Test | Pinarello Dogma XC HT : un hardtail en forme olympique

Par Olivier Béart -

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Test | Pinarello Dogma XC HT : un hardtail en forme olympique

Alors que Tom Pidcock est un inconditionnel du tout-suspendu, Pauline Ferrand-Prévot avait demandé un semi-rigide lorsque Pinarello a créé les VTT pour l’équipe Ineos. Et c’est ce Pinarello Dogma XC Hardtail qu’elle a utilisé pour conquérir son titre olympique aux Jeux de Paris 2024. Mais ce genre de machine de course est-elle exploitable par un « simple vététiste » comme vous et nous ? Réponse avec notre test !

Avant de plonger dans le test, replantons le décor : l’équipe Ineos est avant tout un team de route, dont Pinarello est l’équipementier historique. Mais elle compte dans ses rangs un certain Tom Pidcock qui est un athlète complet brillant tant sur l’asphalte qu’en cyclocross et à VTT. Seul souci, même si Pinarello a déjà fait des VTT dans les années 90 et début 2000, la marque italienne avait délaissé ce segment ces dernières années. C’est d’ailleurs au guidon d’un BMC « anonymisé » que le Britannique est allé décrocher son premier titre olympique à Tokyo en 2021. Cette situation ne pouvait pas durer et, avec le recrutement de Pauline Ferrand-Prévot aux côtés de Pidcock, Pinarello a décidé de mettre en chantier le développement non pas d’un seul, mais de deux nouveaux VTT en vue des JO 2024 à Paris.

Après avoir essayé le Pinarello Dogma XC tout-suspendu en avril lors de sa présentation publique (voir : Test nouveauté | Pinarello Dogma XC : un VTT radical et atypique !), nous vous proposons cette fois un test du Dogma XC hardtail, le semi-rigide que Pauline Ferrand-Prévot a utilisé pour décrocher sa médaille d’or aux JO de Paris.

Châssis

Le développement des deux VTT Pinarello Dogma a été rapide. Très rapide même : 9 mois seulement ! Mais la marque a pu s’appuyer sur sa solide expérience route et même piste pour l’étude de ces deux modèles tout-terrain. Elle disposait aussi de briefings assez clairs de la part de Tom Pidcock, pour le tout-suspendu, et Pauline Ferrand-Prévot, pour le semi-rigide.

Premier point : la volonté du team de disposer de vélos rigides et avec un rendement de très haut vol. On ne s’en cache pas, il s’agit de vélos exclusifs, pensés pour la performance pure.

L’endroit le plus visible où cette recherche de rigidité se matérialise est au niveau du boîtier de pédalier, avec un tube de selle qui se divise en forme de « Y » pour limiter au maximum la flexion dans cette zone.

En passant, on remarque aussi que le boîtier de pédalier est fileté pour faciliter le travail des mécaniciens, et l’anti-déraillement maison imprimé en 3D, qui vient complètement envelopper le haut du plateau pour éviter tous les désagréments. Il accepte du 40 dents maximum.

Dans la même lignée, les bases sont très courtes et varient selon la taille du cadre : de 422 (S) à 430mm (XL). C’était plus facile d’obtenir ce résultat sur le semi-rigide que sur le full (qui a des bases à peine plus longues), mais tout de même, on se situe dans des valeurs très basses et c’est souvent un point important pour obtenir un châssis réactif et maniable.

Pour en finir avec la partie rigidité, on remarque aussi que la proue est particulièrement massive, et prolongée par un poste de pilotage lui aussi profilé et massif. La partie aplatie entre la potence et le cintre permet une légère flexion verticale pour absorber les vibrations, par contre tout est fait pour éviter la torsion et les mouvements parasites lorsque le pilote est en sprint ou met de gros appuis en virage. Nous y reviendrons au chapitre des équipements.

On relèvera tout de même que le poste de pilotage est couplé à un jeu de direction qui intègre un blocage à 60° d’angle de rotation afin d’éviter que les commandes entrent en contact avec le tube supérieur. L’intention est très louable, mais 60°, c’est vraiment peu et il arrive qu’on se sente limité dans certaines circonstances, à basse vitesse notamment. 75° nous aurait semblé plus judicieux.

Mais on a laissé le meilleur pour la fin : LE point le plus remarquable sur ce Pinarello Dogma XC Hardtail, ce sont assurément ses haubans asymétriques.

