Test | Trek Slash 9.9 : pas de chrono sans montrer les crocs
Par Léo Kervran -
Présentée en septembre 2023, la 6e génération du Trek Slash a opéré un virage radical sur le plan technique, loin de ses prédécesseurs qui s’attachaient plutôt à perfectionner un modèle. Avec l’adoption d’une suspension à point de pivot haut, l’augmentation du débattement et le choix de roues au format mulet plutôt que 29″, la marque américaine semble être repartie d’une feuille blanche. Quel est le résultat sur le terrain ? Quelles sont les différences par rapport à la génération précédente ? Voici notre essai complet :
C’est peu dire que Trek nous surpris avec ce nouveau Slash. Plus précisément, on savait que le modèle précédent pouvait encore être perfectionné (lire notre test Trek Slash 9.9 X01 : accrochez votre ceinture) mais s’il y avait bien une chose à laquelle on n’aurait pas touché, c’était la suspension tant elle nous avait séduits.
Visiblement, Trek ne voyait pas les choses de la même façon et pour accompagner, voire devancer, l’évolution de l’enduro et des pratiques, la marque américaine a donc décidé de donner au Slash un tout nouveau visage, inspiré du Session de DH. Dans un sens, on peut le comprendre au vu des dernières évolutions du Fuel EX, qui prend de plus en plus des airs de « petit enduro ». De l’autre, on peut se demander si tout cela est bien raisonnable et si le Slash est encore un enduro exploitable par le commun des mortels…
Châssis
Adieu les belles lignes de l’ancien Slash, élancées et indémodables, qui faisaient penser à un félin tapis et prêt à bondir. Cette sixième génération est beaucoup plus chargée, elle impressionne les novices avec tout cet assemblage de roulettes et de points de pivots, et même quand on est habitué il y a de quoi être un peu décontenancé. On a l’impression d’être face à un objet extrêmement complexe, bien qu’on sache qu’il s’agit d’un vélo d’enduro comme un autre.
Évolutions de style mises à part, le cadre de ce Slash est tout ce qu’il a de plus classique pour un Trek dans sa construction et les options qu’il propose. Qu’il soit en aluminium (deux modèles) ou en carbone comme notre version 9.9 (cinq modèles en tout), le Slash propose en effet les mêmes fonctionnalités.
Côté pratique, on peut citer une boîte à gants dans le tube diagonal avec une chaussette pour y ranger le matériel de secours et un multi-outils dans le jeu de direction. Si l’idée est bonne et l’outil assez complet (dérive-chaîne, emplacement pour maillon rapide, têtes hexagonales de 2, 2.5, 3, 4, 5, 6, et 8 mm, Torx T25, tournevis plat et démonte-obus pour valve tubeless), l’ensemble a en revanche très vite pris du jeu au point d’être bruyant en descente.
Côté réglages, on a des coupelles de jeu de direction interchangeables pour modifier l’angle de direction et un ratio de suspension réglable sur deux positions. Le choix de coupelles interchangeables a conduit Trek à concevoir le vélo avec passages de gaines internes « classiques », via des trous dans la douille de direction plutôt que par le jeu de direction directement. Chacun ses préférences mais nous, on apprécie clairement ce choix ! Trajet des gaines plus simple et plus direct, réglages du poste de pilotage et opérations d’entretien plus faciles… Les avantages sont nombreux.
Les protections en caoutchouc sont généreuses, aussi bien sur le triangle arrière que sur le tube diagonal, avec même une pièce (amovible) pour protéger le vélo si on le pose dans la benne d’un pick-up. Ah, les nord-américains… Les versions en carbone reçoivent en plus un film « anti-impacts » sous la peinture, afin d’augmenter la résistance de l’ensemble face aux pierres et leurs arêtes tranchantes notamment.
En revanche, les butées Knock Block dans le jeu de direction disparaissent, Trek ayant privilégié les possibilités de réglages avec les coupelles interchangeables. Toutefois, ce n’est pas un problème : du fait des nouvelles formes du cadre, il n’y a plus de risques de voir le té de fourche venir en contact avec le tube diagonal et c’est la même chose pour les commandes sur le cintre avec le tube supérieur.
