Test | Orbea Alma M Team 2021 : haut en couleurs !

Par Olivier Béart -

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Test | Orbea Alma M Team 2021 : haut en couleurs !

Dans la foulée du Oiz qui se dote d’une nouvelle version encore plus légère, l’Orbea Alma fait peau neuve avec pour ambition de marquer sa différence avec des fulls de XC de plus en plus performants. Comment se positionne réellement cette nouvelle machine ? Et surtout comment se comporte-t-elle sur le terrain ? Réponse avec notre essai :

Cet été, à l’occasion du remaniement de son offre XC (l’Oiz a également profité de quelques évolutions), Orbea présentait un tout nouvel Alma, repensé de fond en comble afin de lui permettre de rester d’actualité, alors que les tout-suspendus sont de plus en plus performants et ont de plus en plus souvent la préférence des compétiteurs.

L’Alma, c’est un des vélos marquants de l’histoire du XC : la première version a été présentée en 2005 ! Le vélo a traversé les âges et en 15 ans, de nombreuses choses ont changé dans le VTT. De même que les XC ne sont aujourd’hui plus des 26 pouces en transmission 3×10 et que les freins à disques ne sont plus réservés aux modèles haut de gamme, les pratiques ont évolué.

Selon la marque espagnole, si l’on choisit aujourd’hui un semi-rigide plutôt qu’un tout-suspendu, c’est avant tout pour une question de performance : on est à la recherche de plus de réactivité ou de légèreté que ce que peut offrir un tout-suspendu. Pour ce nouvel Alma, l’objectif est donc de créer un châssis radical, dédié à la performance en compétition.

Châssis

Et en XC, qui dit performance dit grandes roues. Exit donc les roues de 27,5″ sur les tailles S et M, en 2021 l’Alma est proposé en roues de 29″ du S au XL. L’étape suivante, c’est le cadre. Celui de l’ancien Alma affichait 920 g en taille M, un poids encore tout à fait honnête aujourd’hui mais à l’heure où la concurrence joue avec la barre des 800 g, cela pouvait donner l’impression de faire partie du « deuxième rang ».

En réponse à cette problématique, Orbea a appliqué la même recette que sur l’Oiz : la marque a importé sur l’Alma la technologie OMX de mise en œuvre du carbone, développée à l’origine pour les modèles de route. VPar rapport au carbone OMR qui constituait jusque là le haut de gamme en VTT, l’OMX affine encore les superpositions de matière et le travail sur la résine pour gagner du poids sans affecter les autres qualités du cadre (dynamisme, flexibilité, filtration des vibrations…). Sur l’Alma, cela permet d’amener le cadre à 830 g en taille M, soit 90 g de gagnés. Le chiffre peut paraître faible, mais c’est tout de même 10 % du poids total…

Côté formes, le cadre évolue en suivant la tendance initiée par l’ancien modèle : les lignes s’affinent, les tubes se simplifient et les angles s’arrondissent. La différence de philosophie entre le haut du cadre (tube supérieur et haubans) et le bas (bases, tube diagonal et douille de direction) est bien visible : les premiers disposent de tubes fins pour apporter un peu de souplesse et de confort tandis que les seconds utilisent des sections massives pour transmettre le plus efficacement possible les efforts du pilote. Le positionnement des fibres de carbone est également adapté.

Les éléments qui font l’identité de l’Alma restent toutefois bien présents, comme la cassure du tube supérieur avant le tube de selle. Baptisée 4X4 Design, cette solution a pour but d’amener un peu de confort en permettant une plus grande flexion au niveau du tube de selle. Ce dernier est par ailleurs prévu pour des tiges de selle en 27,2 mm, dans ce même objectif de flexion et de confort (une notion toute relative, on reste sur une machine de course).

La quête du poids a également dicté le choix de certaines interfaces et standards, comme le montage Flatmount pour l’étrier arrière ou le format type E pour le (minimaliste) guide-chaîne. Ceci dit, ces interfaces offrent aussi certains avantages fonctionnels : le Flatmount permet de se passer de filetage dans le cadre (c’est l’étrier qui l’accueille directement), ce qui améliore la fiabilité, tandis que le type E est plus simple à concevoir qu’un support ISCG 05, en plus d’être très facile à monter ou démonter.

Orbea n’a toutefois pas complètement sacrifié le côté pratique sur l’autel de la légèreté, puisque la marque a par exemple décidé de conserver des passages internes entièrement guidés pour faciliter les opérations de maintenance, ou un protège-base en relief pour réduire les bruits de chaîne.

