Test nouveauté | Forestal Siryon : le cheat code ?
Par Léo Kervran -
Chez Forestal, il ne faut pas confondre Siryon… et Siryon. En effet, le nom – qui fait écho à l’étoile Sirius – désigne à la fois un e-bike et un vélo classique, tous deux en 29″ et 170 mm de débattement. Après avoir essayé le premier il y a quelques années nous avons pu emmener le second, tout juste dévoilé, sur nos sentiers ces dernières semaines. Une simple découverte qui s’est transformée en excellente surprise :
Si vous ne connaissez pas Forestal, on vous invite à lire notre visite réalisée à l’automne 2021 en préambule à cet article. Ambitieuse, la marque a vu ses beaux projets se heurter à la pandémie de Covid-19 et à ses différentes conséquences, mais elle n’a pas baissé les bras. Depuis notre passage au siège-usine d’Andorre-la-Vieille, les travaux ont certainement bien avancé et avec la présentation récente de trois nouveaux modèles, la marque montre qu’elle prête à passer une étape.
Le Siryon, version sans assistance, fait donc partie de ces nouveaux vélos qui doivent permettre à Forestal d’explorer de tout nouveaux territoires… et de toucher de nouveaux clients, qui ne penchent pas du côté de l’e-bike. Il faut dire que les promesses sont alléchantes : la marque prévoit d’avoir sa production en Andorre (oui, même la fabrication du cadre) et si elle parvient à le mettre en place, ce sera un joli petit exploit.
Sur le papier, on a donc un enduro en carbone et roues de 29″ exclusivement, développant 170 mm de débattement. Autrement dit, tout ce qu’il y a de plus commun (ou presque, il n’est pas en pivot haut !) pour la catégorie en 2024.
Côté cadre, le Siryon assume largement le rapprochement avec son homologue à assistance électrique (e-Siryon) : le matériau est le même et les lignes sont presque identiques, au point que vu de côté, il n’y a que la jonction du tube supérieur avec le tube de selle qui change légèrement. Sur le Siryon, l’amortisseur apparaît ainsi un peu plus « caché », comme rangé dans un nid douillet à l’abri des regards et des projections.
Le Siryon perd aussi l’étonnante petite fenêtre de l’e-Siryon, qui facilitait un peu le réglage du sag et surtout donnait une identité originale au vélo. Ici, le tube supérieur descend d’une traite et paraît, il faut bien le dire, assez massif lorsqu’on est aux commandes du vélo.
En revanche, il gagne une boîte à gants dans le tube diagonal. Quand on vous disait qu’il cochait toutes les cases d’un enduro moderne ! Malgré le volume apparent du tube, l’ouverture est assez étroite mais Forestal se rattrape sur deux points : la sacoche, de très bonne facture, et la « porte ». Conçue avec Fidlock, le spécialiste des fermetures et mécanismes de verrouillage par aimants, elle est très facile à utiliser et se reverrouille d’elle-même ce qui offre de belles garanties quant à la fiabilité et à la durée de vie du système (impossible de mal le refermer et d’abîmer quelque chose).
Partenariat avec Fidlock oblige, la porte accueille une base aimantée pour les bidons de la marque mais elle est démontable pour celles et ceux qui préfère utiliser un porte-bidon classique.
Côté géométrie, on note que le Siryon n’est disponible qu’en trois tailles et cela s’est fait au détriment des personnes les plus petites : Forestal a fusionné S et M dans un « grand » S/M (458 mm de reach), tandis que L et XL sont bien d’actualité (488 mm et 508 mm de reach respectivement).
A côté de ça, on retient aussi des bases de 435 mm (S/M) ou 445 mm (L et XL), un boîtier de pédalier à – 25 mm, un angle de direction de 64,5° et un angle de tube de selle de 77,5°. Mis à part l’offre de taille réduite, un procédé assez courant chez les petites marques pour contrôler les coûts, il n’y a a priori rien qui fasse vraiment hausser un sourcil sur ce Siryon. Le vélo veut être un enduro polyvalent et il s’en donne les moyens.
