Test | Commencal Meta Trail V4.2 Race : non, les petites roues ne sont pas mortes !
Par Olivier Béart -
Il n’a pas de cadre carbone. Pas de grandes roues. Et c’est encore un modèle 2018 ! Vous vous rendez compte ?!? À se demander pourquoi on a testé ce Commencal Meta TR ! Et pourtant, si on mettait ces préjugés et tout cet attirail « fashion victim » de côté ? Ne pourrait-on pas découvrir tout de même un vélo intéressant ? Voire un coup de cœur qui montre qu’il ne faut pas toujours suivre les dernières tendances pour se faire (très) plaisir ? Allons vérifier cela sur le terrain !
Bon, pour commencer, on ne va pas se chercher de fausses excuses ou tourner autour du pot. Oui, ce test sort avec du retard et les gammes « 2019 » ont déjà été présentées depuis un moment, avec notamment un nouveau Meta TR en 29 pouces. Nous nous en excusons auprès de vous, chers lecteurs, et auprès de la marque qui nous avait fait parvenir ce vélo que nous avons testé entre mai et août de cette année. Mais parfois, hélas, le contexte fait qu’un dossier reste dans la pile et ne parvient pas à en sortir. Ce n’est pas un manque d’intérêt, juste des circonstances qui expliquent que parfois, hélas, du retard s’accumule sur certains dossiers.
Mais après ce mea-culpa, ne peut-on pas transformer ce souci en une opportunité ? Après tout, le Commencal Meta TR V4.2 650b du millésime 2018 est encore disponible dans pas mal de tailles et versions sur le site de la marque (qui, pour rappel, ne vend que par ce biais), avec en plus quelques belles remises. Puis, c’est aussi l’occasion de se demander si un vélo de la collection précédente devient tout à coup « has been » dès que la nouvelle gamme est présentée. Et de voir si les petites roues de 27,5″ parviennent encore à nous séduire sur une machine comme celle-ci, à l’heure où le 29″ perce sur tous les segments ou presque, et concentre très largement l’attention au niveau des nouveautés.
Bref, les circonstances font que nous en profitons pour aborder cet essai avec un angle légèrement différent de ce que nous réalisons habituellement. Avant de passer au test terrain, voyons en détails les caractéristiques de ce Commencal Meta TR V4.2 en roues de 27,5 pouces, ainsi que les différences avec la version AM, offrant plus de débattement.
Châssis
Le « downsizing » ne se pratique pas que dans l’automobile pour les motorisations. Dans le vélo aussi, il arrive que certains modèles donnent naissance à d’autres versions plus « petites ». C’est le cas chez Commencal avec le Meta TR V4.2 (trail), qui est littéralement le petit frère du Meta AM V4.2 (destiné à des pratiques plus musclées), avec un débattement qui passe à 130 derrière/140 devant en venant de 160/170.
Pour passer de l’un à l’autre, la recette est très simple, puisqu’on se rend vite compte, en mettant les deux côte à côte, que les cadres sont identiques. On est toujours face à un châssis en aluminium 6066 Triple Butted, qui bénéficie des modifications déjà aperçues sur le Meta AM, avec notamment le tube supérieur très large en deux parties au lieu de trois. À noter aussi que la finition brossée est somptueuse et, si nous avions critiqué le Meta AM V4.2 peint en noir, c’est tout à fait différent dans le cas présent !
Partager les plateformes entre le TR et le AM, ça se tient et c’est intelligent sur le plan industriel, puisque cela permet de réaliser des économies d’échelle, et Commencal est connue pour proposer des vélos à des tarifs très serrés. Quant au comportement, quelques modifications de détail bien senties peuvent avoir une très grande influence et on a déjà vu que les équipes dont Max Commençal a su s’entourer sont plutôt douées pour concevoir des vélos à la personnalité bien trempée.
Suspensions
Alors, qu’est-ce qui change entre un châssis Commencal Meta TR V4.2 et un AM ? Eh bien, les suspensions, pardi ! La cinématique reste inchangée et de type monopivot à biellette, mais l’amortisseur arrière est ici un 210*50 (210 mm de longueur totale pour 50mm de course de piston au format métrique) sur le TR, contre 230*60 sur le AM.