Au-delà de la signature visuelle, cela permet aux yeux de Pinarello d’offrir le meilleur en matière d’absorption des vibrations et de transfert de la puissance, en tenant compte de la présence de la transmission à droite. Ce côté est donc plus axé sur la rigidité, alors que l’autre est moins renforcé et doté d’un hauban plus long, qui remonte plus haut sur le tube de selle pour mieux dissiper les vibrations. Nous verrons sur le terrain si c’est efficace…

Au final, ce cadre est annoncé à 960 grammes dans sa version haut de gamme en carbone Toray M40J, et environ 50 g plus lourd pour le deuxième modèle doté de fibres différentes. Enfin, on signalera que les cadres Pinarello VTT sont fabriqués en petite série au Portugal. Du « made in UE » qui ne gâche rien !

Géométrie

Les cotes, qui sont très similaires entre le full et le semi-rigide, sont un mélange de valeurs très contemporaine (reach important) avec d’autres plus conservatrices (angle de direction à 67,5/68° selon la taille) et certaines plutôt radicales (comme les bases comprises entre 422 et 430 mm selon les tailles sur le semi-rigide). Quatre tailles seront disponibles, du S au XL.

Par expérience, tant sur le tout-suspendu que sur le semi-rigide, nous vous recommandons de ne pas sur-tailler avec le Dogma. Pour 179cm, le L est clairement trop grand, et le M est absolument parfait. Tom Pidcock et Pauline Ferrand-Prévot roulent tous les deux en S.

Equipements

Une fois n’est pas coutume, commençons par le poste de pilotage, qui est propre aux VTT Pinarello et qui attire immédiatement le regard. Il est produit sous la bannière Most, l’équipementier de la marque italienne, et baptisé Talon Ultra XC. Le but : offrir le meilleur rapport poids/rigidité, et intégrer les câbles et Durits pour dégager le champ de vision du pilote.

Très massif, il est disponible en 60 et 80 mm de longueur pour la potence et sa largeur est de 760 mm. Il est facilement réglable en hauteur, grâce à des entretoises qui se placent en haut ou en bas de la potence, ce qui est bien pratique et pas si fréquent sur ce genre de poste de pilotage intégré. Autre bon point, il est livré avec un porte-GPS spécifique et bien pratique.

Pour le reste des équipements, Pinarello a dû s’écarter un peu des montages adoptés par le team Ineos avec ses sponsors. Exit donc les suspensions électroniques SR Suntour, les roues P1 ou la transmission Shimano XTR. Pour les deux premiers, la production n’était pas suffisante et les tarifs trop élevés pour envisager un montage sur des vélos de série, et pour la transmission, Pinarello s’est rendu compte que les clients préféraient du Sram AXS. Seule les freins viennent de chez Shimano.

On ne s’attardera pas ici sur chaque composant car la plupart sont connus, mais faisons tout de même un petit focus sur la fourche, puisqu’il s’agit de la toute nouvelle Fox 32 SC, dotée d’un tout nouveau châssis avec arceau inversé et d’une nouvelle cartouche Grip SL.

Annoncée à 1200g, cette proue nous a semblé parfaitement à sa place sur ce vélo. Efficace au niveau amortissement, elle nous a également paru d’une rigidité sans faille pour un usage XC. Et ses 100 mm de débattement ne nous ont pas paru limitants. Bref, ce premier contact a été très prometteur et nous a donné envie de réaliser un test plus longue durée. En attendant, si le sujet vous intéresse, voici une présentation plus complète : Nouveauté | Fox 32 SC GRIP SL 2025 : un arceau inversé et bien plus encore !

Pinarello Dogma XC HT : prix, poids et versions

Pinarello est une marque exclusive et il ne faut pas s’attendre à des modèles d’entrée de gamme. Les prix s’en ressentent, mais restent dans la moyenne des autres vélos XC très haut de gamme du moment. Deux niveaux de montage seront disponibles sur chaque cadre :

Pinarello Dogma XC Hardtail

  • Cadre : fibres Toray M40J
  • Groupe : Sram XX SL T-Type
  • Freins : Shimano XTR
  • Roues : DT Swiss XRC 1200
  • Fourche : Fox 32 SC Factory

Poids : 9,5 kg
Prix : 11 000 € (vélo complet) –
5000 € (kit cadre)

Pinarello XC Hardtail

  • Cadre : fibres Toray T900UD
  • Groupe : Sram GX Eagle T-Type
  • Freins : Shimano XT
  • Roues : DT Swiss 1700 Spline
  • Fourche : Fox 32 Performance Elite SC

Poids : 10,2 kg
Prix : 7000 €

Pinarello Dogma XC Hardtail : le test terrain

Lors de notre premier contact avec le Pinarello Dogma XC tout-suspendu en Italie (voir ici : Test nouveauté | Pinarello Dogma XC : un VTT radical et atypique !), le vélo nous avait paru très exclusif et vraiment axé sur la compétition de haut niveau. « Vous voulez le vélo de Tom Pidcock ? Très bien, mais maintenant, assumez ! », semblait-il nous dire. Ici, avec le semi-rigide, l’histoire est assez différente, et nous avons été plutôt surpris.

