Test nouveauté | Santa Cruz Tallboy 4 : petit débattement, gros caractère - Prise en main au Danemark
Par Léo Kervran -
Prise en main au Danemark
Lorsque Santa Cruz nous a invité à rejoindre l’aventure organisée par Jamie Nicoll au Danemark pour découvrir ce nouveau Tallboy, il faut bien avouer que nous nous sommes posé quelques questions. Bien que très présent sur la scène internationale en XC avec des pilotes comme Annika Langvad, Malene Degn, Simon Andreassen ou Jakob Fuglsang il y a quelques années, le pays n’apparaît pas souvent dans les listes des endroits à visiter absolument dans sa vie de vététiste.
Renseignement pris, il s’avère que le point culminant du Danemark (le Møllehøj) atteint tout juste 170 m d’altitude et que l’altitude moyenne du pays se situe autour des 30 mètres. Ayant plutôt l’habitude de rouler dans les Alpes, nous étions très curieux de découvrir à quoi pouvait ressembler la pratique du VTT dans un pays aussi plat.
Le rendez-vous est donc fixé à Slettestrand, un petit village situé au nord-ouest du pays, sur les rives de la mer du Nord. Ancien port de pêche, il s’est aujourd’hui principalement reconverti dans le tourisme.
Notre point de ralliement pour cette aventure sera le Ferieceter Slettestrand, un centre de vacances dirigé par la famille Kronborg. Plus qu’un simple hôtel, ce centre est construit sur une volonté d’ouverture et de partage. Toutes les infrastructures sont ainsi adaptées pour les personnes handicapées, que ce soit physiquement ou mentalement. Nous sommes accueillis par Mette, Esben et Kristian, qui seront nos guides sur les chemins.
Côté Santa Cruz, l’équipe est composée de Elena Münstermann, Max Schumann et Jamie Nicoll, à l’initiative de cette aventure. Ancien compétiteur en enduro (il a notamment fini 8e des EWS en 2013), il est désormais ambassadeur et aventurier pour la marque californienne. Ses derniers projets l’ont notamment emmené au-delà du cercle arctique en plein hiver, en Alaska, dans le Valais suisse sur les traces historiques des bergers… De son côté, Max Schumann est ambassadeur Santa Cruz et photographe. L’année dernière, il était notamment parti rouler en Corée du Nord en compagnie de Dan Milner, un reportage à retrouver dans notre Volume 2.
Avec lui, pas de présentation des vélos pendant une heure, on règle rapidement notre monture et on file découvrir les trails locaux. Passionnés de VTT, les Kronborg ont ouvert en 2007 au sein de leur centre MTB Slettestrand, un des tous premiers trail centers danois. Sentiers dédiés, cours de techniques et de shapping, atelier de réparation… Tout est fait pour optimiser le séjour des vététistes.
Les chemins commencent à quelques mètres de notre hébergement et on découvre avec surprise un véritable parc d’attraction pour petits vélos. On oscille entre 0 et 60 m d’altitude donc les descentes ne sont jamais très longues mais les montées sont tout aussi courtes et tout s’enchaîne très rapidement. Pour rouler vite, il faut sans cesse pédaler, pomper, sauter et relancer. C’est très joueur mais ça peut vite devenir très fatigant.
Dans cet environnement, on sent que le Tallboy a plus été pensé comme un gros vélo à peine assagi que comme un XC bodybuildé. Le poids relativement élevé pour un 120 mm (12,53 kg dans cette version CC XO1 RSV) et l’empattement long ne le rendent pas très vivant. Ce n’est pas un poids mort pour autant car il conserve très bien la vitesse une fois acquise mais il n’y a pas d’effet « boulet de canon » à chaque relance.
La suspension est assez linéaire et finalement assez difficile à régler pour ce type de terrain, où l’on alterne petits chocs répétés sur les racines et gros impacts sur les sauts. En jouant avec la pression des pneus, on arrive à trouver un compromis satisfaisant pour cette prise en main mais dans le cadre d’une utilisation régulière, ajouter quelques spacers dans l’amortisseur est une idée à considérer.
On remarque en revanche que la suspension pompe très peu, que ce soit assis ou en danseuse. Nous n’avons pour ainsi dire jamais utilisé le levier 3 positions de l’amortisseur Fox Float DPS, même pour les quelques liaisons sur route. C’est plutôt une bonne chose puisque ledit levier est de toute façon assez peu accessible, caché derrière le bidon.
Lorsque la pente s’inverse, l’impression de « Minitower » que nous avons eue en découvrant la fiche technique du vélo se confirme. Rien ne semble trop gros pour le vélo, très stable et confortable en toutes circonstances. On oublie très vite que nous n’avons « que » 120 mm de débattement derrière, tant la position et le comportement général invitent à piloter comme sur un enduro. Malgré cela, le vélo reste facile à prendre en main. La rigidité est bien dosée et il sait pardonner les erreurs.
On relève cependant un petit défaut, particulièrement sensible sur les étroits trails danois : à haute vitesse, le vélo a légèrement tendance à sous-virer. Ce ne sera pas rédhibitoire sur la plupart des sentiers mais ici, de nombreux virages sont en aveugles et referment à la sortie (sur du sable, pour compliquer encore les choses). A moins de connaître le terrain, il est impossible de les anticiper et dans ces cas-là, il est un peu difficile de garder le Tallboy sur la trace. C’est l’inconvénient du combo angle de direction couché + offset court, qui amène beaucoup de stabilité et de tolérance par ailleurs.