Enfin, sur le plan esthétique le programme MyO (pour My Orbea) de personnalisation évolue lui aussi. De nouvelles options font leur apparition (les motifs Marble – comme sur ce modèle de test, Terrazo et Geometric Camouflage ainsi que la peinture Matte / Gloss) et il est désormais possible de modifier la douille de direction indépendamment du reste du cadre, avec un motif ou une couleur qui sera repris sur la jonction base-hauban. Au-delà de l’apparence, on constate que la finition est aujourd’hui vraiment à la hauteur de la promesse et la qualité de la peinture paraît excellente, ce qui n’a pas toujours été le cas sur les vélos du programme MyO.

Géométrie

Comme de nombreux vélos de XC, l’Alma avait été renouvelé pour la dernière fois en 2016, de façon à être utilisable par les pilotes de la marque sur les Jeux Olympiques puis disponible pour le public en 2017. 4 ans, cela commence à faire long dans la vie d’un vélo, et encore plus ces dernières années vu la vitesse à laquelle les géométries ont évolué. Sans surprise, le nouvel Alma évolue donc en profondeur de ce côté.

L’angle de direction perd ainsi 1,5° pour atteindre 68°, tandis que le reach gagne 13 à 19 mm selon les tailles. Au final, le vélo s’allonge ainsi de 2,5 à 3 cm sans que la marque n’ait touché à la longueur des bases, qui restent à 430 mm. L’objectif de ces changements est clair, il s’agit de mettre le pilote en confiance en descente pour limiter la casse face aux tout-suspendus, qui partent avec un avantage certain dans ce domaine grâce à leur suspension arrière offrant plus de confort, plus d’adhérence et plus de marge d’erreur.

Ces évolutions ont cependant peu d’influence sur la position du pilote au pédalage, puisque Orbea a redressé le tube supérieur de 1° (74,5°) de façon à limiter l’allongement du tube supérieur : + 2 à 7 mm seulement.

Equipements

Côté suspension, on a ce qui se fait de mieux puisque l’Alma M Team est équipé d’une Fox 32 StepCast Factory avec blocage au guidon, un élément obligatoire à ce niveau en XC. Pas d’Orbea Squidlock comme sur l’Oiz, on a ici droit à la bien connue manette Fox. Même si on voit de plus en plus la F34 SC en 120mm de débattement sur les fulls de XC, cette très légère F32 garde tout son sens sur un hardtail et il faudra déjà avoir un fameux gabarit pour en voir les limites côté rigidité.

La transmission est fournie pour l’essentiel par Shimano, avec un mélange de Deore XT (cassette, chaîne) et de XTR (shifter, dérailleur). La cassette XT n’est pas des plus légères, autour de 470 g en 10-51 soit 100 g de plus qu’une XTR mais elle coûte aussi 220 € de moins… Seul infidélité au fabricant nippon, le pédalier, qui permet aussi à Orbea de se « rattraper » sur la balance : la marque a choisi un splendide Race Face Next SL, affiché à seulement 428 g en 34 dents (le cadre accepte jusqu’à 36 dents). 90 g plus léger qu’un XTR et 200 g en dessous d’un Deore XT ! Race Face l’annonçait d’ailleurs à sa sortie il y a quelques années comme le pédalier produit en série le plus léger du monde. Et le tout fonctionne parfaitement ensemble !

Retour sur Shimano pour les freins avec une valeur sûre, des Deore XT M8100 (2 pistons) avec disque en 180 mm devant et en 160 mm derrière. Un levier agréable, une puissance suffisante et un comportement équilibré font de ces freins une référence dans le segment des freins à 2 pistons, même si ce ne sont pas les plus légers.

Le train roulant est composé de roues DT Swiss XRC 1501 en 30 mm de largeur interne. Il s’agit ici d’une option spéciale sur notre modèle, équipé des roues du modèle LTD, alors que le M Team est normalement monté avec des DT XR 1650 à jantes de 25 mm. Mais c’est l’occasion de vous parler de cette nouvelle tendance des jantes larges en XC. Elles sont associées ici à des pneus Maxxis Rekon Race en carcasse 120 tpi EXO mais surtout 2.35 de section. Arrivées en 2020 dans la gamme DT Swiss, les XRC 1501 sont en carbone et remplacent les très populaires XM 1501, des roues en aluminium plutôt haut de gamme plébiscitées par les pratiquants de XC/trail.

La largeur importante du montage, aussi bien pour les jantes que les pneus,  peut surprendre car ce sont des valeurs qu’on est plutôt habitué à voir sur des vélos de trail/AM. Cependant, des pneus en 2,35″ sur des jantes larges ont aussi du sens sur un XC, en particulier sur un semi-rigide.

En effet, le ballon important du pneu permet d’apporter un peu plus de confort et d’adhérence, deux éléments toujours appréciables sur un vélo qui n’a pas de suspension arrière. De plus, la résistance au roulement est censée être meilleure avec des pneus larges (à condition d’être montés sur des jantes adaptées) grâce à une empreinte au sol un peu plus large mais surtout bien plus courte qu’avec des pneus étroits.

