Test | Haibike Lyke 11 : plus facile que jamais

« Jamais il n’a été aussi facile de faire du vélo électrique. » C’est ainsi que Haibike présente ce Lyke, dévoilé au public l’été dernier. Comme d’habitude chez la marque allemande, la machine se veut polyvalente plus que versée d’un côté ou de l’autre du spectre : 140 mm de débattement et des roues de 29″ pour passer partout sans trop s’encombrer. Toutefois, on remarque aussi une ligne plus dynamique qu’à l’accoutumé et une intégration mieux réussie. Simple effet de style ou ce Lyke a-t-il autre chose à offrir que ce qu’on connaît d’Haibike ?

Châssis

Pour ce Lyke, Haibike a joué la carte de la légèreté jusqu’au bout : à l’exception du basculeur et du yoke qui font la liaison avec l’amortisseur, le cadre est intégralement en carbone sur les trois modèles qui composent la gamme. Un carbone mis en valeur par la finition très réussie sur ce vélo, à trois coloris comme toujours chez Haibike et qui se marient ici parfaitement.

Légèreté, mais aussi intégration. Le système Fazua Ride 60 choisi par Haibike n’est peut-être pas le plus petit du marché mais il est tout de même bien plus discret que les assistances classiques et la marque allemande a choisi d’en tirer parti pour proposer des lignes dynamiques et effilées, proches de celles d’un vélo classique.

La clé réside entre autres dans le positionnement du moteur. Alors que le TQ HPR-50 est presque parfaitement rond et le nouveau Bosch Performance SX grossièrement rectangulaire, le Fazua Ride 60 est de petit diamètre mais relativement allongé. Les marques l’installent généralement à l’horizontale ou à un angle qui ne dépasse pas 30-40°, et cela donne un tube diagonal assez massif dans sa partie basse, qui ne laisse aucun doute quant à la présence d’un moteur.

A l’inverse, sur le Lyke, le Ride 60 est placé à la verticale dans le tube de selle. Un œil avisé remarquera bien sûr que la zone est plus large que d’habitude mais c’est très bien réalisé et avec les dernières évolutions en matière d’intégration, chez Scott par exemple, les regards sont habitués à voir de gros tubes de selle. L’ensemble paraît ainsi beaucoup plus léger que sur le nouveau Lapierre E-Zesty par exemple, qui a en plus (d’un point de vue esthétique uniquement) l’inconvénient d’avoir également l’amortisseur dans cette zone qui devient alors un peu surchargée.

Sans grande surprise, les passages de gaines se font en interne et via le jeu de direction, mais à l’instar de Lapierre et du E-Zesty justement, modèle « cousin » puisque les deux marques font partie du groupe Accell, Haibike a choisi une solution simple avec des entretoises tout à fait classiques sous la potence. Contrairement à ce que font Focus ou Scott par exemple, on peut donc facilement changer la hauteur de son poste de pilotage sans avoir à racheter des entretoises. On note aussi que ce jeu de direction intègre des butées pour éviter que le cintre et ses commandes ne viennent endommager le cadre en cas de chute.

En revanche, carton jaune pour les inserts de porte-bidon : le vélo est livré avec des caches en plastiques à la place des vis, ce qui est déjà regrettable à ce prix (à partir de 6999 €, détail plus bas dans la section Versions et tarifs) mais en plus, il ne suivent pas le standard habituel des vis M5. Ici c’est du M4, un format beaucoup moins courant sur nos vélos et que vous n’aurez sûrement pas dans votre caisse à outils…

On termine cette partie avec un détail du protège-base, parmi les plus travaillés et spectaculaires qu’il nous ait été donné de voir. Et on vous confirme qu’il est efficace !

Assistance

Côté assistance, on l’a dit, c’est du Fazua Ride 60. Issu de l’expérience acquise avec le Ride 50, l’un des premiers systèmes légers du marché, le Ride 60 pèse 4,26 kg (1,96 kg de moteur et 2,3 kg de batterie) pour une capacité de 430 Wh.

