Test | Commencal Meta AM V4.2 Essential : au-delà de l’enduro
Par Olivier Béart -
Max Commencal est connu comme quelqu’un au caractère bien trempé. Et les athlètes ainsi que les personnes dont il s’entoure aussi. Logique donc que cela se ressente dans les vélos, et cette nouvelle mouture de la bécane d’enduro de la marque pousse le bouchon encore un peu plus loin que ses prédécesseurs en passant à 160/170mm de débattement tout en restant en roues de 27,5″. Reste à voir si les évolutions par rapport à la précédente génération sont sensibles et si ce vélo piloté par la championne du Monde Cécile Ravanel ou des gars comme Yoann Barelli parvient à partager ses charmes avec des bikers de moindre envergure comme vous et moi. Pour le savoir, voici notre test du Commencal Meta AM V4.2 Essential, affiché juste sous la barre des 3000€ :
Pour ce nouveau Meta V4.2, Commencal voulait surtout mettre à jour ses capacités en enduro pour répondre aux impératifs du circuit mondial où la marque est très présente avec de grands noms comme Ravanel ou Barelli, mais sans compromettre la polyvalence du vélo, qui est une de ses caractéristiques depuis sa sortie. C’est donc dans le détail que la marque a travaillé.
Au niveau du cadre, la première modification visible se situe au niveau du tube, supérieur désormais en deux parties au lieu de trois. Plus large (vraiment très large, en fait, et on n’est pas habitué à de telles sections sur des tubes en aluminium), il offre plus de place pour l’amortisseur et permet d’assurer une compatibilité avec presque tous les modèles du marché, y compris les plus gros (type Fox X2) et ceux à ressort métallique. On dispose également de plus de place pour le bidon à l’intérieur du triangle avant. Quant à la très discrète fixation avant de l’amortisseur, elle n’est plus filetée mais intègre une pièce facilement remplaçable pour le pas de vis. Un détail parmi d’autres qui montre que Commencal essaie de penser durable pour ses vélos. Nous reviendrons par après plus en détails sur la suspension elle-même.
Autre changement : l’arrière passe au standard Boost 148 (comme l’avant, avec des fourches en axe de 110mm de large). Cela n’a pas pour but de raccourcir les bases, qui restent à 437mm, mais plutôt d’offrir plus de dégagement au pneu et de place pour loger l’étrier de frein au niveau des haubans. Cela permet aussi d’améliorer la rigidité et le montage des roues en utilisant des moyeux aux flasques plus déportées vers l’extérieur.
Avant d’en finir avec ce rapide tour d’horizon des principales modifications du cadre lui-même, signalons aussi que le Commencal Meta AM V4.2 est doté d’un passage revu pour le câble de dérailleur et la Durit de frein afin d’améliorer la transition vers le triangle arrière (avec le passage en Boost, ces deux points doivent permettre de diminuer les risque de bourrage lorsqu’on roule dans la grosse boue ; une faiblesse de la précédente version qui avait tendance à jouer au ramasse-miettes près du boîtier de pédalier). Une protection prend aussi place sous le tube diagonal.
Ah oui, nous allions presque oublier de vous parler de la taille des roues : à l’heure où le 29 » cristallise de plus en plus l’attention, Commencal reste fidèle au 27,5 ». Il n’est pas impossible que cela change dans le futur vu que la marque a bien développé un Suprême 29″ pour ses pilotes de DH mais pour ses vélos de production, c’est pour l’instant un choix clair de Commencal de rester fidèle aux « petites » roues. Par contre, la largeur des jantes et des pneus évolue, comme nous le verrons dans la rubrique « équipements ».
Cinématique et suspension
Sur le Commencal Meta AM V4.2, les suspensions gagnent 10mm de débattement à l’avant, comme à l’arrière. On passe donc à 160 derrière et 170 devant, suivant les valeurs qui deviennent la norme en EWS (où certains pilotes montent même des fourches en 180mm). Mais au-delà de cette petite augmentation du débattement, Commencal a aussi fait évoluer la courbe d’amortissement de son Meta V4.2.
La cinématique ne change pas sur le principe et reste de type mono-pivot + biellette avec un point de pivot arrière placé sur les haubans. Le pivot principal reste placé haut, au niveau du sommet des dents d’un plateau de 32 dents comme celui monté d’origine sur le pédalier Sram GX, de sorte à obtenir une valeur d’anti-squat élevée (le Commencal Meta a toujours été connu pour être étonnamment bon au pédalage pour un vélo de ce type, et il entend le rester). Mais par contre, de petites évolutions de détail et le passage à un amortisseur au format Metric changent la donne.
