Test nouveauté | Scott Patron eRide : jeu de cache-cache
Par Léo Kervran -
On n’attendait pas Scott sur ce terrain mais la marque Suisse sait encore surprendre : il y a presque trois mois, elle lançait le Patron eRide, un VTTAE avec amortisseur intégré dans le cadre comme sur le « petit » Spark. Avec cela, des roues de 29″ et 160 mm de débattement mais un positionnement « trail » comme le Genius eRide, plutôt que « enduro » comme le Ransom eRide. Nous avons enfin pu le découvrir sur le terrain la semaine dernière en Espagne, en compagnie des ingénieurs et designers qui ont pu répondre à toutes nos questions :
A l’origine de ce Patron, une question ou plutôt un problème : comment faire rentrer le nouveau Smart System de Bosch et sa batterie en 750 Wh dans le Genius eRide, la plateforme trail de la gamme e-bike de Scott ?
Comme nous l’illustre Fred Rul, responsable du design pour la marque suisse, cette nouvelle batterie est 7 cm plus longue que le modèle en 625 Wh qui représentait jusqu’il y a peu le haut de gamme de Bosch. 7 cm de trop pour le Genius eRide : avec ces dimensions, impossible de faire rentrer la batterie sur les tailles S et M sans déséquilibrer complètement le centre de gravité.
Il faut donc descendre la batterie mais cette fois, c’est le moteur qui bloque. Ce dernier ne peut pas être déplacé puisqu’il est relié au pédalier. La solution ? Tourner le moteur sur son axe (de 46° précisément) et le positionner en diagonale. Désormais, plus de problème de cohabitation avec la grande batterie en 750 Wh, y compris sur les petites tailles !
En revanche, la situation de l’amortisseur ne convenait plus, il rentrait en conflit avec le moteur. Plutôt que de le remonter de quelques centimètres et de sacrifier la hauteur d’enjambement, les équipes de design et d’ingénierie ont décidé de changer complètement son orientation : le voici désormais placé à l’horizontale sous le tube horizontal, comme sur les premiers Spark ou la deuxième génération de Genius.
Habituellement, souligne Fred Rul, on essaye de trouver un emplacement proche du boîtier de pédalier pour l’amortisseur afin de baisser le centre de gravité de la machine, surtout sur des vélos au débattement important. Cependant, il ne faut pas oublier que nous sommes sur un e-bike : entre une batterie à 4,4 kg et un amortisseur à 400 g, le choix est vite fait.
Voici la base de travail : un moteur tourné différemment, une batterie plus basse et un amortisseur qui a changé de secteur vis-à-vis de l’actuel (au moment du développement) Genius eRide. Andreas Ziegler, le chef produit de la division VTT AE, nous explique alors que ce développement coïncide avec le rachat par Scott de Bold et des brevets associés.
On sait désormais que cette collaboration a profité au Spark (lire Présentation | Scott Spark 2022 : le génie de l’intégration), mais pourquoi ne pas essayer aussi d’appliquer cette intégration un e-bike ? Et tant qu’à faire, autant lui trouver un nouveau nom pour marquer le coup et surtout simplifier les choses, de façon à éviter les confusions dans les discussions (quand on parle de Genius, il faut comprendre Genius classique ou Genius eRide ?).
Voilà comment on se retrouve aujourd’hui avec ce Scott Patron eRide, un e-bike de trail en 29″ et 160 mm de débattement appelé à remplacer le Genius eRide, même si celui-ci reste encore au catalogue cette année. Andreas nous confie au passage que cette nouvelle nomenclature, avec des noms différents pour les VTT AE et les vélos classiques, va s’étendre au reste de la gamme au fil des renouvellements. On ne va pas s’en plaindre !
D’une certaine façon, le Patron inaugure également la 4e génération d’e-bike chez Scott, 6 ans après le lancement de la première : les débuts en 2016 puis la batterie intégrée en 2018, un nouveau moteur avec la batterie 625 Wh en 2020 et enfin, pour 2022, la batterie 750 Wh avec une toute nouvelle architecture.
