Test | Selles SQlab : à la pointe de l’assise

Par Léo Kervran -

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Test | Selles SQlab : à la pointe de l’assise

Spécialisée dans les points de contacts entre les pilotes et leur vélo, SQlab se distingue de ses concurrents par une approche du domaine très scientifique, presque médicale. Simple argument marketing ou apport tangible sur le terrain ? La meilleure façon de le savoir, c’est encore d’essayer et c’est ce que nous avons fait avec quatre selles différentes de la marque pendant plus d’un an. Voici notre verdict :

Photo Hoshi Yoshida

Chez SQlab, tout commence par la mesure de la largeur du bassin ou précisément, de l’écartement des ischions (les deux pointes osseuses qui prennent appui sur la selle).

Pour ce faire, la marque a développé son propre outil de mesure, « vendu » gratuitement sur son site pour permettre à tous de prendre ses mesures avant de choisir sa selle. Toutefois, le principe est extrêmement simple et beaucoup d’entre nous peuvent déjà le faire à la maison : prenez un grand morceau de carton en bon état et posez le sur une chaise ou un banc à l’assise plate. Asseyez-vous ensuite sur le carton, pieds levés et dos décollé du dossier s’il y en a un puis aidez-vous de vos mains pour « tirer » sur le banc par en dessous et ainsi bien marquer l’empreinte sur le carton. Il ne reste plus qu’à mesurer la distance entre le centre des deux empreintes et voilà, vous avez votre largeur d’ischions !

Photo Hoshi Yoshida

Selon la pratique visée, il faut ensuite ajouter de zéro à quatre centimètres à cette valeur pour obtenir votre largeur de selle. En effet, on ne s’assoit pas pareil sur un vélo de route typé compétition ou sur un enduro ! Plus la position est droite, plus la selle doit être large, avec une fourchette qui va de la machine de triathlon ou contre-la-montre au vélo de ville hollandais.

Large à l’arrière… mais aussi à l’avant. Les selles SQlab se distinguent notamment par leur bec de selle long et large et ce n’est pas innocent. Lorsqu’on est sur l’avant de la selle, dans une montée raide par exemple, la pression ne s’applique plus sur les ischions mais sur les tissus mous, fragiles et sensibles de l’entrejambe. Avec cette forme, SQlab cherche à augmenter la surface de contact pour diminuer la pression et améliorer le confort.

Autre caractéristique des selles SQlab, l’Active Technology. Réservé à certains modèles, ce système permet à l’arrière de la selle de se déformer de part et d’autre de son axe, dans le sens de la longueur. La selle accompagne ainsi le bassin lors du pédalage au lieu de le verrouiller et cela soulage le dos, ou plutôt les disques intervertébraux (les éléments cartilagineux entre chaque vertèbre qui font office d’amortisseurs), des contraintes habituelles liées au pédalage.

Selon la marque, les selles avec l’Active Technology sont donc particulièrement indiquées aux personnes qui se plaignent de maux de dos après une sortie en vélo. La déformation de la selle est contrôlée par un élastomère proposé en 3 niveaux de dureté, pour s’adapter au poids de chacun.

On relève aussi que les selles SQlab ont une forme très travaillée dans le sens de la longueur, avec une base arrière bien relevée pour caler le bassin, qui descend vers une petite vague sur laquelle viennent se poser les ischions, le tout autour d’une partie évidée pour soulager la pression au centre. En largeur en revanche, la selle est « plate » et descend peu sur les côtés, se limitant au minimum acceptable pour éviter les bords saillants qui pourraient entraîner des frottements désagréables sur l’intérieur des cuisses.

Enfin, le rembourrage est généralement assez fin et va de « plutôt ferme » à « très ferme » selon les selles. Ici, la réflexion est la même que pour le cuissard que nous avions testé il y a quelques temps : un rembourrage trop épais et trop mou s’affaisse avec le temps, ce qui finit par créer des points de pression supplémentaires. Un rembourrage relativement réduit suffit amplement pour le confort si la forme de la selle est adaptée et permet d’éviter ces problèmes.

Pas besoin de modèle homme ou femme selon SQlab, tout le monde gagne à avoir des os bien positionnés et moins de pressions sur les tissus mous.

Vous l’avez compris, la réflexion est poussée et à ce titre, on peut s’étonner de ne voir que des modèles « unisexe » dans la gamme, sans différence entre les femmes et les hommes comme on peut le voir chez d’autres fabricants. Pas besoin, nous répond la marque, car tout le monde gagne à avoir des os bien positionnés et moins de pressions sur les tissus mous de l’entrejambe. En proposant chacun des 28 modèles de selle en 3 à 5 largeurs différentes, SQlab s’assure de parler à tout le monde peu importe sa pratique ou son anatomie, et évite d’enfermer les pratiquants dans des cases.

Bon point pour les plus intéressés d’entre vous par l’aspect technique et anatomie du sujet, la marque expose toute sa réflexion sur son site à travers une très complète section « Ergonomics » et les différentes études scientifiques qui ont permis le développement ou la validation de certains concepts, comme la « vague » Ergowave ou des mesures de pression, sont également en accès libre.

La théorie c’est bien joli mais qu’est-ce que ça donne sur le terrain ? SQlab nous a proposé d’essayer 4 modèles bien différents pour éprouver sur les sentiers toute cette réflexion et se faire une bonne idée de l’ensemble de la gamme.