Bien plus qu’un simple changement de mesure, les nouveaux amortisseurs RockShox Deluxe (et Super Deluxe avec réservoir externe utilisés sur les versions plus haut de gamme) en métrique offrent plus de place pour l’hydraulique (volume d’huile et clapetterie), ainsi qu’un rapport course du piston/longueur totale plus favorable (230x60mm).
Cela a permis à Commencal de revoir le fonctionnement de sa cinématique Contact System pour offrir plus de débattement mais aussi plus de sensibilité en début de course. L’idée est aussi d’offrir une plus grande facilité à rentrer dans le débattement sans pour autant sentir la suspension « s’écrouler » et aller jusqu’au fond comme nous l’avions reproché au Meta V4 testé il y a 18 mois. A l’époque, nous avions dû tâtonner pas mal et mettre les mains dans le cambouis pour rajouter des volume spacers dans l’amortisseur afin d’obtenir un comportement répondant aux attentes. Nous verrons sur le terrain si les promesses du petit nouveau se confirment.
Géométrie
De ce côté, les évolutions sont très subtiles, et découlent principalement de la légère augmentation du débattement de la fourche, qui passe à 170mm sur le Commencal Meta V4.2. Le reach ne change quasiment pas (425mm en taille M, +2mm par rapport au V4), comme la longueur du tube supérieur. On reste donc sur des valeurs courtes, qui ne suivent pas la tendance aux reaches de plus en plus longs. Commencal mise ainsi plus sur le côté joueur et accessible, sans empêcher les pilotes plus aguerris et ceux qui veulent viser le chrono de surtailler au moment de l’achat.
L’empattement progresse par contre logiquement (1180 contre 1167mm) vu la nouvelle proue, tout comme l’angle de direction qui est de 65,5° contre 66° auparavant. La plus grosse modification concerne finalement l’angle de selle, qui passe de 72 à 74° pour placer le pilote dans une meilleure position lors des phases de pédalage. C’est de plus en plus tendance et nous trouvons que c’est une excellente chose ! Le cadre est disponible en 4 tailles (S, M, L et XL).
Equipement
Commencal est, à l’instar de Canyon, un des fers de lance de la vente en direct sur Internet. Ce système sans intermédiaire lui permet de se positionner de façon très agressive au niveau des tarifs ainsi que de proposer des équipements de haut vol et cohérents dès les premiers prix. La gamme se compose de 7 modèles (5 + 2 « séries spéciales » en réalité, dont une en suspensions Fox alors que tout le reste de la gamme est en RockShox), avec des tarifs qui démarrent à 2199€ et qui culminent à 4199€. D’accord, on reste sur un cadre en aluminium, mais ce sont là des prix qui restent très accessibles par rapport à la concurrence.
Pour ce test, nous avons choisi le Commencal Meta V4.2 Essential, positionné en milieu de gamme et affiché à 2999€ (tarif normal – mais 2799€ actuellement). Il est équipé d’une transmission Sram GX en 11 vitesses, et il faut monter vers le Race Eagle à 3499€ (également doté d’autres équipements plus haut de gamme) pour avoir du 12 vitesses en Sram XO Eagle. Mais il est fort probable qu’avec l’arrivée du Sram GX Eagle, une nouvelle version équipée de ce 12 vitesses plus accessible voit le jour. C’est d’ailleurs sur un Commencal Meta V4.2 issu de la flotte Sram (mais en version TR 130mm) que nous avons fait nos premiers essais du GX Eagle lors de sa sortie.
Au niveau des suspensions, on trouve un amortisseur RockShox Deluxe RT avec blocage à deux positions et une fourche RockShox Lyric RC, l’entrée de gamme dans la famille des Lyric. Les freins proviennent aussi de la famille Sram avec les Guide R en disques de 200 et 180mm. On trouve aussi une indispensable tige de selle télescopique RockShox Reverb Stealth en 125mm de débattement sur les tailles S/M et 150mm sur les L/XL.
Les roues ont fait l’objet d’une attention toute particulière sur le Meta V4.2 avec des jantes plus larges sur tous les modèles. Ici, sur l’Essential, on hérite de jantes Mavic 427 qui, comme leur nom l’indique, ont une largeur entre crochets de 27mm. Elles sont montées en 32 rayons sur des moyeux Formula, une référence parmi les moyeux OEM asiatiques. Quant aux pneus, on a du Maxxis High Roller II en 2.4 devant et du DHR II derrière. Deux profils proches et bien connus qui font office de référence même si, pour l’avant, nous aurions préféré un Minion DHF (en section de 2.5 tant qu’à faire).