Sans surprise, côté rendement, ça envoie dès les premiers tours de manivelle. Malgré des roues pas forcément super légères, le Pinarello Dogma XC HT accélère très, très fort. Les relances sont tranchantes et il semble en redemander sans arrêt. Voilà qui a un côté assez jouissif… mais quand on n’est pas champion du monde, ça peut devenir vite usant.

Et là par contre il y a bien une surprise : on découvre un visage plutôt conciliant à ce Dogma HT ! Bien sûr, c’est un semi-rigide, mais par rapport aux autres vélos de ce segment, on le classerait carrément parmi les plus tolérants et faciles à vivre. Bref, tout l’inverse du tout-suspendu.

Clairement, les haubans asymétriques ne semblent pas là juste pour le spectacle : ils filtrent très bien les vibrations du terrain et garantissent un grip tout à fait raisonnable à la roue arrière, qui n’a pas tendance à rebondir partout, que ce soit en montée ou en descente.

Le boîtier de pédalier n’est pas non plus dans la sur-rigidité, de sorte que le vélo conserve très bien la vitesse, et ne « s’éteint » pas quand on a une baisse de régime. Que du contraire, ce qu’on sent dans ces moments-là, c’est surtout son poids plume qui aide à garder l’illusion qu’on est en forme même quand on n’est pas entraîné comme un champion.

En descente technique, la précision de l’avant est redoutable et impose un peu de vigilance, mais le châssis étant plutôt conciliant dans l’ensemble, ce n’est pas si difficile que cela de le tenir et de se sentir en confiance quand on prend de la vitesse.

Seul souci : l’absence de tige de selle télescopique, qui est pour nous une vraie faute, presque encore plus sur un semi-rigide. Nous avons d’ailleurs très vite équipé le Dogma d’une Reverb AXS pour cet essai et cela permet vraiment au vélo de s’exprimer pleinement en descente.

Pour le reste, nous l’avons adoré dans les enchaînements de virages en singletrack rapide, où il permet des enchaînements ultra rapides et des relances super vives qui permettent de prendre énormément de plaisir.

Il nous a aussi surpris dans les ascensions raides et techniques, avec un grip de la roue arrière difficile à prendre en défaut. Bien sûr, c’est un hardtail et il fatigue un peu plus son pilote qu’un tout-suspendu, mais il montre des capacités assez surprenantes en confort et en accroche au niveau de l’arrière.

Bon, on reste tout de même convaincus de l’intérêt d’un tout suspendu au sein de la rédaction, et pas certain qu’on choisirait un semi-rigide pour rouler sur un parcours de coupe du monde ou même sur le tracé olympique de la colline d’Elancourt malgré les côtes très roulantes, mais cet essai réalisé en Belgique et sur le tracé de la coupe du monde des Gets nous a tout de même montré qu’un semi-rigide bien fait garde une certaine pertinence.

Conclusion

On sent bien qu’ils ont un ADN commun et que tous les deux ont été développés dans une logique de haute performance, couronnée par deux titres olympiques, mais le tout-suspendu et le semi-rigide de chez Pinarello ont tout de même des personnalités assez différentes. Alors que le full est à classer dans les modèles très exclusifs, le hardtail se situe davantage dans la tranche tolérante et confortable de sa catégorie. Le travail sur le triangle arrière asymétrique n’est pas juste là pour le style, et c’est tant mieux ! Si on roule sur des parcours où la suspension arrière est superflue ou si on préfère la légèreté du semi-rigide, le Pinarello Dogma XC HT n’est pas réservé au seul usage des pros et pourra être un choix très intéressant pour qui veut un vélo de caractère mais pas caractériel. Seul le prix, au final, reste très exclusif…

Envie d’un regard différent sur cet essai ? Regardez le test vidéo !

Plus d’infos : https://pinarello.com/europe/en/bikes/mtb/competition/dogma-xc

ParOlivier Béart