On sacrifie bien sûr quelques (dizaines de) grammes par rapport à un montage avec des jantes en 25 mm et des pneus en 2.2/2.25, mais si la résistance au roulement est meilleure, il n’est pas dit que ce montage large soit perdant au final. On notera par ailleurs qu’on retrouve exactement le même train roulant sur l’Orbea Oiz M Team, dont nous avions publié l’essai il y a quelques mois (à lire ici), et que nous n’avions pas eu à ce moment de critiques particulières à formuler à son encontre. Notre avis sera-t-il différent sur un semi-rigide ?

Comme tous les Alma, notre M Team est équipé de série avec une tige de selle rigide siglée OC (pour Orbea Components), en carbone à ce niveau de gamme, mais si vous souhaitez une tige de selle télescopique pas de problème : Orbea propose en option (+ 99 €) un modèle en 80 mm de débattement. Une bonne chose, car les tiges de selles télescopique en 27,2 mm de diamètre ne sont pas toujours faciles à trouver dans le commerce. D’ailleurs, nous vous conseillons fortement ce choix, car la tige télescopique est un vrai plus sur un hardtail, dont l’arrière n’a aucune suspension pour s’enfoncer légèrement en descente et coucher les angles. Pouvoir se placer bien sur l’arrière est donc très important.

Le poste de pilotage est également signé Orbea, un cintre plat en carbone en 760 mm de large monté sur une superbe potence en 75 mm au look très épuré. Finalement, la selle est le seul périphérique à ne pas être conçu par la marque espagnole : il s’agit de la bien connue Selle Italia SLR, ici en version à rails titane.

Enfin, on remarquera que le jeu de direction est un modèle de la série BlockLock d’Acros, c’est-à-dire qu’il est doté de butées qui empêchent les rotations trop importantes du cintres. En cas de chute, cela permet d’éviter que les commandes viennent taper le tube supérieur. Plus besoin de bricoler une protection avec une vieille chambre à air ou un morceau de mousse !

Au final, sur notre balance, ce nouvel Orbea Alma M Team affiche 9,34kg. Un excellent score, mais pas non plus un record absolu, puisque certains concurrents passent sous la barre des 9kg. Cela dit, la course au poids le plus léger n’est pas toujours bénéfique…

Versions et tarifs

La gamme Orbea Alma est plutôt fournie puisqu’elle compte pas moins de 11 vélos complets, ainsi qu’un kit cadre à deux variantes. En revanche, seulement 4 de ces modèles disposent du cadre OMX et de la personnalisation de peinture MyO : le kit cadre, disponible à partir de 2 499 €, le M Pro affiché à 3 399 €, notre M Team à 4 999 € et le M LTD, qui a la particularité d’être monté avec une fourche… rigide, malgré son tarif de 7 499 € (une Fox 32 SC reste disponible en option). Un montage très exclusif, qui doit battre des records en termes de poids pour un VTT de série. Impossible toutefois de savoir jusqu’où cela descend, puisque Orbea n’annonce pas officiellement les poids de ses vélos.

Construits autour d’un cadre en carbone OMR, 90 g plus lourd, les Alma M50, M30/M30 Eagle et M25 sont aussi bien plus accessibles que leurs grands frères puisque leurs tarifs s’échelonnent de 1 699 € à 2 699 €. La géométrie est en revanche exactement la même et on rappellera que jusqu’en 2019, c’était cette construction OMR qu’on retrouvait jusque sur les versions haut de gamme. Ces modèles sont donc loin d’être dépassés.

Enfin, 4 modèles avec cadre en aluminium complètent la gamme, avec un prix d’appel sous les 1000 € : les Alma H50 (899 €), Alma H30 (999 €), Alma H20 (1199 €) et Alma H10 Eagle (1 299 €). On notera que leur géométrie diffère légèrement de celle des modèles en carbone, avec des bases plus longues de 5 mm, une douille de direction plus longue de 10 mm et un stack plus haut de 9 à 10 mm, de quoi donner au final une position un peu plus confortable et un caractère un peu moins vif au vélo.

L’Orbea Alma M-Team sur le terrain

Avec son nouvel Alma, Orbea annonce clairement la couleur : la performance et le rendement avant tout. L’idée est de re-creuser l’écart avec les fulls et de donner une nouvelle raison d’être aux semi-rigides. On ne va pas tourner autour du pot : côté répondant au coup de pédale, le nouvel Alma en impose d’emblée. Il n’y a pas de temps mort à l’allumage, il répond tout de suite présent et accélère comme un dragster sur les surfaces lisses ou même modérément cabossées.