On notera enfin qu’il s’agit du premier VTT AE conçu « à partir d’une feuille blanche », c’est-à-dire qu’il n’est pas dérivé d’un modèle sans assistance. Entre guillemets, car on peut tout de même établir un certain lien entre ce Patron et le Genius eRide, qui a lui été conçu d’après le Genius classique.
Moteur, batterie et commande
Le cadre du Patron peut être en carbone, aluminium ou les deux suivant le niveau de gamme du modèle. Le poids varie de manière importante (de 2 970 g en tout carbone à 4 460 g en tout aluminium) mais Scott a réussi l’exploit de conserver les lignes du carbone sur les modèles en aluminium. La marque a parfois du faire appel à des solutions créative, comme ce tube supérieur qui plonge vers le moteur au lieu d’aller tout droit. Une tôle pliée vient ensuite remplir la jonction en triangle avec la partie haute du tube de selle.
Si l’intégration de l’amortisseur arrière attire immédiatement (on reviendra dessus plus loin), c’est une autre partie du cadre que la marque met d’abord en avant : le berceau moteur. Au lieu d’être « tenu » par le haut comme c’est le cas le plus souvent, le Bosch Performance CX est ici « posé » dans une coque qui le soutient par en dessous.
Un choix technique qui a d’importantes répercussions sur le poids puisque ce nouveau berceau, bien qu’il soit beaucoup plus grand que celui du Genius eRide, se montre beaucoup plus léger. Nous n’avons pas pu peser les deux pièces mais nous avons pu les tenir dans nos mains et la différence est flagrante.
Brevetée, cette construction permet donc de réduire le poids tout en augmentant la rigidité dans cette zone critique. Par ailleurs, en libérant de la place au niveau du tube de selle, elle ouvre la porte à l’adoption de bases courtes qui pourront rendre le vélo plus vif.
Autre caractéristique importante de cette zone, la construction en « cheminée ». Comme il n’y a rien au-dessus du moteur, l’air chaud (moins dense que l’air froid donc plus léger pour un même volume) peut facilement et naturellement s’évacuer vers le haut. Le cache placé à cet endroit ne sert qu’un but esthétique, pour harmoniser les lignes du vélo, et a été dessiné de manière à ne pas entraver la circulation de l’air.
Le mécanisme pour retirer la batterie a également changé : elle ne s’enlève plus par la face inférieure du tube diagonal comme sur le Genius eRide mais coulisse par une trappe située en bas de ce même tube. De la même façon que la construction en berceau pour le moteur, cela améliore de façon sensible la rigidité des pièces concernées. Sur le tube diagonal, Scott en a ainsi profité pour gagner du poids en réduisant l’épaisseur des parois de 2,5 à 1,3 mm.
Que ce soit pour ouvrir la trappe d’accès ou libérer la batterie, aucun outil ou clé n’est nécessaire. Scott a fait ce choix par souci de simplicité, arguant que la manipulation pour déverrouiller la batterie n’est pas intuitive et que cela suffit à la protéger (du reste, pourquoi voler une batterie quand on peut voler un vélo complet ?). Cette manipulation serait facile à faire (nous n’avons pas eu l’occasion d’essayer) mais doit être connue. Toutefois, le montage avec une serrure à clé reste disponible en option.
A l’avant, on retrouve la nouvelle commande LED Remote combinée à l’écran Kiox 300, nouveau lui aussi. Toujours dans son souci d’intégration, Scott a intégré le support de ce dernier au capot de potence. Pas forcément très pratique à l’atelier mais très joli.
Nettement mieux réussie visuellement que l’ancienne commande déportée Kiox, la LED Remote l’est aussi sur le plan fonctionnel. Elle peut ainsi coulisser sur son support pour être positionnée exactement où on le souhaite, une belle avancée par rapport aux précédents modèles. Bosch l’a pensée comme le centre névralgique pour contrôler l’assistance et on peut même l’utiliser seule, sans l’écran Kiox 300. La griffe sur le côté indique alors, par sa couleur, le mode en cours tandis que les cinq Leds superposées avertissent du niveau de batterie restant.