Le moteur fonctionne avec trois modes d’assistance et peut développer jusqu’à 60 Nm et 300 W sur le plus puissant d’entre eux, voire 450 W avec la fonction Boost limitée dans le temps (4 s si elle est lancée à l’arrêt, 12 s si on est déjà en mouvement). La batterie n’étant pas amovible, le rechargement se fait directement sur le vélo par la trappe conçue à cet effet et on note qu’elle est particulièrement bien conçue avec des petits aimants pour sécuriser la fermeture.

Fazua a opté pour un affichage discret : 5 diodes de couleur intégrées au tube supérieur… et c’est tout. On contrôle le système avec un anneau placé juste à côté de la poignée et si l’idée est intéressante, la mise en œuvre manque un peu de raffinement. Ainsi, la commande a parfois un peu de mal à revenir en place et le fait de devoir revenir en mode 0, moteur allumé mais sans assistance, pour activer l’assistance à la marche est assez agaçant.

Comme c’est la norme, on peut personnaliser et mettre à jour le système avec une application pour smartphone ou un logiciel pour ordinateur accessible à tous sur le site de Fazua (ici). On ne saurait que trop vous conseiller d’installer l’un des deux car au-delà de la personnalisation, les mises à jour peuvent changer beaucoup de choses dans le comportement du système ainsi que nous avons pu le voir au cours de ce test. On vous en reparle dans la partie terrain !

Suspension

Haibike n’a jamais été connue pour ses idées originales ou ses concepts radicaux de suspension et le Lyke ne fait pas exception à la règle : le vélo repose sur un 4 bar linkage de type Horst Link (explications dans notre lexique), l’architecture la plus courante et la plus éprouvée du marché. C’est simple, c’est fiable et, normalement, ça fonctionne plutôt bien.

Elle développe ici 140 mm de débattement, comme à l’avant, et selon les modèles on trouve du Fox ou du RockShox pour contrôler tout ça. Le haut de gamme Lyke CF SE a droit à un amortisseur à bonbonne, un Fox Float X en l’occurrence, mais notre Lyke 11 et le Lyke 10 utilisent tous deux un amortisseur en ligne, ce qui marque déjà un peu le caractère général et les préférences de la machine.

Géométrie

Haibike et ses géométries courtes ou datées, c’est fini, et ce depuis quelques saisons déjà. Le Lyke est tout ce qu’il y a de plus moderne et sa géométrie est, sur le papier, parfaitement en phase avec son programme : un angle de direction de 65°, un reach polyvalent de 452 mm en taille M et un angle de tube de selle suffisamment droit pour monter longtemps (77,3°). On remarque aussi un boîtier de pédalier relativement haut (-25 mm seulement) de façon à éviter de taper les pédales en montée technique.

Seules les bases surprennent un peu puisqu’elles sont relativement longues (450 mm) comme si on était sur un gros e-bike alors que Lapierre ou Focus ont montré qu’il était possible de faire bien plus court avec le même moteur. Est-ce que cela aura une influence sur le terrain ?

Equipements

Affiché à 7999 €, le Haibike Lyke 11 est le modèle intermédiaire de la gamme et l’équipement est à l’avenant : on navigue dans le milieu-haut de gamme, avec des composants déjà très performants mais pas exagérément pointus.

Le meilleur exemple se situe sûrement au niveau des suspensions, où on trouve une Fox 36 Performance à l’avant et un DPS Performance de la même marque à l’arrière. Au passage, petite astuce pour l’avant : en descente, ne roulez pas avec le réglage des compressions (le « blocage ») tout ouvert mais laissez-le plus ou moins à mi-chemin entre la position intermédiaire et la position tout ouvert. Vous aurez plus de soutien sans rien sacrifier en sensibilité et une fourche qui se tient mieux, c’est un vélo avec plus de grip et plus agréable à piloter.

Pour la transmission et le freinage, c’est du Shimano à tous les étages avec beaucoup de Deore XT (dérailleur, commande, freins) et un peu de SLX (cassette, chaîne). Notez que les étriers sont ici en version 4 pistons et qu’ils sont couplés à des disques de 180 mm à l’avant comme à l’arrière.