C’est tout ? Oui et non, puisque l’amortisseur lui-même est différent et on passe de modèles clairement pensés pour l’enduro/all-mountain sur le AM (avec réservoir externe ou même ressort hélicoïdal sur certains montages) à un petit amortisseur plus typé XC/trail sur la version testéee ici. Dans le cas du montage Race 2018 essayé présentement, c’est un Fox Float Factory Evol, dont le setup interne et la philosophie vont aussi influer pas mal sur le caractère du vélo.
À l’avant, exeunt aussi les « grosses fourches » (type F36/Lyrik), place à une « petite » Fox F34 Factory en 140mm de débattement, nettement plus légère et un peu plus souple que la 36 du grand frère Meta AM. Comme sur l’amortisseur, on retrouve trois positions pour régler la compression en modes ouvert, avec plateforme de pédalage et (quasi) bloqué.
Géométrie
Entre le Commencal Meta TR V4.2 et le AM, on constate fort logiquement que pas mal de valeurs ne changent pas, vu que les cadres sont identiques à la base. C’est le cas notamment de la longueur des bases (437mm), de la hauteur de douille de direction, ou encore de la longueur du tube de selle ainsi que de son angle (74°) ou encore le reach (435mm en taille M, soit pas franchement long mais bien dans l’air du temps).
Par contre, on observe que, naturellement, l’angle de direction change (66,5 contre 65,5°) , de même que la hauteur de boîtier de pédalier (-25mm de « BB Drop » sur le TR, contre -12 sur le AM).
Le poste de pilotage est aussi quasi identique, avec un cintre en 780mm de large dans les deux cas et juste une potence 10mm plus courte sur l’AM (40mm, contre 50mm ici sur le TR). Dans l’ensemble, une fois aux commandes, on retrouve vite les repères acquis sur la version à plus gros débattement et, comme toujours chez Commencal, on est face à un vélo très facile à prendre en main.
Equipement
C’est un point sur lequel Commencal, en bonne marque de vente par Internet, a pris l’habitude de se démarquer. Mais ce n’est pas le tout de mettre des composants luxueux, encore faut-il savoir bien les assortir ! Et là, on sent que les équipes de la marque roulent. Parfois sur des terrains un peu spécifiques – et leurs choix ne conviendront pas à tous –, mais l’ensemble reste cohérent et on ressent au moins la volonté de sortir un vélo plaisant quoique, pas passe-partout au point d’en perdre son âme.
Sur ce Commencal Meta TR V4.2 en version Race haut de gamme, au rang des valeurs sûres et des inévitables, on retrouve les suspensions Fox Factory dont nous avons déjà parlé, mais aussi le groupe Sram GX Eagle. Il n’est pas luxueux mais la marque a préféré investir ailleurs les euros épargnés sur ce poste. Ce n’est pas un mauvais choix car son fonctionnement n’a pas trop à rougir face à du XO, mais il n’est pas franchement léger et il y a aussi la question de sa durabilité face à ses grands frères construits avec des matériaux plus nobles. Ayant pu garder longtemps le Meta TR, nous n’avons pas expérimenté de souci majeur, mais les réglages ont dû être refaits plusieurs fois et il était délicat d’obtenir quelque chose de parfait en fin de test.
Les freins Shimano XT M8000 en disques de 200mm à l’avant et 180mm stoppent en toutes circonstances et paraissent même presque surdimensionnés pour ce vélo (surtout en taille S ou M, pas spécialement destiné à des pilotes hyper lourds, contrairement à des tailles L et XL, où cela peut se justifier). Mais ils n’en sont pas brutaux pour autant et pour un vélo développé au pied des montagnes, on peut comprendre ce choix. La tige de selle KS Lev Integra est une des références du segment et son débattement de 150mm se révèle bien adapté au programme du vélo.
Les roues e13 nous ont, par contre, une nouvelle fois laissés sur notre faim. Dur de leur trouver de gros défauts en 27,5″, mais elles n’apportent pas vraiment de « pep’s » au vélo et leur neutralité ne colle pas tellement au comportement du Meta TR. Nous avons roulé une bonne partie du test avec des roues en carbone (Roval Traverse) qui ont fait monter d’un cran le plaisir ressenti au guidon et les performances de la bête.