Cinq Leds seulement mais un suivi à 10 % près grâce à un système bien pensé : la couleur bleue indique un palier de 20 % et le blanc un palier de 10 %. Ainsi, si on a 3 Leds bleues et une blanche, cela signifie qu’il reste entre 70 et 80 % de batterie. Simple mais diablement efficace ! En fin de batterie, Les Leds passent en orange lorsqu’on descend sous les 30 % puis au rouge quand il ne reste plus que 10 %.
La suspension
L’autre élément clé de ce Scott Patron eRide, c’est sa suspension arrière, de 160 mm de débattement. Si l’architecture est somme toute classique, un 4 bar linkage type Horst Link (voir notre lexique pour plus d’explications), la forme qu’elle prend ici est inédite puisque l’amortisseur est entièrement intégré dans le cadre.
Comme sur le Spark, cela fonctionne grâce à une biellette un peu particulière. En effet, celle que l’on peut voir à l’extérieur du vélo n’est pas directement en prise sur l’amortisseur : elle entraîne d’abord une autre pièce, cachée à l’intérieur du cadre et qui vient elle pousser sur le plongeur.
Cette biellette intérieure est la pièce clé du système car elle doit faire face à de nombreuses contraintes : d’une part, le couple énorme qui s’applique sur sa jonction avec la biellette extérieure (elle doit résister à 700 Nm) et d’autre part, la place réduite qui empêche l’amortisseur de monter vers le haut au cours de la compression comme il le ferait naturellement dans cette configuration.
Enfin, elle est difficile d’accès. Pour vérifier le serrage de la vis qui la relie à l’amortisseur, il faudrait ainsi démonter entièrement ce dernier : pas très pratique. Heureusement, Scott a prévu le coup et conçu la biellette avec une vis qui vient pincer la vis d’amortisseur et ainsi l’empêcher de se desserrer. C’est exactement le même mécanisme que sur une fourche à axe flottant par exemple.
On notera que la précontrainte des roulements de la biellette extérieure est réglable grâce à un petit écrou, sécurisé lui aussi par une vis de verrouillage. Pour l’anecdote, l’outil (fourni avec le vélo) qui permet de tourner l’écrou fait également office de décapsuleur…
Pour accéder à l’amortisseur et faire ses réglages (pression, rebond), il suffit de retirer un cache situé sous le tube supérieur. Le verrou doit être tourné de 180°, une manœuvre pas toujours facile à réaliser avec des gants et Scott conseille ainsi d’utiliser le bouchon d’air de la fourche comme levier, en le glissant dans la petite fente du verrou.
Côté courbes et valeurs, cela donne une progressivité plutôt faible sur le papier (seulement 17 %) avec un ratio qui descend de 2,95 à environ 2,43 et un anti-squat presque élevé pour un e-bike puisqu’il est juste supérieur à 100 % au sag. On voit assez souvent des constructeurs descendre plus bas pour aller chercher de la sensibilité et du grip, avec l’argument que lutter contre le pompage est moins important puisqu’il y a le moteur, mais Scott a pris la direction opposée.
Selon Victor Valls, responsable de l’ingénierie pour la division e-bike, les forces de pédalage sont naturellement plus importante sur un e-bike du fait de la présence du moteur et pour garder un vélo qui se comporte bien, il faut donc un anti-squat assez haut. Se préoccuper des performances au pédalage sur un e-bike, on reconnaît bien là la marque suisse !
D’ailleurs, ce n’est pas tout puisque les suspensions sont en plus commandées au guidon par le Twinloc. Chez Scott, ce double blocage des suspensions est une institution, présent sur tous les vélos à l’exception des Gambler de DH et du Ransom eRide, le VTT AE enduro / freeride. Sur le Patron eRide, le passage en mode « montée » permet, outre de réduire le débattement à 120 mm, de remonter le boîtier de pédalier de 7 mm et de redresser le tube de selle de 0,7°.
