Test gravel | Cervelo Áspero Rival XPLR AXS 1 : vitesse constante
Par Paul Humbert -
Remanier la recette d’une proposition réussie est un pari auquel les marques se confrontent régulièrement. Le risque de faire moins bien demeurant existant, Cervelo est resté fidèle aux éléments principaux de la recette de son gravel best seller pour proposer cette nouvelle version de l’Áspero. On vous raconte nos quelques semaines à son guidon, à la découverte des nouveautés :
Après cinq années à accumuler des kilomètres et à enchaîner les aventures, l’Áspero premier du nom laisse sa place à une nouvelle version. Le fer de lance de la gamme gravel de Cervelo se dévoile avec les mêmes ambitions qu’il y a quelques années : rouler vite, si possible longtemps, dans toutes les conditions.
Son tempérament est plutôt orienté vers la performance que vers l’aventure, même si ses concepteurs ont souhaité garder la notion de polyvalence.
Aspero ou Aspero-5 ?
Attention à ne pas confondre l’Áspero et l’Áspero-5. Ce dernier est la version « course » du vélo et propose un cadre légèrement différent avec un triangle arrière plus court et un cadre plus léger. Côté équipements, le vélo intègre complètement les câbles et pousse sa recherche d’aérodynamisme. Les vélos, plus haut de gamme que l’Áspero, proposent des capteurs de puissance intégrés sur les montages les plus chers.
Il est probable que l’Áspero-5 soit moins tolérant et polyvalent que l’Áspero, mais nous ne pouvons pas le confirmer sans l’avoir testé. Ce qu’on remarque toutefois, c’est que si l’Áspero vient d’être renouvelé, ce n’est pas le cas de l’Áspero-5 qui ne bénéficie pas encore des dernières évolutions.
Châssis
Le gravel est un marché qui évolue rapidement et la maison canadienne a profité de l’apparition des nouveaux standards pour rester en phase avec les attentes des pratiquants. Illustrant cela, on retrouve désormais un boitier de pédalier fileté T47a facilitant d’entretien ainsi qu’une patte de dérailleur UDH permettant, si on l’enlève, l’usage de dérailleurs Sram AXS T-Type.
Sur ce nouvel Áspero de gravel, le trajet des gaines se voit modifié. Le résultat est moins pratique pour l’entretien et la mécanique (même si il est facile de modifier la potence et la hauteur du poste de pilotage) mais c’est appréciable pour cohabiter au mieux avec les accessoires de bagagerie. C’est également cohérent avec une recherche d’esthétisme et d’aérodynamisme.
L’Áspéro se voulant polyvalent et prêt à affronter les pires conditions, le dégagement du cadre a été revu à la hausse pour accueillir des pneus jusqu’à 700×45 de section. C’est presque peu quand on sait de que nombreux gravel modernes proposent un dégagement jusqu’à 700×50, mais ça reste en phase avec le programme de l’Áspero qui n’a pas vocation à se transformer en machine de bikepacking ou en VTT à guidon courbé.
Géométrie
Pas de révolution sur cet Áspero, on vous l’a dit, mais de petites évolutions. Le triangle arrière s’allonge un peu puisque les bases passent de 420 à 425mm, avec une incidence légèrement à la hausse pour l’empattement. Le reach (397 mm en taille 56) et le stack (580 mm en taille 56) n’ont quant à eux pas été modifiés.
Les haubans et le tube supérieurs sont abaissés de quelques millimètres et accentuent le « sloping » du vélo.
L’Áspero n’est pas excentrique et si il est un peu plus bas que certains de ses concurrents, il reste dans la lignée des vélos affichant un programme similaire : un vélo de gravel polyvalent, mais toujours axé sur la vitesse et une forme de performance.