Après une quarantaine de kilomètres dans ce parc d’attraction ouvert à tous, il est temps de rejoindre notre base de départ, fatigués mais heureux. Pendant le repas, nous repérons de drôles d’engins à pédales, ce qui réveille aussitôt notre petite assemblée. Oui, nous avons fait du buggy-tandem avec Jamie Nicoll !
La journée se terminera finalement par un sauna et une baignade dans la mer du Nord, dans la plus pure tradition danoise…
Le lendemain, nous partons pour une sortie plus tranquille à la découverte de la campagne danoise. Pour l’occasion, nous passons le flipchip du Tallboy en position High. Si l’opération ne nécessite pas démonter la moitié du vélo, nous vous conseillons tout de même de le faire à la maison avant de partir plutôt que sur les chemins. Le flipchip n’est pas très accessible et lors du démontage, il est facile de faire tomber un cache-roulement.
N’ayant pas vu la feuille de géométrie avant de rouler le vélo, nous n’avions aucun a priori sur l’efficacité de ce changement de position. Heureusement d’ailleurs, car les variations sont vraiment minimes : +0,2° d’angle de direction, +0,3° d’angle de selle, + 3 mm de hauteur de boîtier de pédalier, +2 mm de reach… Sur le papier, rien qui ne va révolutionner le comportement du vélo.
Pourtant, sur le terrain, on sent bien quelques différences. On est légèrement plus sur l’avant du vélo, avec une position plus agressive au pédalage. Le vélo apparaît de ce fait un peu plus vivant, plus agréable sur les trails danois. En revanche, on a plus de mal à sentir de changement dans le comportement de la suspension.
En descente, on perd en tolérance ce qu’on gagne en maniabilité, notamment sur les sorties de virages évoquées plus tôt. Ces changements ne sont pas extrêmes, le Tallboy ne se transforme pas en XC très exclusif mais on se rapproche néanmoins un peu d’un caractère d’un vélo de trail plus classique.
On pourrait le comparer au nouveau Trek Fuel EX, sorti la semaine dernière. Là où le Trek est vraiment l’archétype du vélo all-moutain, très bon partout mais excellent nulle part, le Tallboy a un caractère bien plus tourné vers la descente, malgré ses 10 mm de débattement en moins. Très similaires au pédalage, le Santa Cruz Tallboy est plus facile à prendre en main, il tolère plus les erreurs sans demander un travail excessif au pilote. Le Trek est capable de rouler aussi vite mais sa rigidité importante demande un plus grand bagage technique et physique.
Plus tranquille que celle de la veille, cette journée est donc l’occasion de découvrir une nouvelle facette du Tallboy. Très bon lorsqu’il s’agit d’engager et de rouler vite, il se révèle aussi très agréable pour rouler tranquillement et explorer la campagne, comme nous l’avons fait en quête de notre repas du soir.
Avant de rentrer, nos guides nous emmènent découvrir une autre facette de la culture danoise avec la visite d’une distillerie locale, la Nordisk Brænderi, fondée par l’explorateur Anders Bilgram.
Ce voyage étant aussi l’occasion de découvrir le Danemark en tant que destination VTT, nos hôtes nous avaient préparé une soirée un peu particulière pour poursuivre notre découverte de la gastronomie locale. Une fois n’est pas coutume, c’est derrière les fourneaux que nous terminons notre journée. Accompagnés d’un chef pour nous guider et nous aider si nécessaire, nous préparons notre repas du soir en l’agrémentant des fruits de notre cueillette. Très populaire au Danemark, cette activité qui consiste à cuisiner soi-même en profitant des conseils d’un chef se développe de plus en plus dans nos contrées.
Le lendemain, nous repartons pour un dernier petit ride matinal avant de rentrer en France. Si l’objectif était surtout de refaire quelques photos du vélo et des trails, on ne peut pas s’empêcher de rallonger la boucle pour profiter une dernière fois de ces formidables chemins. Relativement confidentiel, le Danemark est une destination VTT qui mérite d’être plus connue, particulièrement pour des sorties orientées XC/trail. On ne peut que saluer le travail réalisé par nos hôtes à Slettestrand pour développer la pratique du VTT, de telle manière que tout le monde y trouve son compte.
Après ces 3 jours de test au Danemark, on commence à avoir un bon aperçu de ce nouveau Santa Cruz Tallboy. Redoutable en descente, surtout en mode Low, il reste facile à prendre en main et sait rouler tranquillement. De notre point de vue, il pourrait très bien être le vélo idéal pour quelqu’un qui roule toute l’année dans une région vallonnée comme la Belgique, les Ardennes, la Bretagne (en mode High) et qui part une ou deux fois par an en vacances à la montagne (en mode Low). Il a certes quelques défauts mais rien de rédhibitoire et cela dépendra aussi beaucoup du terrain sur lequel le vélo roule.
Plus d’informations : santacruzbicycles.com
Notre base de départ au Danemark, si vous souhaitez y poser vos roues : mtbslettestrand.dk
Pour suivre les aventures de Jamie Nicoll : jamienicolladventures.com
Photos : Max Schumann