Selon la marque, cela peut notamment s’avérer utile dans les sections un peu chaotiques et les pilotes peu expérimentés, pour leur éviter de toucher trop souvent les manivelles contre des obstacles.
Géométrie
Pas de folies pour la géométrie, malgré son architecture originale le Patron eRide reste un Scott et doit de ce fait convenir au plus grand nombre. Le vélo étant positionné sur le segment « trail » comme le Genius eRide, on retrouve en premier lieu un angle de direction similaire (64,5° en S, 65° sur les autres tailles).
Scott s’est ensuite attaché à moderniser le reste des cotes pour rendre le vélo un peu plus agréable et proche d’un trail / all-mountain classique, tout en restant très accessible pour les néophytes. L’angle du tube de selle gagne ainsi 1,6 à 2° (77° en S, 76,8° en XL) pour une meilleure position en montée, les bases se raccourcissent pour atteindre 454 mm (- 11 mm) et le reach augmente légèrement, il est désormais de 446 mm en M et 474 mm en L.
Enfin, le boîtier de pédalier remonte de 9 mm, ce qui devrait à la fois rendre le Patron plus vivant que le Genius eRide et réduire les risques de toucher des obstacles avec les manivelles ou les pédales.
Accessoires
Comme sur le Spark, le poste de pilotage intègre les entrées de gaines, qui cheminent ensuite dans le tube diagonal entre la batterie et la paroi du tube. Selon Scott, les trajets ont été étudiés pour que l’entretien soit facile à réaliser, même si cela devra être confirmé en atelier.
Au sujet des accessoires, on remarque un petit garde-boue arrière qui intègre deux Leds, une de chaque côté. Conçu en partenariat avec Lezyne, il est amovible pour celles et ceux qui n’apprécieraient pas son allure. Les lampes sont connectées à la batterie du vélo et contrôlées au cintre via la commande Bosch.
Il est également possible de monter une lampe à l’avant sous le cintre (deux options de montage suivant le cintre, en carbone et en une pièce ou format classique), le câble de connexion à la batterie est pré-installé et soigneusement rangé dans le cadre en attendant d’être utilisé.
La gamme Scott Patron eRide se compose de 7 modèles en tout, dont deux Contessa dédiés au public féminin (selle, poste de pilotage et coloris différents). On notera à ce sujet que malgré son nom, le Contessa Patron eRide 910 dispose des mêmes composants que le Patron eRide 920 et non que le Patron eRide 910. En revanche, le Contessa Patron 900 est bien identique au Patron 900.
Les tarifs vont de 6 299 € pour les Contessa Patron eRide 910 et Patron eRide 920 (26,5 kg) à 11 999 € pour le Patron eRide 900 Ultimate (23,7 kg).
Le Scott Patron eRide sur le terrain
Une fois n’est pas coutume, il pleut à Santa Coloma de Farners. Il pleuvra même tout le temps que durera cette présentation, un évènement exceptionnel pour nos confrères espagnols habitués du lieu qui nous assurent qu’ici, il ne pleut jamais plus d’une journée en tant normal.
Ceci dit, c’est presque le temps idéal pour tester ce Patron eRide. D’abord parce que le terrain, très fuyant, offre un meilleur grip trempé que sec, et ensuite parce que l’amortisseur est bien à l’abri dans le cadre, protégé des projections très abrasives qui s’infiltrent partout.
Le vélo mis à notre disposition est un Patron eRide 900 Tuned, le deuxième modèle le plus haut de gamme proposé au catalogue. Avec son tarif de 8 999 €, il profite logiquement d’un équipement de premier plan même si certains choix peuvent surprendre (on reviendra dessus plus loin) : fourche Fox 38 Factory Fit4, amortisseur Fox Nude T eRide Evol spécifique au Patron, dérailleur Sram X01 Eagle avec manette GX Eagle « single-click » , freins Shimano Deore XT 4 pistons en disques de 203 mm, roues Syncros Revelstoke-E 1.5 CL et pneus Maxxis Dissector 29×2.6 en carcasse Exo+ et gomme MaxxTerra.