Enfin, la peinture est, comme toujours chez Trek, de bonne qualité. Suivant les modèles, on a le choix entre deux ou trois coloris et celle de notre vélo de test a bien résisté aux assauts de l’environnement pendant les six mois qu’a duré le test. On remarque aussi que la charte graphique de la marque a légèrement évolué, son nom est plus discret sur le tube diagonal et les choix de couleurs font la part belle aux bi-tons. En revanche, la personnalisation Project One, qui permettait de choisir ses propres couleurs dans un catalogue particulièrement vaste, n’est plus au programme.
Suspension
La suspension, c’est donc l’un des gros morceaux de ce Slash 6e génération. D’un 4 bar linkage « bas » très dynamique, Trek est passé pour cette nouvelle version à un système à point de pivot haut, une architecture qui a comme qualités intrinsèques de très bien encaisser les chocs… mais d’être très peu dynamique. Un virage radical, donc.
D’ailleurs, on oppose 4 bar linkage et point de pivot haut mais ça ne devrait pas être le cas : le Slash repose toujours sur ce genre d’architecture, que Trek a modifiée à sa façon en déplaçant le point de pivot des bases sur l’axe de roue. C’est simplement le point de pivot principal, auparavant situé juste au-dessus du boîtier de pédalier, qui est remonté de plusieurs centimètres sur le tube de selle… mais cela change beaucoup de choses.
Le galet de renvoi, essentiel sur tout système à point de pivot haut, compte 19 dents. C’est beaucoup si on le compare à ce qu’on trouve chez d’autres marques (Lapierre, Forbidden…) mais il y a une raison : ici, il est placé à la verticale du pédalier. Pour limiter l’augmentation des frottements dans la transmission, il faut limiter l’angle des maillons de la chaîne entre eux et au vu de la position du galet, un grand nombre de dents permet d’avoir un angle similaire à un galet plus petit mais placé plus en arrière.
Par ailleurs, impossible de passer à côté, le Slash compte un deuxième galet « bonus » derrière le pédalier. Plus rare (mais on le trouve aussi sur Forbidden Dreadnought par exemple), il permet de gérer la longueur de chaîne en direction du dérailleur et doit réduire l’influence de la tension de la chape sur la suspension (via la tension de la chaîne). En sus, il contraint la chaîne à s’enrouler sur plus de dents du plateaux, ce qui diminue le risque de déraillement et répartit mieux la charge, donc réduit l’usure de la transmission. Et tant qu’on parle de chaîne, notez qu’avec tous ces galets le trajet est rallongé par rapport à une suspension classique. Conséquence, le Slash utilise beaucoup de maillons : 126 pour la plupart des tailles (soit une chaîne standard complète) et même 128 pour le XL.
Le pivot haut, pour quoi faire ?
Le principe de cette technologie est de donner une trajectoire plus « reculante » à la roue arrière, afin de mieux enrouler les obstacles et de moins buter sur les rochers et racines les plus agressifs. L’inconvénient est que quand la roue arrière recule elle tire beaucoup sur la chaîne, ce qui a d’autres effets sur la suspension qu’on caractérise par l’anti-squat. Un peu d’anti-squat c’est bien, beaucoup ça l’est beaucoup moins.
Pour retrouver un comportement plus convenable, il faut installer un galet de renvoi au-dessus du pédalier, afin d’augmenter la longueur de chaîne pour avoir de la « réserve » lorsque la suspension se compressera et que la distance entre la roue arrière et les bases augmentera.
Côté chiffres, la suspension du Slash offre 170 mm de débattement soit exactement la même chose qu’à l’avant mais on note que la fourche peut être portée à 190 mm sans poser de soucis au vélo. Trek a tenté de compenser la perte de dynamisme induite par le point de pivot haut (les bases qui s’allongent en compression stabilisent le vélo) avec des valeurs d’anti-squat originales pour un enduro : autour de 100 % sur l’ensemble du débattement. Sur le papier, ça promet une machine avec beaucoup de support au détriment de la souplesse… mais cela devra être confirmé sur le terrain.