On sent le châssis justement dosé au niveau de la rigidité du boîtier et de la partie basse du cadre, histoire de se déformer juste ce qu’il faut pour bien faire passer la puissance au sol et  éviter les pertes d’adhérences inhérentes à un cadre trop verrouillé qui va « sautiller » à la moindre irrégularité dans le pédalage du pilote ou sur le sol. A ce niveau, les jantes larges et les pneus de forte section aident bien aussi, en prenant le relais côté grip quand le cadre arrive à ses limites. Dans l’ensemble, même si ce type de train roulant peut montrer ses limites dans certains circonstances (nous en parlerons plus loin), cette tendance à l’élargissement nous semble pertinente sur un hardtail comme celui-ci.

Sur les longues sorties par contre, pas de miracle : malgré son diamètre de 27,2mm, la tige de selle ne se déforme pas beaucoup et si le cadre et les pneus absorbent bien les petites vibrations, on sent tout de même que cet Alma joue davantage dans la catégorie F1 pointue et exigeante que du côté rallye-raid qui pardonne les erreurs et ménage son pilote. Clairement, il faut être en bonne forme physique pour réellement tirer le meilleur de cet Alma et être capable de lui donner pendant plusieurs heures les Watts nécessaires à exprimer son plein potentiel. Au-delà de 2h, il peut se montrer usant et les amateurs de longues distances se tourneront plus avantageusement vers le Oiz. Et certains de ses concurrents directs (on pense notamment au BH Ultimate Evo, ou encore au Specialized Epic HT) jouent aussi clairement plus la carte du confort et de la tolérance que cet Alma.

Sur un circuit de XC fait de montées raides et courtes mais pas trop cassant, il est par contre impérial et le grip de la roue arrière ainsi que la position qu’il offre incitent à en remettre toujours une couche. Sa légèreté fait mouche et il procure des sensations absolument grisantes qu’un full, certes plus efficace dans le technique, aura bien du mal à procurer. Là, il trouve toute sa justification. D’autant que sa géométrie, ainsi que sa fourche très efficace aident à se lâcher dans les petite dégringolades, y compris très raides. Seule la tige de selle télescopique nous a manqués dans ces moments, histoire d’être encore plus à l’aise. Mais comme dit plus haut, elle est disponible en option et elle ne fera pas perdre vraiment en confort puisque la tige de selle fixe montée d’origine n’est pas très flexible malgré son diamètre de 27,2mm et sa composition en fibres de carbone.

Par contre, quand on l’emmène dans des descentes plus longues, même s’il met une fois de plus en confiance grâce à son excellente géométrie qui marque une belle évolution par rapport à la génération précédente, et qui le replace parmi les références du segment, il peut se montrer usant à la longue, et seuls des pilotes en bonne forme physique parviendront à lui tenir la bride correctement et à rester maîtres de la situation. Il faut pouvoir jouer des jambes pour amortir les impacts et rester pleinement attentif pour bien placer les roues.

A ce niveau, les pneus larges facilitent les choses quand c’est sec, poussiéreux et rocailleux, ainsi que quand c’est légèrement humide sur une surface dure ; ils montrent leurs limites dès que cela devient boueux. Avec des boudins aussi larges, on a rapidement tendance à « surfer » en restant à la surface de la couche boueuse, sans pouvoir aller chercher le grip en dessous. Actuellement, peu de profils XC sont disponibles en 2.3/2.4 et une autre monte nous amènerait peut-être à revoir notre jugement. Mais en l’état, c’est ce que nous avons ressenti avec les Maxxis Rekon Race montés sur l’Alma. Et on vous recommande de redescendre plutôt vers du 2.25 plus cramponné pour les mois d’hiver si le sol est plutôt meuble dans votre région.

Verdict

Performant, ah ça oui, il l’est ce nouvel Alma ! La différence avec le Oiz est très claire et, par là, il se fait plus exclusif. C’est revendiqué et on aime les vélos qui ont un vrai parti pris. Cela dit, c’est le genre de vélo de caractère qui ne conviendra pas à tous et « monsieur tout le monde » ne parviendra pas nécessairement à tirer le meilleur de ce type de machine. A acheter en connaissance de cause, donc, surtout sur cette version haut de gamme OMX. Quant aux jantes en 30mm de large et aux gros pneus, le concept est intéressant et pertinent pour un usage très orienté « race » sur des terrains cassants (comme en coupe du monde) mais on perd tout de même en polyvalence car des pneus très larges et faiblement cramponnés peuvent vite être déstabilisants sur sols meubles. A ce niveau, des jantes de 25mm de largeur comme sur le modèle de série, avec pneus en 2.25, nous semble un excellent compromis. 

Plus d’informations : orbea.com

ParOlivier Béart