Une fois les réglages faits, on prend la direction des sentiers et le Patron se distingue très vite par ses capacités en montée. On ne va pas y aller par quatre chemins, dans le raide c’est tout simplement le meilleur grimpeur parmi tous les e-bikes que nous avons essayés jusque-là.
C’est d’ailleurs surprenant car avec la suspension réglée entre 25 et 30 % de sag comme préconisé, on n’a pas la sensation que la roue arrière reste en permanence collée au sol et « avale » tous les obstacles en douceur comme on peut l’avoir sur certains vélos. Ici, le confort est dans la moyenne, sans plus.
On ne sait donc pas où Scott est allé chercher ce grip mais on ne peut que constater qu’il est bien là. Dans des franchissements extrêmement raides, le genre de chose qu’on aborde en pensant « mais pourquoi il nous font passer là, jamais ça ne passe en e-bike », le Patron est bluffant.
Il n’y a pas besoin de s’employer pour garder la roue avant au sol, le vélo ne cabre pas et derrière, la roue arrière trouve juste l’adhérence qu’il lui faut. Même chose sur les chemins plus irréguliers et défoncés, où l’on monte vite en tournant bien les jambes : le Patron dévie rarement de sa ligne et passe quoi qu’il arrive. On peut aussi s’amuser à partir sans élan devant une section technique, le Patron s’en sort encore. S’il faut mettre pied à terre, c’est à cause d’une erreur du pilote et pas d’une limite du vélo.
Et tout cela sans même utiliser le Twinloc ! Par la suite, on a tout de même essayé le mode intermédiaire et, s’il faut reconnaître que la position devient alors encore un peu plus agréable et sportive, cet outil reste selon nous superflu et nous avons vite arrêté de l’utiliser. Le Patron eRide monte déjà partout en mode ouvert, pourquoi s’embêter à gérer deux leviers de plus ?
D’autant qu’il y en a, des leviers et des boutons à gérer avec le pouce côté gauche du cintre. Twinloc, tige de selle télescopique, Bosch LED Remote, au total cela fait jusqu’à 8 actions différentes pour un seul doigt. Si on peut en éliminer deux, on ne va pas s’en priver.
De son côté, le couple avec le moteur Bosch Performance CX 4e génération est sans doute l’un des plus réussis qu’il nous ait été donné de voir. Ce moteur est connu pour être l’un des plus sportifs du marché, presque violent dans certaines situations mais sur ce Patron, Scott a su le dompter pour en tirer le meilleur. Sa puissance est idéale pour les capacités du vélo en montée et ses reprises siéent parfaitement au caractère dynamique du vélo.
D’ailleurs, un mot au sujet des nouveautés amenées par le Smart System : en plus de la commande, évolution appréciable vers plus d’ergonomie par rapport à l’ancienne Kiox, nous avons pu découvrir l’application Bosch eBike Flow. A l’image de celles développées par les concurrents, elle permet d’enregistrer ses sorties mais aussi de personnaliser certains modes du moteur, une première chez Bosch (les modes « automatiques », comme eMTB ou Tour+, ne sont pas réglables).
De nouvelles fonctionnalités devraient apparaître en cours d’année mais en attendant, nous l’avons trouvée particulièrement agréable. Les menus sont clairs, la navigation est simple et pour ne rien gâcher, l’interface est jolie.
En descente, le Patron se montre équilibré. Malgré le débattement important, le qualificatif « trail » convient bien au vélo. Il se place facilement, est tolérant et agréable à manier dans la plupart des circonstances. Il n’y a que dans les virages vraiment serrés qu’il faut le brusquer un peu mais ce n’est pas une surprise, cela reste un gros e-bike.