La progressivité peut être fixée à 20 % ou 25 % selon la fixation de l’amortisseur sur le cadre (moins progressif vers l’avant, plus vers l’arrière) et tous les vélos sont montés dans la position la moins progressive. Trek recommande de passer sur le réglage 25 % en cas d’utilisation d’un amortisseur à ressort hélicoïdal, ou si les 20 % de progressivité ne suffisent pas avec l’amortisseur à air.
Enfin, on note que pour une fois, Trek n’a pas travaillé avec Fox ou RockShox pour développer un amortisseur doté de technologies particulières. Le Slash est monté avec un RockShox Vivid Air tout ce qu’il y a plus de classique, ou un Fox Float X lui aussi standard sur le modèle le plus accessible.
Géométrie
La géométrie, cela a toujours été l’un des points « faibles » du Slash. Taillé pour la descente, le vélo pêchait en revanche par une position trop portée sur la roue arrière en montée, plus ou moins inconfortable selon les préférences de chacun et surtout loin derrière le reste du marché, qui a trouvé depuis longtemps une recette efficace dans ce domaine.
Sur cette nouvelle génération, Trek a donc pris le problème à bras-le-corps et redressé l’angle de tube de selle de 1,1° à 2,5° suivant la taille. Il y a encore du travail, car l’angle est plus couché en taille XL qu’en taille S à l’inverse de toute logique (plus on est grand plus la selle est haute donc l’angle doit être plus droit pour éviter que la selle ne parte trop vers l’arrière) mais on atteint enfin des valeurs modernes, surtout entre les tailles S (78,1°) et L (77,1°).
Pour le reste, on apprécie que Trek offre toujours une taille ML (reach de 470 mm), ce qui permet de proposer une taille M pas trop grande (reach de 450 mm) et une taille L généreuse (reach de 490 mm) ainsi qu’un vrai XL (reach de 509 mm) tout en conservant des écarts cohérents entre chaque taille, avec un saut de 19-20 mm à chaque fois. A l’arrière, les bases suivent le mouvement avec une longueur adaptée à chaque taille ou presque, grâce à une petite variation dans le positionnement du point de pivot principal sur le triangle avant.
L’angle de direction affiche désormais 63,3° en position d’origine, c’est 0,8° de moins que sur l’ancien modèle… mais il y a une astuce. Comme on l’évoquait plus haut, le Slash accueille des coupelles de direction interchangeables : un modèle neutre pour ces 63,3° et un modèle réversible qui permet de descendre encore plus bas, à 62,6°, ou de remonter à 64,1°. En revanche, on regrette que Trek ne les fournisse pas avec le vélo et ait choisi de les vendre séparément, au tarif de 29,99 € l’unité soit 59,98 € le jeu complet. Ça fait cher pour deux coupelles…
Pour terminer ce chapitre, on note que le Slash passe au format mulet, c’est-à-dire une roue arrière de 27,5″ et une roue avant de 29″. Après sept années de 29″, c’est un changement de taille ! Le vélo reste cependant compatible avec un montage 29″ mais il faudra alors démonter le garde-boue arrière, installé d’origine sur les bases et les haubans et surtout acheter un nouveau pied d’amortisseur (la pièce qui supporte le flipchip pour le ratio de suspension), vendu séparément au prix de 34,99 €. Avec les coupelles de direction, cela fait au total 94,97 € en plus pour avoir un vélo réellement complet et débloquer toutes ses possibilités d’évolutions… Certes, pour une machine vendue plusieurs milliers d’euros voire plus de 10 000 € dans les versions les plus luxueuses c’est peu, mais c’est aussi très mesquin.
Enfin, une taille fait exception à cette règle : les vélos en taille S sont montés en 27,5″ devant comme derrière et ne sont pas prévus pour autre chose, Trek jugeant ce format de roue plus adapté à la taille du cadre.
Equipements
Comme lors du test de la génération précédente, c’est le modèle 9.9 X0 AXS que Trek a mis à notre disposition pour cet essai. Avec un tarif de 9 999 € on est dans le très (très) haut de gamme… mais il y a encore plus cher et plus luxueux au catalogue !