Côté pneus, le choix d’un semi-slick (Maxxis Minion SS) à l’arrière est osé mais sur le sec et la rocaille, c’est un pneu très intéressant, avec un bon rendement et un vrai grip latéral. Au freinage, il est un peu plus délicat mais quand on sait y faire, c’est amusant. Sur sol humide par contre, n’espérez rien de lui. À l’avant, le Forekaster est nettement plus polyvalent, et sans être un pneu aussi accrocheur qu’un Minion DHF quand on attaque, il fait admirablement bien le job sur un vélo de trail comme ici. On peut même envisager de le monter à l’arrière pour rouler par tous les temps.
Enfin, nous avons retrouvé avec plaisir les composants Ride Alpha, très bien finis et à l’ergonomie parfaite. Le cintre tombe bien sous les mains et il a aussi une rigidité parfaitement dosée qui évite l’effet barre à mine et la fatigue des bras. Les grips sont du même tonneau, sans oublier la selle, aussi confortable que solide. Seuls les chasseurs de grammes pourront les trouver un poil lourd, mais sur ce genre de machine, est-ce primordial ?
L’ensemble pèse 13,3kg sans pédales sur notre balance. Ce n’est donc pas du tout un poids plume, c’est clair, même si le chiffre n’a rien de scandaleux. Il faudra surtout voir si cela se sent sur le terrain ou pas. Côté compte en banque, il est affiché à 3799€ au tarif plein et comme il s’agit d’un modèle 2018, il est encore disponible dans certaines tailles à 3499€. Une vraie bonne affaire vu l’équipement, et il reste aussi d’autres versions en millésime 2018.
Si vous êtes tenté par ce modèle en « petites » roues de 650b, ne traînez pas car pour 2019, Commencal a choisi de privilégier très fort le nouveau Meta TR en 29 pouces. Et chez Commencal, « Bicycles d’opinion », ça veut dire que quand on prend une décision, on y va à fond. Il ne reste donc qu’un modèle 27,5 (montage Origin à 2199€ en Sram NX Eagle et suspensions RockShox), alors qu’il y en a trois pour les grandes roues, de 2699 à 3999€. Si on applaudit l’arrivée de la version 29, qu’on a d’ailleurs hâte de tester pour la comparer à ce 27,5, on peut tout de même regretter que la présence des petites roues soit si réduite à présent. Surtout que, comme nous allons le voir, elles ont encore de très belles choses à offrir.
Commencal Meta TR V4.2 Race : sur le terrain
Le premier contact avec le Commencal Meta TR V4.2 Race est autrement plus flatteur qu’avec l’AM Origin testé l’an dernier. En cause, la finition brossée absolument superbe sur celui-ci, alors que le noir mat de l’AM prêtait le flanc à la critique. Nous n’avons pas encore eu l’occasion de voir les modèles 2019 et de juger la qualité de leur peinture, mais il semble aussi que la marque ait fait des efforts sur les autres finitions. En tout cas, ne boudons pas notre plaisir, ici, on a vraiment l’impression de rouler sur un vélo haut de gamme.
La position est ramassée, on n’est pas du tout sur un vélo à la géométrie extrême. Le Meta TR est facile à prendre en main et flatteur des les premiers mètres. Pas de mode d’emploi compliqué à comprendre, il saute comme un cabri, change de direction avec vigueur et ne nécessite pas un niveau de pilotage de fou pour en profiter.
Le débattement réduit, ainsi que le setting d’amortisseur choisi sur le TR, donnent clairement un vélo avec plus de dynamisme au pédalage.
Si on trouve vite des similitudes avec le Meta AM du côté de la position, au niveau des suspensions, les différences surgissent aussi très rapidement. Côté réglage de l’amortisseur, alors que nous avons directement opté pour un SAG de 30% sur la version 160mm, nous sommes ici partis sur 25% sans la moindre hésitation. L’amortisseur Fox bouge naturellement un peu moins que son homologue RockShox, et le débattement réduit ainsi que le setting choisi sur le TR donnent clairement un vélo avec plus de dynamisme au pédalage. Ca semble logique, mais c’est heureux que ça se confirme sur le terrain.
Le pompage est bien maîtrisé d’origine, même si on n’hésite pas à utiliser le levier à 3 positions pour activer la plateforme de pédalage quand c’est plus roulant. L’angle de selle redressé aide aussi à avoir une bonne position pour les ascensions raides et le Meta TR est un très bon grimpeur, surtout quand c’est technique. Dans les sections roulantes, on prend son temps et ne le prenez pas pour une machine de marathons ou de courses par étapes, vous risquez d’être déçu. Sauf éventuellement si on parle de Transvé, même si son poids ne joue pas en sa faveur pour ce genre d’épreuve longue.