Enfin, les périphériques sont les excellents Ride Alpha développés par la marque (comme le cintre en 780mm de large et 30mm de rise, lourd mais à l’ergonomie parfaite, et la potence en 50mm très rigide) ou sélectionnés par Commencal auprès de quelques autres grands noms de l’OEM asiatique (comme la selle de chez Velo par exemple). Nous avons pesé l’ensemble à 14,43kg sans pédales mais avec pneus montés en tubeless.
Enfin, pour être complets, signalons que 4 couleurs sont disponibles, dont une très belle finition en alu brossé (qui demande un supplément de quelque 100€) et que Commencal dispose aussi d’un programme de montage à la carte qui permet de choisir parmi de nombreuses options. Le cadre seul est également disponible, dès 999€ sans amortisseur ou dès 1299€ avec. Et pour ceux qui n’ont pas besoin d’autant de débattement, il existe aussi le Commencal Meta TR V4.2 en 130mm de débattement et une déclinaison électrique en moteur Shimano est aussi annoncée.
Commencal Meta AM V4.2 Essential : le test terrain
Quand on déballe le Commencal Meta AM V4.2, on a d’abord l’impression de retrouver une vieille connaissance. Il faut dire que de profil, il ressemble très fort à son prédécesseur. Puis, de 3/4 face et quand on s’approche, impossible de passer à côté du nouveau tube supérieur, très massif et d’une largeur inhabituelle sur un cadre alu. Heureusement, les jambes ne viennent pas taper sur les bords, pas d’inquiétude. Globalement, la finition est belle et le vélo fait haut de gamme malgré son tarif agressif.
Hélas, quand on regarde dans les moindres recoins, on tombe vite sur une série de petites choses qui trahissent un manque de souci du détail. Le point le plus visible, c’est l’absence de peinture au niveau des « coques » qui reçoivent le point de pivot situé près de l’axe de roue arrière. La peinture noir mat de notre exemplaire de test ne semble pas uniforme, elle s’est marquée rapidement et s’est aussi montrée difficile à laver. Pour l’avoir vue et pour avoir discuté avec des propriétaires de la version en alu brossé, nous vous conseillons vivement cette option car elle rend la finition plus belle et plus durable.
Avant de partir rouler et pour pouvoir profiter pleinement des capacités du vélo, convertir les pneus en tubeless est un passage obligé. Et ce ne fut pas une mince affaire car le fond de jante d’origine n’est pas étanche et nous avons eu toutes les peines du monde à placer correctement un fond de jante autocollant à cause du profil interne des jantes. Un Duck-Tape et une chambre à air coupée nous ont enfin permis d’arriver à nos fins après plusieurs tentatives. Ouf, on peut commencer l’essai !
Premier constat : le travail sur la suspension arrière se sent directement et le réglage n’a plus rien à voir avec celui du V4 qui nous avait demandé pas mal d’essais et d’erreurs ainsi que l’ajout de spacers pour obtenir un comportement à la hauteur de nos attentes. Ici, on met un poil plus de 30% derrière et pile 30% de SAG devant et c’est parti. La prise en main est hyper naturelle sur notre Meta AM V4.2 en taille L, destiné à nos testeurs qui font entre 178 et 182cm.
Le tube de selle plus redressé a aussi été unanimement salué et dope les capacités au pédalage
Tous nos testeurs ont eu la sensation de retrouver immédiatement leurs repères, avec notamment un poste de pilotage à l’ergonomie très agréable (merci le cintre) ainsi qu’un reach qui n’a rien de démesuré et qui permet de ne pas devoir revoir ses références au niveau des points d’appui. Le tube de selle plus redressé a aussi été unanimement salué et dope les capacités au pédalage de ce beau bébé qui pèse pourtant quasiment 14,5kg !
En le sous-pesant, on ne s’attendait pas à ce qu’il soit aussi à l’aise pour grimper et sur les portions roulantes. On a parlé de l’angle de selle redressé qui place le bassin dans les meilleures dispositions pour pédaler, mais la suspension joue aussi très bien son rôle en ne pompant quasiment pas et surtout en ayant le bon goût de ne pas s’affaisser quand on grimpe de forts pourcentages. Il faut bien charger l’avant car la fourche est haute mais ce trait de caractère lui confère une réelle polyvalence et il n’a rien d’un gros enduro lourdingue au guidon duquel les montées sont de véritables calvaires. Seules les roues, pourtant bien montées et qui font bien le job en descente, ne parviennent pas à cacher un certain embonpoint et restent un peu pataudes.