Côté suspension, c’est du RockShox et ce qui se fait de mieux en enduro dans sa gamme : une fourche Zeb Ultimate, en 170 mm de débattement donc, associée à un amortisseur Vivid Air Ultimate en 230 x 65 mm. Arrivé à la rédaction avant la sortie de la dernière génération de la Zeb (lire RockShox 2025 : Charger 3.1, menus raffinements… et un Vivid Coil !), notre modèle ne profite pas de ces évolutions mais on imagine que cela devrait arriver sans tarder au catalogue.
Transmission et freins sont signés Sram, avec un groupe X0 AXS équipé d’un petit plateau de 30 dents (28 dents minimum et 34 dents maximum sur le vélo) et des freins Code Silver en disques Sram HS2 de 200 mm. Nous nous sommes éloignés légèrement de la configuration de série en les remplaçant les leviers et étriers par un ensemble Maven Bronze, à la fois pour tester cette version des nouveaux gros freins de Sram, la plus accessible, et parce que les Maven nous paraissent désormais bien plus adaptés au programme du Slash que les Code. Mais à nouveau, les Maven ont fait leur apparition plusieurs mois après cette sixième génération de Slash et il n’est donc pas étonnant de ne pas les avoir sur notre exemplaire. On espère simplement que Trek saura faire évoluer le montage pour les prochains millésimes.
Gomme trop dure, flancs trop souples... Les pneus d'origine ne conviennent pas du tout au vélo.
Retour sur du Trek, ou plutôt du Bontrager, pour le train roulant. La paire de roue est une Line Pro 30 en carbone (29 mm de largeur interne, 27 mm de haut, 1730 g annoncés en mulet) et les pneus un ensemble SE5 (avant) / SE6 (arrière) en version Team Issue. Autant le dire tout de suite, nous n’avons pas du tout apprécié ces derniers. Gomme trop dure, flancs trop souples (carcasse simple pli 120 tpi avec renfort en nylon), nous les avons trouvés complètement inadaptés à une pratique enduro à l’européenne, et dans les Alpes en particulier. Afin de tester le vélo dans de bonnes conditions, nous les avons donc rapidement remplacés par des modèles plus adaptés à nos conditions et préférences.
Enfin, du côté des équipements c’est un mélange des deux marques avec une tige de selle RockShox Reverb AXS, en 170 mm de course sur notre taille ML, une selle Bontrager Arvada, des poignées Bontrager XR Pro qui ne nous ont pas séduits avec leur collier de serrage à l’extérieur du cintre (inconfortable pour les mains) et l’inévitable poste de pilotage en une pièce Bontrager RSL, qu’on retrouve sur tous les Trek haut de gamme.
Sur la balance, Trek annonce 15,78 kg en taille M et nous avons pesé notre modèle d’essai en ML à 16,5 kg dans la configuration décrite ci-dessus (pneus plus adaptés au programme, Sram Maven), ce qui donnerait 16,4 kg avec les freins d’origine. Rien de surprenant pour un gros enduro mais cela reste lourd dans l’absolu.
Trek Slash : versions et tarifs
Le Slash se décline en sept modèles, deux en aluminium en cinq en carbone. Dans les premiers, on a le Slash 8 à 4559 €, seul modèle à être équipé de suspensions Fox (fourche 36 Rythm et amortisseur Float X Performance) puis le Slash 9 à 5499 €, qui passe à RockShox (Zeb Select & Vivid Air Select+).
Les modèles en composite commencent à 7899 € avec le Slash 9.8 XT, équipé d’un ensemble Shimano Deore XT. Comme à son habitude, Trek propose son équivalent en version Sram avec le 9.8 GX AXS, doté des mêmes suspensions et train roulant mais qui tourne, comme son nom l’indique, sur un groupe Sram GX AXS et des freins Sram Code Bronze.
Enfin, en très haut de gamme on a les trois Slash 9.9, version X0 AXS comme ici à 9999 €, XTR à 11 499 € ou XX AXS à 12 499 €.