A l’avant, la Fox 34 est clairement plus souple qu’une 36/Lyrik, mais finalement, ce n’est pas plus mal. Car c’est plus en accord avec l’arrière de la machine, dont on a de nouveau bien ressenti la grande souplesse. Mais si cela pouvait parfois être dérangeant sur la version AM à grand débattement et dans laquelle on est tenté de beaucoup plus « rentrer dedans », sur le TR, nous n’avons jamais trouvé cela pénalisant et l’équilibre avec les réactions de la fourche est nettement plus équilibré.
Au niveau des roues, le comportement banal des e13 nous a vite donné envie d’aller voir ailleurs et d’utiliser des Roval Traverse SL en carbone que nous avions à disposition. Bien nous en a pris car elles ont vraiment dynamisé le Meta TR et magnifié les qualités du châssis. Sans être hyper rigides, elles ont apporté un peu plus de précision tout en se mariant très bien à la souplesse du châssis. Le gain en dynamisme dans les accélérations est aussi notable.
Mais un autre changement va aussi doper le plaisir et les performances du Meta TR : le passage sur des pneus en 2.6″ de section (Schwalbe Magic Mary devant et Nobby Nic derrière), qui passent sans souci au niveau du dégagement ! On reperd le poids gagné sur le changement de roues, mais pas pour rien ! Avec un tel ballon et un diamètre externe un peu plus grand, on rehausse un peu la machine (ce qui n’est pas plus mal car sinon, le boîtier est quand même fort bas) et surtout, on profite d’un grip terrible ainsi que d’une filtration incroyable des petites aspérités qui permet de coller le vélo au parquet. Et le tout, sans devoir se farcir la sensation de flou qu’on peut ressentir avec du 2.8.
Le combo gros pneus/petites roues et débattement réduit fonctionne à merveille sur un engin taillé pour le plaisir comme le Commencal Meta TR. L’accroche est démoniaque et donne l’impression d’être sur un gros vélo à de nombreux aspects, tout en ayant la facilité et la vivacité d’une petite machine de trail quand on veut sauter, se jeter d’un coin à l’autre du sentier, ou tout simplement s’amuser. Quand on regarde les temps, sans que cela ait quoi que ce soit de scientifique, on voit aussi qu’on va vite. Très vite ! Et quand on roule à Mach 12, il fait preuve d’une stabilité à laquelle on ne s’attendait pas spécialement vu son petit débattement et son cadre assez ramassé.
A moins d’habiter à la montagne, d’enfiler les descentes de plus de 10 minutes au petit déjeuner ou d’avoir un usage enduro race, on peut déjà aller très loin avec cette version TR, qui se montrera aussi beaucoup plus facile à prendre en main pour un novice ou quelqu’un venu plus de l’univers XC. Clairement, pour s’amuser dans les Ardennes ou sur des reliefs comme l’Alsace, les Vosges ou le massif Central, pas vraiment besoin de plus. En prenant le temps de jouer sur les roues et les pneus (type, section, etc.), on pourra vraiment lui trouver un champ d’application très large.
Verdict
Oui, nous avons eu un gros coup de cœur pour ce Commencal Meta TR 27,5 ! Comme nous le disions au début, il n’a pas de cadre carbone, pas de grandes roues, et c’est un modèle d’un millésime déjà presque « dépassé » (hum), mais p… quel vélo ! En matière de machine à plaisir, difficile d’imaginer mieux. Si on peut aller très vite à son guidon, c’est juste pour aller chercher de l’adrénaline, pas spécialement un chrono. Dans ce contexte, les petites roues se profilent toujours comme une excellente solution. Nous avons hâte de voir ce que donne la version 29 », mais nous ne saurions trop vous conseiller de tester des pneus en section 2.6 sur une machine comme le TR car cela magnifie ses qualités. Loin d’être un vélo dépassé, ce Meta TR 27,5 mérite de cohabiter encore longtemps avec la version à grandes roues. Au final, c’est plutôt rassurant de savoir (même si on s’en doutait assez fort) qu’un vélo du millésime précédent ne perd pas soudainement toutes ses qualités quand le nouveau sort. Ouf.
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