La suspension est le désormais habituel monopivot + biellettes de Forestal, baptisé Twin-Levity et qui offre ici 170 mm. Entre le (massif) bras arrière et l’amortisseur, prolongé par un yoke, deux biellettes placées l’une au-dessus de l’autre permettent à la marque andorrane de contrôler plus précisément le comportement de la suspension tout au long du débattement. A l’avant, c’est du 170 mm également ce qui est synonyme de fourche en plongeurs de 38 mm chez la plupart des marques.
La finition est un élément important de l’identité de Forestal et le Siryon n’échappe pas à la règle. La marque ne cache pas s’inspirer des codes et couleurs de l’automobile pour un rendu toujours spectaculaire. A la rédaction, ce blanc et bleu n’a pas convaincu tout le monde (certains aiment, d’autres sont plus circonspects) mais une chose est sûre, impossible de passer inaperçu, et ce même aux yeux des non-initiés !
La peinture semble être de qualité mais nous avons tout de même repéré un petit éclat sous l’une des biellettes, vraisemblablement à cause d’un gravillon qui a eu la mauvaise idée de se glisser dans ce recoin. De même, les protections du cadre sont de belle facture et couvrent toutes les zones exposées (on apprécie le garde-boue arrière intégré) mais celle de notre tube diagonal a tenu une sortie à peine avant de se décoller. La marque nous avait toutefois prévenus, indiquant que la colle utilisée pour les modèles de pré-production comme le nôtre n’était pas la bonne et que cela avait déjà été corrigé pour la production de série.
Côté standards, vous aurez sûrement déjà remarqué les passages internes de gaine à travers le jeu de direction. Ce dernier intègre par ailleurs des butées dans la coupelle inférieure (semi-intégrée), de façon à protéger le tube diagonal des impacts (principalement par le té de fourche) en cas de chute. La patte de dérailleur est au format UDH et le boîtier de pédalier fileté, standard BSA. Par ailleurs, un guide-chaîne est monté d’office sur le vélo mais le cadre dispose également de plots ISCG 05 pour le montage d’un bashguard si nécessaire.
Combien ça coûte ? Le Forestal Siryon est proposé en deux versions, Halo (6999 €) et Diode (8999 €), celle que nous avons pu essayer. Notre modèle est équipée de suspensions Fox 38 Factory et Float X2 Factory (RockShox ZEB Select+ & Vivid Select + en Halo), de freins Formula Cura 4 avec leviers en carbone et d’une transmission Sram XO AXS (GX Eagle en Halo).
Côté train roulant, ce sont des roues Crankbrothers Synthesis Alloy moyeux Industry 9 (moyeux Crankbrothers en Halo) chaussées de pneus Schwalbe Albert Gravity Soft/Ultra Soft, les fameux pneus de Schwalbe à carcasse « radiale ». Le poste de pilotage est entièrement assemblé à partir de composants maison tandis que la tige de selle est une OneUp V3 et la selle vient de chez Fizik.
Enfin, le kit cadre (amortisseur Fox Float X2 Factory) sera également disponible au tarif de 3999 €.
Prise en main du Forestal Siryon Diode
En taille S/M et niveau de gamme Diode, le mieux équipé de la famille, notre Forestal Siryon affiche 16,8 kg sur la balance. Ce n’est pas ce qu’il y a de plus léger, d’autant plus que le vélo n’a ni pédales ni bidon et que la pochette de la boîte à gants est vide, mais c’est aussi surprenant : l’équilibre des masses est tel que lorsqu’on soulève le vélo, il paraît plus léger et on lui donnerait plutôt entre 15,5 kg et 16 kg.
En montée en revanche, le poids est bien là. La position est excellente, la suspension ne pompe pas outre mesure et on se voit sans mal emmener le Siryon sur de longues journées à la pédale, mais on n’avance pas très vite. Pourtant, les sensations ne sont pas mauvaises et on n’a pas l’impression de laisser de l’énergie quelque part comme ça peut être le cas sur un vélo à point de pivot haut et galet de renvoi par exemple.
Le train roulant pourrait toutefois avoir un certain rôle dans ce comportement : d’une part, les Crankbrothers Synthesis Alloy ne sont pas les roues les plus dynamiques qu’on connaisse (2 kg la paire) et d’autre part, le vélo est équipé des nouveaux Schwalbe Albert à carcasse (presque) radiale. Comme on vous l’expliquait à leur sortie (lire Nouveauté | Schwalbe réinvente sa gamme gravity), cette carcasse est censée avoir un effet délétère sur le rendement.