Les vététistes coutumiers du fait ne seront pas déroutés, on retrouve un petit flip-chip baptisé « Trail Mixer » au niveau de l’axe de roue avant. Il permet de positionner plus en avant ou en arrière celui-ci et donc de faire le choix entre une direction plus dynamique ou plus sage et faisant varier le trail (trail) du vélo et donc son empattement de plus ou moins 5 mm.
Chacun pourra trouver son bonheur puisque ce sont 6 tailles de cadres qui sont proposées et déclinées du 48 au 61.
Sur la balance, notre Áspero XPLR AXS 1 affiche 8,6 kg sans pédales et avec un porte-bidon en taille 56. Toujours dans cette taille-là, la marque annonce un cadre à 1141 g et une fourche à 452 g.
Détails et finitions
Le Cervelo Áspero est tout en carbone et on voit également les tubes s’affiner à certains endroits, notamment pour le tube inférieur. Ça devrait pouvoir permettre de gagner un peu en tolérance.
On retrouve sur les vélos une série de composants maison : un cintre AB09 et une tige de selle SP19 en carbone, mais également une potence ST36 en aluminium.
Livrée avec le vélo, on découvre une pochette bien commode qui s’installe à l’aide d’un rail positionné sur les pas de vis du tube supérieur.
D’autres inserts sont également disséminés sur le cadre pour installer deux porte-bidons. Sur le tube diagonal, trois trous permettent d’ajuster la position du système en fonction de nos préférences, de la taille du bidon ou de la bagagerie utilisée. Enfin, deux protections sont apposées sur le cadre. Minimalistes mais efficaces, elles s’intègrent parfaitement dans l’esthétique du vélo et ont très bien rempli leur rôle pendant notre test.
Au sein du groupe Pon (Cervélo, Santa Cruz, Focus) on retrouve Reserve et les roues en carbone garanties à vie qui équipent notre vélo de test. Elles se présentent avec un profil de 44 mm de haut à l’arrière et de 40 mm à l’avant sur moyeux Zipp.
Enfin, côté finition, peinture et design, on avoue avoir été séduits pas les lignes du vélo et le choix de la peinture légèrement pailletée. S’il est difficile d’avoir un recul sur des mois d’utilisation, cette dernière nous a semblé solide.
La gamme gravel Cervelo Áspero
- Kit cadre Áspero, 2 799 € : avec tige de selle, axes de roue et jeu de direction
- Áspero Apex XPLR 1, 3 599 € : groupe Sram Apex XPLR 1×12 en plateau 40 dents et cassette 11-44, roues Alexrims Boondocks 7D, pneus WTB Vulpine TCS Light 700×40
- Áspero GRX RX610 1, 3 699 € : groupe Shimano GRX 610 1×12 en plateau 40 dents et cassette 10-45, roues Alexrims Boondocks 7D, pneus WTB Vulpine TCS Light 700×40
- Áspero GRX RX610, 3 699 € : groupe Shimano GRX 610 2×12 en plateaux 30-46 dents et cassette 11-36, roues Alexrims Boondocks 7D, pneus WTB Vulpine TCS Light 700×40
- Áspero GRX RX820, 4 899 € : groupe Shimano GRX 820 2×12 en plateaux 30-46 dents et cassette 11-36, roues Fulcrum Rapid Red 300, pneus WTB Vulpine TCS Light 700×40
- Áspero Apex XPLR AXS 1, 4 899 € : groupe Sram Apex XPLR AXS 1×12 en plateau 40 dents et cassette 11-44, roues Fulcrum Rapid Red 300, pneus WTB Vulpine TCS Light 700×40
- Áspero Rival XPLR AXS 1, 5 799 € : groupe Sram Rival XPLR AXS 1×12 en plateau 40 dents et cassette 10-44, roues Reserve 40/44, pneus WTB Vulpine TCS Light 700×40
Test terrain : Cervelo Áspero Rival XPLR AXS 1
Après une rapide prise en main au lancement du vélo, on a poussé plus loin au guidon de ce nouvel Áspero, et il faut dire qu’il en redemandait. En plus des pistes et des sentiers proches de la rédaction dans les alpes, on est parti le long du canal du midi, dans le Luberon et jusqu’au sommet du Mont Ventoux en sa compagnie.