Le test du Trek Slash 9.9
Malgré toutes ses roulettes et qui lui confèrent cette allure impressionnante, le Slash reste sur le papier un vélo d’enduro. Et un vélo d’enduro, ça doit pédaler alors allons-y ! Qu’on soit assis ou debout, la position sur les pédales est (enfin) réellement bonne sur cette taille ML. La tube de selle ne s’affaisse pas dès qu’on ouvre l’amortisseur et on est bien installé comme sur n’importe quel enduro moderne digne de ce nom.
En termes de comportement au train, le Slash a deux visages : un sur le roulant et l’autre dans le raide, lorsqu’on va chercher les 3-4 plus grands pignons de la cassette. Dans le premier cas de figure, le vélo s’en sort avec les honneurs pour une machine à point de pivot haut (si on parvient à passer au-dessus du bruit des galets supplémentaires) et format mulet. L’anti-squat élevé permet d’avoir un pompage maîtrisé, on trouve un rythme de croisière facilement et tout se passe étonnement bien, le Slash semble parti pour tenir des heures.
Malheureusement, il n’en est plus du tout ainsi quand la pente s’accentue… Lorsqu’on arrive sur les rapports les plus courts, on perd toute notion de rendement et le Slash apparaît collé au sol. On aurait presque l’impression de tirer un VTTAE moteur éteint, quelques kilogrammes en moins ! Est-ce à cause de la ligne de chaîne ? La position toujours aussi bonne et le petit plateau de 30 dents permettent presque de grimper aux arbres mais on a clairement l’impression de devoir se battre pour avancer, que toute l’énergie qu’on met dans les pédales s’évapore au lieu de passer à la roue arrière. Frustrant.
Enfin, en relance, le Slash montre une belle réactivité. Depuis l’arrêt, il demande un certain effort pour être lancé (forcément, avec autour de 17 kg sur la balance tout équipé) mais dès qu’on a un peu de vitesse ça se passe bien et pour des sprints en milieu de spéciale, le tout est assez efficace. Même chose pour le grip, franchement bon pour une roue arrière de 27,5″ et on peut réellement aller s’amuser dans les franchissements. Tant mieux, mais on gardera tout de même une image (très) partagée de ce Trek Slash au pédalage, meilleur qu’un Norco Range certes mais avec des points faibles très prononcés dans certains domaines. Toutefois, ce n’est pas là que le vélo est attendu en premier lieu : direction les descentes !
Avec le RockShox Vivid Air monté d’origine, les premiers tours de roue sont surprenants : le Slash n’est pas confortable. En revanche, il pousse ! Sans être réellement dynamique ou joueur, car il ne se passe rien lorsqu’on pousse sur les jambes et qu’il il faut s’employer pour réussir un bunny-hop propre à son guidon, le Trek Slash invite à rouler toujours plus fort, toujours plus vite. Plus les chocs sont gros, plus on prend de vitesse et plus il aime ça, il faut lui rentrer dedans pour le faire fonctionner.
Le grip de la suspension, qu’on avait pu entrapercevoir à la montée, fait des merveilles et on lui découvre en plus une capacité impressionnante à encaisser tout ce qui passe sous les roues. Encaisser, et non effacer : ce n’est pas un tapis volant, on sent (très) bien le terrain mais le vélo est comme imperturbable, ne se fige pas au freinage et tient sur sa ligne quoi qu’il arrive… ou presque.
En effet, le cadre du Slash est très rigide – une véritable tradition chez Trek – et sur notre version haut de gamme, les équipements (roues, poste de pilotage) viennent en rajouter une couche. Le vélo demande de la précision et de l’engagement pour être mené, l’hésitation n’a pas sa place et chaque erreur est immédiatement sanctionnée. C’est intimidant au début mais peu à peu, on prend la mesure de la machine ainsi que des énormes capacités, on se fait de plus en plus confiance, on touche de moins en moins aux freins et le pilotage s’affine pour correspondre de mieux en mieux à ce qui fonctionne sur ce vélo. Et si une faute survient alors, il y a fort à parier que ce sera plus de la faute du ou de la pilote que de la machine…
De façon intéressante, tout cela ne se fait pas au détriment de la maniabilité. Bien que le reach soit tout à fait correct pour une taille ML (470 mm), le Trek Slash apparaît presque court une fois qu’on est dessus et il peut tourner très serré, à la condition encore une fois d’être mené de manière volontaire plutôt que passive. Le format mulet est bien exploité et on peut faire voler la roue arrière dans les changements rapides de direction ou la placer précisément dans les virages pour suive la roue avant, parfois un peu plus en glisse que prévu mais sans que ce ne soit déstabilisant.
