Test nouveauté | Lapierre E-Zesty AM : enfin une référence ?

Si Specialized essaye de temps à autre de s’approprier l’histoire et de transformer le récit pour faire de son Levo SL le précurseur de la vague de VTT à assistance électrique légère qui déferle aujourd’hui sur le marché, la marque américaine est en réalité loin d’être la première à s’être lancée dans cette direction. Avant, bien avant même il y a eu… Lapierre ! Dès l’Eurobike 2018, en plein milieu de l’été, la marque de Dijon présentait le E-Zesty, une machine de 150 mm de débattement dotée d’une assistance Fazua Ride 50 pour un peu moins de 19 kg.

Nous avions pu le tester (lire Test | Lapierre Zesty & E-Zesty : naturel ou boosté, un cocktail toujours acidulé !) dans les mois qui ont suivi et nous avions découvert un concept prometteur, avec un châssis réussi mais encore du travail au niveau de l’assistance. Aujourd’hui, le E-Zesty revient sous un tout nouveau jour avec la promesse de redevenir la référence sur le segment de l’assistance légère tout en gardant l’ADN de son prédécesseur.

Cet ADN tient avant tout à trois choses : une ligne, celle du Zesty, un segment, l’all-mountain, et une motorisation, Fazua. Avec une petite nuance sur ce dernier point puisque le fournisseur allemand a dévoilé l’année dernière le système Ride 60, successeur et remplaçant du Ride 50 qui équipait le premier E-Zesty.

Si vous voulez tout savoir au sujet de ce Fazua Ride 60 on vous invite à lire l’article que nous lui avons consacré récemment (Test | Fazua Ride 60 : l’empire du milieu). Pour le résumer rapidement, retenez que le système complet pèse 4,26 kg avec une batterie de 430 Wh (non amovible, pour optimiser le poids et la rigidité du cadre), un moteur capable de développer 60 Nm et 3 modes d’assistance. C’est 350 g de moins et 180 Wh (72 %) de plus que le Ride 50.

Côté suspension, ce nouveau Lapierre E-Zesty perd 10 mm de débattement à l’arrière pour descendre à 140 mm mais sur des roues de 29″ désormais, alors que le précédent avait été conçu pour des roues de 27,5″ avant de passer au format mulet (27,5″ à l’arrière et 29″ à l’avant) quelques années plus tard. Moins de débattement mais des roues plus grandes, la technique est connue et on a pu constater au fil des années que cela fonctionnait relativement bien.

Toutefois, ça n’a pas empêché Lapierre d’apporter quelques changements à la cinématique. Développée pour un sag de 30%, elle se veut plus « présente » en milieu de débattement et plus progressive en fin de course. De quoi corriger un petit reproche qu’on pouvait faire à l’ancien modèle, souvent jugé un peu souple et collé au sol. En revanche, l’accès à l’amortisseur est toujours aussi compliqué et on vous conseille de démonter le petit garde-boue de protection pour faire vos réglages. Sans cela, impossible de voir le plongeur et le témoin de sag correctement.

Si on s’intéresse maintenant à la géométrie on remarque que la nouvelle plateforme, tout à fait moderne et dans l’air du temps, n’est finalement pas si différente de l’ancienne pourtant âgée de 6 ans. C’est dire si elle était réussie à l’époque ! Avec une fourche de 140 mm, ce nouvel E-Zesty affiche un angle de direction de 65° (- 0,5°), un angle de tube de selle de 77° (+ 2°), un reach de 460 mm en taille M (+ 9 à 17 mm suivant la taille) ou encore des bases adaptées à la taille du vélo : 435 mm en S et M, 440 mm en L et 445 mm en XL contre 435 mm pour tout le monde auparavant.

D’après nos calculs, le passage à une fourche de 150 mm comme sur le E-Zesty AM 9.4 (voir plus bas) raccourcit le reach de 5 mm et fait perdre 0,5° aux principaux angles. On note aussi que le vélo est désormais disponible en taille S, quelque chose qui n’était pas le cas jusque-là et qui ravira les pilotes de moins d’1m70.

Dans les détails techniques, on remarque un flipchip sur la liaison entre les bases et l’amortisseur pour éventuellement passer le vélo en mulet et des câbles qui passent en interne via le jeu de direction. A ce sujet, on signale toutefois que Lapierre a fait « simple » et que ces nouveaux E-Zesty utilisent des entretoises tout à fait classiques ce qui permet de changer la hauteur de son poste de pilotage sans aucun problème contrairement à d’autres marques.

La gamme ne compte que deux modèles pour l’instant, tous deux en carbone et disponibles dès maintenant. Le E-Zesty AM 9.4, ci-dessus, est affiché à 7599 € pour 18,3 kg. Il est équipé de suspensions RockShox Lyrik Select+ en 150 mm et Super Deluxe Select+, d’une transmission Shimano mêlant Deore (cassette, chaîne), SLX (commande) et Deore XT (dérailleur), de freins Shimano SLX 4 pistons, de roues Lapierre eAM+ aluminium et de pneu Maxxis DHR II 2.4 Exo (AR) et Assegai 2.5 Exo+ (AV).

Plus haut de gamme mais aussi équipé plus « léger », le E-Zesty AM LTD pointe lui à 8699 € pour 18,03 kg. Le cadre est identique au 9.4 mais il passe à des suspensions RockShox Pike Ultimate en 140 mm et Deluxe Ultimate, un groupe Shimano SLX (commande, chaîne) et Deore XT (dérailleur, cassette, freins 4 pistons) et des roues Lapierre eAM+ carbon. Contrairement au vélo en photo ci-dessus, les pneus sont les mêmes sur les deux modèles.

