadres sont annoncés à 1,5 kg environ. Les kit-cadres sont proposés à 2990 €, et les montages complets entre 5490 € et 6290 €.
En petit artisan, la marque ne prétend pas innover sur le marché du gravel, mais s’annonce suffisamment réactive pour adapter ses vélos aux nouveaux standards de l’industrie : boitiers T47, patte de dérailleur universelle, nouveau yoke pour pneus de plus en plus larges…
Et quand on parle d’impression 3D en titane, la solution est écartée pour des raisons de prix, de poids et de coût écologique des pièces qui demandent énormément de temps de production.
Construction et assemblage « made in France »
La marque est fière de présenter son savoir-faire, mais ne souhaite pas que ce soit l’argument de vente numéro un. CMT préfère parler de ses vélos et du savoir-faire titane sur mesure. Il n’en est pas moins important de rappeler que c’est une des seules marques à travailler le titane de la sorte en France. L’approvisionnement en tubes et en composants se fait par des fournisseurs, et le reste est réalisé dans l’atelier CMT ou dans la région : conception du vélo, découpe, soudure, finition, assemblage…
À l’atelier, le procédé de création d’un cadre commence derrière un ordinateur, afin de récupérer les cotes du cadre à concevoir. Sur la base de ces informations, Bastien vient s’approvisionner dans la réserve de tubes (aux diamètres standards ISO) qu’il va découper ou faire découper au laser par un prestataire régional.
Les tubes sont cintrés si nécessaires, puis assemblés sur un gabarit où ils seront soudés. Particularité du titane, le matériau n’aime pas l’oxygène, et il faut injecter de l’argon dans les tubes pour réaliser la soudure.
Pour le passage des pneus, certains tubes sont emboutis. Il faut ensuite penser aux finitions pour permettre le passages des cables dans le cadre ou à l’extérieur.
Les cadres passent ensuite en cabine de micro-billage pour un rendu homogène et enlever les traces de chauffe.
On procède ensuite à la pose des stickers ou à l’anodisation. La marque propose trois couleurs par ce procédé : bronze, bleu ou violet.
Pour le moment, CMT ne souhaite pas prendre le chemin du VTT et veut se concentrer sur les vélos de route et de gravel. Il est beau de voir que l’artisanat français trouve son chemin entre les mastodontes de l’industrie du cycle. Le titane a de beaux représentants en France, même si ils sont peu nombreux à assurer la production dans l’hexagone. Look intemporel, machines sur mesure, ces vélos ont un sacré charme !
Plus d’infos sur le site de la marque : https://www.cmt.bike/