Nous n’avons pas testé le vélo suffisamment longtemps pour voir ce que ça donnerait chaussé de pneus à carcasse plus classique mais ce détail explique à nos yeux une bonne part de cette « lenteur » à la montée et il y a fort à parier qu’avec un autre train roulant, le Siryon se montrerait plus volontaire. Dans la limite de ce que permet son poids bien sûr, n’allez pas imaginer des relances foudroyantes avec un vélo qui dépasse les 17 kg en configuration de roulage. Cependant, ce qu’on paye au pédalage, on le gagne à la descente !
En effet, à la descente, le Forestal Siryon est comme un cheat code : tout est facile à son guidon. On a la sensation d’avoir la facilité et la maniabilité d’un all-mountain quand le chemin tourne ou propose plusieurs trajectoires, avec les capacités et la stabilité d’un enduro dans la pente, les gros franchissements ou lorsqu’on prend de la vitesse.
Le grip fantastique de l’ensemble (les pneus aident mais le châssis joue aussi un rôle) est presque déroutant au premier abord et il faut prendre un peu de temps pour s’y habituer mais une fois que c’est fait, quel plaisir ! On roule détendu dans les conditions les plus difficiles et on n’appréhende plus LE passage compliqué de la piste, celui qui fait toujours un peu serrer les fesses d’habitude.
La suspension offre un très bel équilibre entre sensibilité en début de course et support ensuite, avec en bonus une fin de course très bien gérée qui permet de se lancer sur des sauts ou des gros obstacles sans craintes. Il nous a fallu quelques descentes pour trouver les bons réglages en hydraulique sur l’amortisseur Fox Float X2 et ses 4 voies (les hautes vitesses en particulier, tant en rebond qu’en compression, ont permis de faire la différence) mais c’est une contrainte vite oubliée face à toute la confiance qu’on peut ensuite mettre dans le vélo.
En revanche, il n’est pas aussi joueur qu’on pourrait l’imaginer. Avec des bases de 435 mm, un boîtier de pédalier pas très bas et une telle facilité de prise en main, on s’attendait à pouvoir tirer des bunny-hops presque sans y penser mais le Siryon n’est pas vraiment enclin à sauter partout ou à sortir de chaque virage sur la roue arrière. Ce n’est pas impossible mais ça demande clairement plus d’effort et de maîtrise qu’on le pensait, un caractère qui tient sûrement à l’équilibre général du vélo et à l’amortisseur Fox Float X2, connu pour « calmer » les vélos. Un Float X apporterait sûrement un peu plus de vivacité mais sera-t-il possible de trouver un réglage aussi précis avec cet amortisseur plus simple ?
Au final, seuls les freins nous ont déçus avec une puissance irrégulière. De bonne en début de test et en phase avec ce qu’on connaissait d’eux, elle est devenue beaucoup plus faible par la suite sans que les plaquettes ou les disques n’aient été contaminés par un liquide. De ce fait, nous n’avons pas pu éprouver les limites de la rigidité du cadre comme nous l’aurions aimé : elle nous a semblé a minima satisfaisante et loin du cliché du vélo tolérant avec du grip mais mou, mais nous avions prévu de pousser les choses un peu plus loin.
Le mot de la fin
Sirius, c’est l’étoile la plus brillante dans le ciel nocturne. S’en inspirer pour nommer son vélo, c’est soit être très arrogant, soit complètement fou… Soit sûr de son coup. Et avec ce nouveau Siryon, Forestal pourrait bien lui faire honneur. Très bien équilibré tant en châssis qu’en suspension, abouti et à l’aise sur une grande variété de terrains, le vélo montre qu’il est encore possible de marier polyvalence et performance sans empiler les flip-chips et autre pièces réversibles ou interchangeables. Facile à prendre en main mais efficace, le Siryon nous a plaqué un grand sourire sur le visage et si on ne serait pas contre un peu plus de dynamisme au pédalage, on lui pardonne sans trop de mal sa drôle de lenteur à la montée tant les sensations qu’il distille sont flatteuses et agréables par ailleurs. Désormais, on a très envie de voir ce que pourrait donner la recette Forestal sur le segment all-mountain avec un équivalent du Cyon à assistance électrique…
Plus d’informations : forestal.com