Nous avions ainsi la 612 Ergowave plutôt orientée performance et route / XC, la 612 Ergowave R encore un peu plus sportive (vague décalée pour être plus adaptée à la position du bassin qui bascule lorsqu’on délivre une puissance supérieure à 200 W, rembourrage réduit et plus ferme), la 611 Ergowave Active qui est plutôt sur le segment all-mountain / enduro loisir et enfin la très particulière 60X Infinergy pour la même cible.

Dernière-née de la marque, elle est entièrement fabriquée en Allemagne à partir d’un matériau similaire à celui des chaussures de course à pied, qui doit offrir une certaine absorption des chocs et vibrations. Les deux 612 étaient en 13 cm de large (la largeur idéale pour votre serviteur en XC/trail selon la mesure SQlab), la 611 en 14 cm et la 60X en 15 cm. Comptez entre 100 et 200 € pour ces modèles, avec parfois plusieurs options de finition (comme le matériau des rails) qui peuvent faire varier le prix.

Du fait de la forme travaillée des selles, il ne faut pas hésiter à consacrer un peu de temps à l’installation sur le vélo. Le nez doit être bien à l’horizontale, avec une petite marge de quelques degrés selon vos préférences mais pas plus, tandis que la hauteur de selle doit être mesurée à partir de la vague située devant la partie arrière.

Avec les 612 et 612 R, les premières sensations sont, à notre grande surprise, légèrement inconfortables. Entre le rembourrage ferme (et même très ferme sur la 612 R) et la forme travaillée, il faut un peu de temps pour s’habituer à ces selles. Impossible par exemple d’envisager de les rouler sans cuissard pour une courte sortie ou un trajet utilitaire de quelques dizaines de minutes à ce stade. Cependant, une fois la période d’adaptation passée, nos sensations se sont radicalement transformées.

Sur des sorties de moins de deux heures, on ne sent pas particulièrement de différence avec n’importe quelle autre selle, si ce n’est peut-être une meilleure stabilité que sur certains modèles, mais plus la sortie dure et plus elles se distinguent de la concurrence. Après 2h30, quand la plupart des autres selles deviennent de moins en moins tolérables et imposent de se mettre fréquemment en danseuse, nous n’avons aucun problème avec ces deux selles.

3h, 4h et même plus de 5h sur la 612 R lors de notre expérience au Grinduro Switzerland, le temps passe mais aucune douleur ne fait son apparition. On pensait préférer les selles assez plates qui laissent une grande liberté de mouvement avant cet essai mais le calage proposé par ces selles ne nous a absolument pas dérangé.

Vélo de gravel, de XC ou d’enduro, le constat est le même et ce sont maintenant nos deux selles de référence. La forme peut paraître imposante en statique mais ne gêne pas en descente, le revêtement ne se transforme pas en patinoire et mis à part les rails qui portent maintenant les marques de la tige de selle, nos deux modèles sont encore comme neufs. Du tout bon pour la suite !

Pour la 611, c’est différent. Cette fois, on a l’impression d’être assis sur un véritable canapé durant les 30 ou 40 premières minutes de vélo, la meilleure selle que nous ayons essayé à ce jour. Passé cette limite, c’est l’effet inverse des 612 et les douleurs font leur apparition. Heureusement, c’est au niveau des ischions plutôt que des tissus mous mais le résultat est le même, on a de plus en plus de mal à rester assis plus de quelques minutes.

Dans le domaine de l’assise, ce qui ne convient pas à quelqu’un peut être l’idéal pour le voisin ou la voisine.

Rembourrage un peu trop mou pour notre fessier habitué à quelque chose de plus ferme ? Montée sur un vélo à la position un peu trop sportive ? Largeur un peu trop importante pour le bassin de votre serviteur ? Les pistes d’explication sont nombreuses mais dans cette version 14 cm, cette selle ne fait certainement pas partie de nos préférées. Toutefois, dans le domaine de l’assise ce qui ne convient pas à quelqu’un peut être l’idéal pour le voisin ou la voisine et c’est exactement ce qu’il s’est passé pour nous.

Photo Hoshi Yoshida

On l’a laissée par curiosité à une de nos testeuses et elle l’a immédiatement adoptée, alors qu’elle pensait déjà avoir une selle qui la satisfaisait totalement. Il nous est en revanche plus dur de juger de l’effet de la technologie Active, personne n’ayant à se plaindre de douleurs au dos en temps normal dans notre équipe de testeurs.

Pour la 60X, le constat est plus ou moins le même. Elle a un peu moins roulé que les autres, notamment à cause de son poids dans cette version 15 cm, mais elle a passé du temps sur des e-bikes et y a semblé tout à fait à son aise. Elle a aussi vu des sorties comme le tour du lac d’Annecy par les hauteurs et la mousse n’en garde aucune trace, ce qui laisse présager de bonnes choses quant à sa durée de vie.

Verdict

Intéressant sur le papier, le concept des selles SQlab a également délivré de belles choses sur le terrain même s’il a aussi montré certaines limites. Au final, on termine cet essai avec la conviction que chacun peut trouver sa selle idéale dans la gamme SQlab, à condition d’être prêt à y consacrer un peu de temps et d’effort. C’est un peu comme les chartes de géométrie qui veulent sortir de la norme S/M/L, l’idée est bonne mais demande plus d’investissement et de connaissances de la part des pratiquants pour faire le bon choix. Dernière information utile, la marque vient tout juste d’être rachetée par le groupe Boards & More dont fait notamment partie Ion. A l’avenir, il devrait donc être plus facile de trouver les produits SQlab en France, que ce soit en magasin ou sur les salons des plus grands évènements nationaux.

Plus d’informations : sq-lab.com

ParLéo Kervran