Trek ne nous ayant pas fourni les coupelles de direction et le pied d’amortisseur pour le montage en 29″, nous n’avons pas pu essayer ces possibilités d’évolutions mais on a pu tester le montage avec un amortisseur à ressort hélicoïdal, le dernier RockShox Vivid Coil en l’occurence. Dans cette configuration, le grip est poussé encore un cran plus loin et la suspension gagne en souplesse ce qu’elle perd en support et en lecture de terrain : le Slash devient presque un tapis volant, qui filtre les impacts et se fait étonnement confortable pour une machine de course.
Toutefois, attention au piège. Cette nouvelle facilité de prise en main est une façade car la rigidité du cadre est toujours là, et les erreurs punies avec la même diligence. Disons que ça ne fait pas du Slash une machine plus accessible mais pour le ou la pilote qui aurait le niveau pour rouler sur ce genre de machine, c’est un montage intéressant pour s’économiser sur les longues journées en bikepark ou les enduros les plus caillouteux, sur des traces en altitude en montagne par exemple.
Enfin, côté mécanique et entretien, nous n’avons pas rencontré les problèmes de déraillement qui ont marqué les premiers mois de la vie de cette sixième génération de Slash. D’après la marque, il s’agissait d’un problème d’entretoises au niveau du galet inférieur qui a rapidement été réglé. On notera toutefois qu’elle a choisi de revoir la conception de cette pièce pour le Slash+ à assistance électrique, et qu’on peut imaginer voir la version retravaillée arriver plus tard sur le Slash.
En revanche, le roulement de ce galet s’est complètement bloqué au fil du temps, mais le plus gênant fut surtout les bruits du vélo en descente. Entre le multi-outils dans le jeu de direction et un autre bruit plus difficile à identifier à l’arrière (chaîne sur le protège-base ? Sur une pièce en plastique ?), le Slash est tout sauf discret. Il sonne, claque et résonne presque en permanence et même si ça n’a pas d’influence sur son comportement, c’est usant pour la personne derrière le guidon.
Verdict
Attention, vélo pour pilote averti(e) ! S’il change complètement de visage pour cette sixième génération, et même de comportement sur le terrain, le Trek Slash ne change pas de philosophie et reste un modèle réservé aux personnes avec un bon coup de guidon, qui savent dicter leur loi à leur vélo. Encore plus pointu que son prédécesseur, c’est maintenant une pure machine de compétition, faite pour dévaler les pentes les plus raides et les plus défoncées avec un seul objectif, le chrono. Le grip et le support qu’il offre mettront en confiance les plus expérimentés pour leur donner envie d’aller encore plus vite, d’aller chercher les limites… mais tout cela se fait au détriment du côté joueur, complètement absent, et dans une certaine mesure des performances au pédalage. Le Trek Slash brille dans son domaine, mais il est aussi plus exclusif que jamais.
Trek Slash 9.9 X0 AXS
9999 €
16,4 kg taille ML, avec porte-bidon et pneus renforcés, sans pédales
- Capacité à aller vite impressionnante, vélo qui pousse
- Grip de la roue arrière, surtout pour un mulet
- Deux visages selon le type d'amortisseur
- Maniabilité dans les virages serrés, à condition d'être actif dans le pilotage
- Performances au pédalage mauvaises en haut de cassette
- Ensemble très rigide et peu tolérant
- Vélo collé au sol, pas joueur
- Suspension pas dynamique, pas à l'aise dans le lent
- Vélo bruyant
- Pneus trop légers pour le programme
Évaluation des testeurs
- Prix d'excellence
- Coup de coeur
- Rapport qualité / prix
Plus d’informations : trekbikes.com