La géométrie équilibrée et le poids bien géré font qu’on prend vite ses marques et bientôt nous vient l’envie de hausser un peu le rythme, pour voir ce que le vélo a dans le ventre. Et comme on s’y attendait, on s’aperçoit vite qu’il n’est pas fait pour une pratique enduro malgré ses 160 mm et sa grosse fourche ou encore ses 65° d’angle de direction.
En effet, l’avant est un peu bas et pour compliquer les choses, la fourche plonge bien trop facilement dans le débattement. En plus de cela, le pneu avant manque de crampons de transition et la suspension arrière manque elle aussi de support, ce qui fait qu’on est trop souvent en fin de course. Sans être aussi handicapant que l’avant, ça tape un peu plus et c’est nettement moins confortable qu’à allure plus modérée.
C’est d’autant plus dommage que cela tient aux équipements. Le cadre en lui-même est très bon et mis à part le sujet de la courbe de suspension arrière, il aurait suffi de quelques choix différents au niveau des composants pour décupler les capacités du vélo en descente et agrandir son horizon vers l’enduro, sans rien enlever à ses qualités pour une pratique plus calme et plus « trail ».
En premier lieu, couper le pivot plus haut pour rajouter 10 à 15 mm d’entretoises sous la potence. Ensuite, monter un pneu avant un peu plus agressif, comme un Maxxis Assegai. Le Dissector s’est plutôt bien comporté sur notre terrain très particulier mais l’absence de crampons de transition impose de pencher sérieusement le vélo pour aller chercher les latéraux, quelque chose qui n’est pas forcément évident pour les pilotes moins expérimentés. Par ailleurs, nous l’avons senti complètement dépassé sur les quelques passages en terre (donc boue bien grasse) que nous avons rencontrés.
Toujours sans toucher au cadre, supprimer le Twinloc et en profiter pour remplacer la cartouche Fit4 par une Grip2 aurait considérablement amélioré les choses au niveau de la tenue du train avant. L’utilisation de la Fit4 est imposée par le choix de monter le Twinloc sur ce vélo mais comme dit plus haut, nous l’avons trouvé complètement superflu.
Or, la Fit4 est une cartouche adaptée aux faibles débattements, disons jusqu’à 130 mm maximum. Au-delà, elle plonge et se comporte encore moins bien que la cartouche Grip qu’on retrouve sur les fourches Fox les plus accessibles ! Pour garder une assiette acceptable, il faut la surgonfler mais on perd alors en grip de façon sensible. Pour rester en niveau de gamme Factory, la cartouche Grip2 apporterait bien plus de support sans que cela ne limite quoi que ce soit en pratique « trail ». Après tout, quand a-t-on besoin de bloquer sa fourche sur un e-bike ?
Qu’on ne se méprenne pas, nous avons bien aimé ce Patron, même en descente. Il est facile à prendre en main, agréable et bien équilibré. On regrette simplement que par ses choix, Scott le limite a une pratique trail et un pilotage relativement tranquille alors qu’il suffirait de peu de choses pour lui ouvrir bien plus de portes.
Avec son allure si particulière, le Scott Patron eRide attire l’attention et fait tourner les têtes. Sur le terrain toutefois, son comportement est dans la norme d’un vélo Scott, très accessible et capable de séduire le plus grand nombre. Redoutable grimpeur, descendeur polyvalent, il est l’allié idéal pour les belles sorties en montagne ou en terrain bien vallonné. En revanche, si d’autres machines Scott sont capables de séduire aussi bien les pilotes néophytes que les plus pointus, ce n’est pas le cas de ce Patron eRide. Par quelques choix, la marque suisse a limité les performances du vélo en descente pour les pilotes aguerris, donc sa polyvalence d’une certaine façon. Cela reste un très bon vélo dans son domaine d’utilisation, à recommander sans hésiter si cela correspond à votre pratique, mais il ne va pas aussi loin qu’il le pourrait et c’est un peu dommage.
Plus d’informations : scott-sports.com
Photos Daniel Geiger / Jochen Haar