Nous n’avions pas publié de test de l’Áspero jusque-là, mais nous connaissions déjà la version qui a fait son succès. Nous ne sommes donc pas dépaysés quand on grimpe sur ce nouveau gravel. On est portés sur l’avant, la ligne d’épaule dans l’alignement de la direction, et on est parfaitement installés pour appuyer sur les pédales et produire son effort. La selle propose une assise courte et un bec plongeant, ce qui renforce cette sensation.
On se sent bien à son bord et les premiers tours de roues dévoilent rapidement le potentiel nerveux et performant de la machine.
Une fois la hauteur de selle définie, il n’a pas été nécessaire d’abaisser outre mesure la potence tant l’avant est suffisamment bas. La bascule du corps sur la direction permet une bonne maitrise du pilotage, une précision dans les appuis ainsi qu’une belle efficacité au pédalage dans les montées. Ici, l’Áspero tranche nettement avec les interprétations du gravel de marques plutôt typées aventure. On est confronté à des sensations qu’on pourrait retrouver sur un vélo de route et on se surprend à prendre naturellement des positions aéro et vouloir appuyer davantage sur les pédales que notre condition physique ne nous le permet. Aux oubliettes la gestion de l’effort, ce vélo en redemande à chaque relance ! Mais il serait dommage de le réduire à un vélo de route bodybuildé.
Face à l’Áspero et sur le même segment, on pense au Scott Addict Gravel, au Specialized Crux, à l’Origine Graxx ou au BMC Kaius.
Sur l’Áspero, les roues Reserve répondent au quart de tour une fois lancées et contribuent beaucoup au comportement du vélo. Elles aident le vélo dans les sections roulantes, mais également dans les chemins et les sentiers plus escarpés pour rester maître de ses trajectoires et se faufiler dans les portions techniques tout en gardant la motricité nécessaire. Voilà qui est dit, mais maintenant, il faut assumer ! Incisif, l’Áspero nécessite de garder son sang-froid et de pouvoir réagir face à des racines en dévers tapies sous des feuilles, un pierrier soudain en sortie de virage ou une marche plus haute que prévu.
Sur notre montage, les pneus WTB Vulpine nous ont surpris aux deux extrêmes. Sur les portions roulantes et sèches ou sur l’asphalte, le rendement était clairement freiné par ces pneus qui faisaient pâle figure face à d’autres modèles polyvalents du marché. On avait une machine prête à aller vite mais ralentie par sa monte de pneus.
À l’inverse, en terrain plus cassant, et si il était primordial d’ajuster finement sa pression pour profiter d’un bon comportement, les pneus offraient un bon grip dans les dévers glissants et aidaient à la traction en montée technique. Au freinage, ils se sont montrés assez lisibles et ça nous a aidé dans le contrôle général du vélo.
Un des points clés du renouvellement de cet Áspero, c’est le travail fait sur la rigidité du cadre. L’Áspero premier du nom s’est toujours montré très ferme, et c’est ce qui a fait son succès auprès d’un public recherchant un vélo très nerveux et vif. Ici, avec les jantes Reserve, on découvre un vélo qui filtre effectivement un peu mieux que la précédente génération et qui est plutôt excellent sur les petits chocs et les vibrations une fois lancé.
Sur les chocs les plus gros, on touche par contre vite aux limites du vélo. L’Áspero ne se transforme pas en VTT dès qu’on l’emmène sur les sentiers. Son terrain à lui, c’est les grandes pistes, et plus la vitesse est élevée, mieux c’est ! Quand on connaît le réseau de routes secondaires en Amérique du nord, de grandes pistes non goudronnées, on comprend l’utilité d’un vélo comme celui-ci face à un vélo de route limité aux grands axes encombrés.