Belle surprise au niveau des roues puisque le vélo est équipé de Mavic Crossmax XL S, le modèle en aluminium haut de gamme de la marque française. Elles se placent en face de DT Swiss XM 1700, par exemple.

Elles sont chaussées de pneus Maxxis Dissector 2.4, en carcasse légère Exo à l’avant et Exo+ plus solide à l’arrière. Chez Vojo, nous ne sommes pas fan du Dissector en montage avant pour son côté exigeant en virage (il manque de crampons de transitions entre les pavés centraux et les latéraux) mais on apprécie le montage d’une carcasse solide à l’arrière.

Enfin, côté périphériques, on a un poste de pilotage en aluminium signé XLC, la marque de composants en tout genre du groupe Accell et une assise Selle Italia Model X, un modèle qui se distingue du reste de la gamme par son process de fabrication plus vertueux. Entièrement réalisée en Italie, sa confection dégage moitié moins de CO2 que celle d’une selle classique et n’utilise ni colle ni solvants (même pour faire tenir le rembourrage sur la coque) afin d’être facilement recyclable, tandis que les déchets sont tous réutilisés.

Nous avons seulement changé les poignées, celles d’origine ne nous convenant pas du tout (petit diamètre et relativement dures). A place, nous avons monté ces poignées absoluteBlack en silicone que vous pourrez bientôt retrouver en test sur Vojo. Ne vous laissez pas avoir par leur apparence étrange, elles nous plaisent beaucoup pour le moment !

Sur la balance, notre Haibike Lyke 11 en taille L affiche 19,1 kg sans pédales. Rien d’exceptionnel pour un e-bike léger mais c’est déjà intéressant puisqu’on est largement sous les 20 kg sans qu’il n’y ait eu de chasse au poids sur le montage.

Versions et tarifs

On le disait, ce Lyke 11 est le modèle intermédiaire de la famille. En dessous, Haibike propose le Lyke 10 à 6999 € (même cadre mais suspensions RockShox Lyrik Select et Deluxe Select+, transmission Sram SX/NX Eagle et freins Shimano Deore) tandis qu’au-dessus, on a le très exclusif Lyke CF SE à 12 499 € (suspensions Fox 36 Factory Grip2 et Float X Factory, groupe complet Shimano XTR et roues Mavic Crossmax XL R en carbone).

Haibike Lyke 11 : le test terrain

Sur les sentiers, le Lyke affiche un comportement plutôt placide. La responsabilité en incombe notamment à la suspension : on a l’impression que Haibike a voulu apporter un peu plus de dynamisme que sur un e-bike classique, un comportement un peu plus vif au pédalage et de ce côté, c’est effectivement plutôt réussi quand on est dans une plage de pression normale, entre 25 et 30 % de sag.

L’inconvénient, c’est que cela a aussi affecté la sensibilité, et pas dans le bon sens : avec ce réglage de suspension, on manque de confort et de grip. Or, l’Haibike Lyke est peut-être un e-bike léger mais cela reste un e-bike, et avec un peu plus de 19 kg à supporter, le comportement n’est pas le même que sur un XC/trail à 12 kg et aurait bien besoin de ce petit supplément de confort et de grip.

Heureusement, on le retrouve assez facilement en dégonflant un peu la suspension mais on se heurte alors à une autre limite : la plage de réglage du rebond. L’amortisseur est très freiné d’origine et si vous pesez moins de 70 kg, il y a de fortes chances pour que la détente soit trop lente même avec le réglage dans sa position la plus ouverte. Cela reste roulable mais ça donne au Lyke un comportement très posé avec un arrière collé au sol, encore plus avec les bases longues. Si on cherche un vélo sécurisant c’est très bien mais si on veut quelque chose de plus joueur et dynamique, d’autres modèles comme le Focus Jam² SL (terrains lisses et flow) ou le Lapierre E-Zesty (sentiers techniques) sont plus indiqués.