Ces tarifs sont bien sûr élevés dans l’absolu mais pour la catégorie, ils restent corrects. En revanche, on a du mal à comprendre le choix des pneus : une carcasse Exo souple et fragile (pour ce segment) à l’arrière mais du plus solide Exo+ à l’avant. A nos yeux, l’Exo n’a pas du tout sa place sur ce genre de vélo mais s’il fallait en monter un pour faire des économies, il serait plus logique de l’avoir à l’avant qu’à l’arrière.

Prise en main du Lapierre E-Zesty

Si notre séance photo s’est déroulée au guidon d’un E-Zesty AM LTD, l’essentiel de notre prise en main a eu lieu avec le E-Zesty AM 9.4. Ça tombe bien, c’est le moins cher des deux ! Toutefois, pas de panique : bien qu’il y ait une petite différence de débattement à l’avant, les deux vélos restent très proches et l’essentiel de nos conclusions s’applique aussi bien à l’un qu’à l’autre.

Quand on se lance les sentiers, il ne faut pas longtemps pour comprendre que ce nouvel E-Zesty est réussi, très réussi même. En montée, le vélo a du grip, ne cabre pas et l’assistance Fazua Ride 60 offre tout le soutien nécessaire dans les pentes les plus raides. L’équilibre est bien géré et le vélo apparaît bien plus maniable qu’un gros e-bike à 22-23 kg. C’est un régal dans les sections techniques, on ne se bat pas avec le poids ou l’inertie et on n’a pas l’impression que le vélo fait tout le travail comme c’est parfois le cas sur d’autres e-bikes bons grimpeurs mais à gros moteur.

En descente, c’est la même chose moins l’assistance. Le plus intéressant est probablement la suspension car on a pu constater à travers nos différents essais que les marques de vélos avaient parfois du mal à trouver le bon compromis entre dynamisme, grip et soutien pour ces VTTAE légers. Avec cet E-Zesty, Lapierre a au contraire visé juste : on a du confort sur les petits chocs, du répondant, une bonne capacité à absorber les plus gros impacts, ce qu’il faut d’adhérence au freinage et un peu de tolérance pour les travers.

Au-delà de ça, la machine est facile à placer et l’équilibre très bon comme en montée. Attention, le surpoids imposé par l’assistance est bel et bien là et on ne peut pas toujours jouer du terrain comme on le ferait avec un vélo classique, les bunny-hops demandent par exemple bien plus d’efforts pour moins de résultats, mais on n’a pas l’impression de trainer un poids en sortie de virage et le pilotage est plus proche de celui qu’on a sur vélo sans assistance que sur un e-bike à gros moteur. Lorsqu’on aborde des sections particulièrement techniques ou exposées par exemple, on est plus serein et on a moins peur des réactions de la machine.

Reste un sujet incontournable en e-bike, celui de l’autonomie… et elle est excellente ! Le Lapierre E-Zesty bat à plate couture le Specialized Levo SL 2 ou le Trek Fuel EXe : deux de nos testeurs (65 et 80 kg) ont pu faire 1200 m de dénivelé sur des ascensions parfois techniques et irrégulières sans la moindre gestion de la batterie, en alternant entre les modes 2 et 3 de l’assistance suivant la pente (et en abusant de la fonction Boost), et terminer la sortie avec environ 20 % de batterie. Les 1800 m de dénivelé sont donc largement envisageables, même pour un pilote de 80 kg voire plus.

Jusqu’il y a peu, on vous aurait dit que son plus gros défaut se situait au niveau de l’assistance Fazua. Comme on vous l’expliquait il y a quelques temps (lire Test | Fazua Ride 60 : l’empire du milieu), ce système souffre d’un délai important entre le moment où on appuie sur la pédale et le moment où l’assistance arrive, ce qui le rend réellement handicapant dans les montées un peu techniques où on pédale de façon irrégulière.

Souffre, ou plutôt souffrait. Le 23 mai dernier, Fazua a publié une mise à jour du logiciel censée corriger ce défaut… et ça marche ! Ce n’est pas encore parfait, le Ride 60 n’est pas au niveau des autres moteurs du marché, qu’ils soient petits ou gros, mais c’est déjà beaucoup moins gênant. Et on peut encore améliorer les choses en poussant l’accélération à 100 % via l’application ou le logiciel (disponible ici) qui permettent de configurer le système comme on le souhaite. On sent toujours un petit délai mais c’est désormais du domaine de l’acceptable et ce n’est plus ça qui nous fera poser pied à terre dans une montée.

On ne va pas tourner autour du pot plus longtemps : ce nouveau Lapierre E-Zesty est de loin le meilleur e-bike en Fazua qu’il nous ait été donné d’essayer jusque-là et parmi les meilleurs en assistance légère dans cette catégorie de vélos polyvalents ou all-mountain. Suspension, géométrie, autonomie, tout est réussi et cela donne une excellente machine au comportement équilibré, exempte de véritable défaut. Rassurant mais pas ennuyant, dynamique mais pas exigeant, redoutable grimpeur mais tout aussi à l’aise en descente, cet E-Zesty a tout pour être un succès. Son prédécesseur avait ouvert la voie mais s’était rapidement fait malmener par la concurrence, ce nouveau modèle remet les choses en place et montre que Lapierre a encore largement de quoi concurrencer des marques parfois jugées plus prestigieuses. Bravo !

Plus d’informations : lapierrebikes.com