On s’amuse dans les grandes courbes comme dans les virages plus serrés. En relance aussi, l’Áspero transmet des sensations assez rares sur un gravel.
Tout ça mis bout à bout, l’Áspero se positionne aux antipodes de son cousin le Santa Cruz Stigmata et d’un Propain Terrel et affirme son identité du côté des gravel « performance », pas de surprise.
Dans cette version Sram Rival XPLR, l’Áspero s’est montré sur le papier très cohérent et cela ne diffère pas sur le terrain. La transmission est optimisée pour le gravel et s’est montrée adéquate avec une cassette en 10-44 et un plateau en 40 dents. Cela permet une bonne polyvalence même si dans les Alpes et hors des sentiers battus on a atteint certaines limites quand ça monte très raide. Pour les plus aventureux ou ceux désireux d’utiliser un montage en double plateau ou « mulet » avec une cassette de VTT et/ou un derailleur T-Type Sram, le cadre est compatible et on retrouve une ouverture pour le passage d’un câble si besoin.
On a apprécié le cintre plat offrant un répit salvateur pour les mains, surtout après avoir été secoué de longs moments. Son flare de 16 degrés s’est avéré correct et permet un appui stable et rassurant dans les descentes, même si ce n’est pas le plus «gravel » des cintres de la catégorie. Impactant favorablement le poids de l’ensemble, sa construction carbone ne nous a pas semblé porter préjudice face à la filtration des vibrations.
Dans la continuité du poste de pilotage, on a apprécié l’intégration d’un support de compteur joliment réalisé, compatible avec les modèles Garmin ou Wahoo. Simple et efficace. C’est aussi dans ces moments que l’on apprécie l’intégration des gaines. Dans ce contexte épuré où les visions sur l’intégration, la praticité et l’ergonomie s’affrontent, les techniciens auront la tâche plus ardue au moment de l’entretien mais nous avons également profité de pouvoir utiliser une sacoche de guidon.
On s’est ensuite attardé sur l’utilisation du flip-chip au niveau de l’axe de roue avant. Le changement d’une position à l’autre est facile, et après avoir essayé les deux positions, notre choix s’est plus porté sur celle la plus en arrière. Ce n’est pas flagrant, mais en stabilisant la direction, elle « assoit » davantage la proue du vélo et rassure quand les chemins deviennent plus techniques. Le vélo est déjà très joueur et dynamique et nous n’avons pas ressenti ce besoin d’ajouter un grain de folie supplémentaire.
Verdict
Au fil de nos sorties sur différents terrains, le gravel Cervelo Áspero s’est montré cohérent avec le programme annoncé, équilibré et performant. La marque annonçait la couleur en présentant le renouveau de son gravel : « Haul ass, not cargo ». Et cela résume parfaitement le vélo : pas le temps de traîner. Le Cervélo Áspero est fait pour pédaler, monter dans les tours et se dépasser. Évidemment, rien ne vous empêchera de partir avec en bikepacking ou de randonner tranquillement, c’est comme se promener avec une voiture de course aux suspensions très fermes. La marque réussit sa mise à jour sans renier les origines de son développement et l’Áspero conviendra toujours aux personnes qui hésitent entre un vélo de route et un vélo de gravel, ou qui recherchent un gravel « qui va vite » à tout prix. L’esthétique est très réussie et si on a rendu le vélo sans regret après des sorties un peu trop « tout-terrain », il nous a manqué ces dernières semaines lors de nos dernières sorties gravel sur de grands chemins.
Cervelo Áspero Rival XPLR AXS 1
5799 €
8,6 kg Taille 56, sans pédales
- Positionnement assumé
- Vivacité du vélo
- Filtration des petits chocs
- peinture et finition
- Rendement des pneus
- RAS
Évaluation des testeurs
- Prix d'excellence
- Coup de coeur
- Rapport qualité / prix
Plus d’informations : cervelo.com