Dans le même thème, le cadre n’est pas le plus rigide qu’on ait vu sur ce genre de machine. Cela participe au comportement très sécurisant quand on roule tranquillement car le vélo pardonne largement les erreurs et absorbe facilement les mauvaises surprises, mais c’est moins adapté si on veut attaquer, on manque de précision et on peut se retrouver avec des réactions brouillonnes dans certaines situations lorsque le chemin mélange appui, pente et rochers ou racines. Qu’on ne se méprenne pas, le Lyke passe partout sans difficultés, mais ce n’est pas un vélo d’enduro race qui a besoin de vitesse et d’un pilotage expert pour fonctionner. Bien au contraire !

En dehors de ça, on rappellera pour celles et ceux qui ne seraient pas familiers de cette catégorie de VTT AE à assistance plus faible mais poids réduit que le pilotage est bien différent de celui d’un « gros » VTT AE. Avec un poids sous la barre des 20 kg pédales comprises et une batterie deux fois plus légère que sur ces autres modèles, le vélo se manie bien plus facilement et on ne lutte pas contre le poids dans les virages, les freinages ou les sections techniques à basse vitesse. Agréable quand on a un bon niveau mais aussi bien plus facile quand on est moins expérimenté. On est vraiment sur un niveau intermédiaire entre VTT classique et gros e-bike, les roues restent plus au sol que sur les premiers mais la maniabilité et la sensation de naturel sont bien meilleures que sur les seconds.

Le Lyke reste toutefois un e-bike et à cet égard, il n’est pas à l’abri de certains défauts propres aux e-bikes… comme le cabrage en montée. On croyait ce souci derrière nous depuis un ou deux ans, la grande majorité des marques ayant réussi à le régler, mais les premières sorties avec le Lyke nous ont rappelé de mauvais souvenirs.

Heureusement, ça s’est amélioré en descendant la pression dans l’amortisseur arrière pour retrouver du grip comme on l’évoquait plus haut mais cet Haibike Lyke demande tout de même à son ou sa pilote de s’investir un peu pour garder du contrôle sur la roue avant : position académique en bec de selle avec les coudes rentrés et tige de selle plus ou moins descendue obligatoire dans les sections les plus raides.

Côté assistance, le Fazua Ride 60 est toujours aussi agréable et encore plus depuis la mise à jour du 23 mai dernier qui améliore l’assistance à la marche (auparavant si faible qu’elle était inutile) et surtout la réactivité. C’était le principal défaut de ce système, au point de le rendre difficile à exploiter en montée un peu technique où l’on pédale de façon saccadée. Avec cette mise à jour c’est beaucoup mieux et encore plus si on prend le temps d’ouvrir l’application ou le logiciel pour passer l’accélération à 100 % sur chacun des modes.

En termes de réactivité, le Ride 60 revient alors quasiment au niveau des autres systèmes d’assistances et le micro-délai qu’on peut encore sentir n’est plus du tout gênant. On peut alors pleinement profiter de sa discrétion sonore, de la puissance bien dosée entre pilote et moteur (plus puissant qu’un TQ HPR-50 ou qu’un Specialized SL première génération, moins qu’un gros e-bike) et surtout de l’autonomie, qui figure parmi les meilleures de la catégorie. Comme on vous l’expliquait dans l’article dédié à ce système d’assistance (lire Test | Fazua Ride 60 : l’empire du milieu), on peut envisager assez facilement 2000 m de D+.

Verdict

Troisième vélo doté d’une assistance Fazua Ride 60 que nous essayons et troisième proposition différente sur le terrain, bien qu’ils se ressemblent tous sur le papier. Avec ce Lyke, Haibike apporte la preuve s’il en fallait encore une qu’il est impossible de réduire un e-bike à son moteur et que le cadre, ainsi que la philosophie de conception, sont toujours prépondérants. Moins pointu que les Focus Jam² SL et Lapierre E-Zesty, plus tranquille, l’Haibike Lyke conviendra à celles et ceux qui cherchent un e-bike passe-partout léger et facile, qui les mettra en confiance peu importe le sentier. Si on accepte les particularités de la suspension comme un choix de conception, il ne lui reste qu’un défaut un peu gênant, ce cabrage à la montée, mais avec un peu de technique on parvient à ne pas se laisser (trop) dépasser.

Plus d’informations : haibike.com