Bon, même si le « mantra » du Meta est d’être « un vélo de DH qui sait grimper », c’est surtout en descente qu’on attend l’animal. Court et haut de l’avant, le Commencal Meta AM V4.2 est particulièrement joueur et amusant à piloter. Hyper agile dans le serré, très à l’aise dans la pente, il ne demande aussi qu’à s’envoler au moindre appel. Jouissif !
C’est carrément un vélo facile qu’on peut conseiller à un enduriste débutant sans la moindre hésitation
Pas besoin d’être un expert pour s’éclater à son guidon, c’est même carrément un vélo facile qu’on peut conseiller à un enduriste débutant sans la moindre hésitation. Un vrai jouet pour grands enfants, qui parvient aussi à mettre à l’aise au moment d’aborder des passages franchement tendus, même si son cadre court et ses petites roues ne mettent évidemment pas dans les mêmes dispositions qu’une machine comme le nouvel Orbea Rallon 29 » ou un Specialized Enduro 29 par exemple. Ici, il faut plus se battre contre les éléments, mais comme le vélo n’est jamais traître et même si c’est moins efficace, cela rajoute au piment de chaque sortie.
La qualité du travail des suspensions est aussi à souligner. On a une vraie sensation de souplesse, un feeling « plush » qui rappelle un peu celui d’un ressort métallique, sans toutefois consommer trop vite le débattement. Sur cette version à moins de 3000€, les suspensions n’offrent que peu de réglages, mais on va ici à l’essentiel avec un débattement généreux et de la souplesse. Nous avons tout de même dû placer 4 tokens dans la fourche pour garder un peu d’assiette, tout en conservant quelque chose de très souple en début de course et accordé à l’arrière. Un vrai pullman avec une réelle sensation de débattement généreux mais sans effet « bateau », ce qui permet d’aborder les zones les plus accidentées sans la moindre appréhension : le vélo s’occupe de gérer !
Les pilotes plus expérimentés joueront de son hyper maniabilité et la qualité de ses suspensions pour signer des chronos mais ils relèveront par contre clairement que l’arrière est très souple. Ce n’est pas un défaut majeur et c’est même parfois une qualité dans le sens où cela participe au grip du vélo en virages, à sa facilité dans les dévers et dans les portions défoncées où le cadre se donne généreusement pour aider le pilote à conserver sa ligne sans devoir batailler avec un vélo rétif.
Par contre, on s’étonne que des gars comme Barelli ou une « forte femme » au pilotage incisif comme Cécile Ravanel s’accommodent de ce trait de caractère. Pour nous, sans transformer le vélo en barre à mine, un peu plus de rigidité serait vraiment bienvenue et nous pensons que c’est au niveau des points de pivot que cela se joue. Plus particulièrement au niveau de la biellette supérieure dont on peut voir les nombreuses pièces bouger généreusement quand on prend la roue arrière et le triangle avant en mains.
Parmi les autres détails qui fâchent, signalons aussi que nous avons dû resserrer plusieurs fois les axes et que les vis manquent de Loctite d’origine. Puis, il y a aussi la largeur du bras arrière, qui fait qu’on heurte souvent les bases et/ou les haubans à proximité de l’axe de roue arrière. A tel point qu’on en arrive parfois carrément à poser le talon sur la base près de l’étrier de frein ! Enfin, le système de serrage de la roue est plutôt cheap et, même s’il ne s’est jamais desserré lors du test, il ne met pas en confiance. Voilà des points sur lesquels Commencal devra selon nous travailler pour une prochaine évolution.
Verdict
Par rapport au V4, ce Commencal Meta AM V4.2 est clairement plus typé enduro. 10mm de débattement en plus, c’est peu sur le papier, mais s’il ressemble encore beaucoup à son prédécesseur, sur le terrain son comportement est assez différent. Le Meta pédale toujours très bien et c’est tant mieux car sans rien perdre de ce côté, il gagne sur les autres tableaux avec une suspension arrière nettement plus efficace et homogène, bien en phase avec le programme. Son côté « vélo facile » en fait un des rares enduros vainqueurs en EWS qu’on peut conseiller sans équivoque à un enduriste débutant. C’est d’autant plus vrai que les tarifs auxquels le Commencal Meta AM V4.2 est proposé (moins de 3000€ pour cette version) le rendent aussi accessible à beaucoup plus de bourses que la plupart des vraies machines d’enduro au caractère afirmé. Oui, son cadre gagnerait à être plus rigide, la largeur de son bras arrière est gênante et, en noir, la finition du cadre laisse à désirer quand on y regarde de près. Mais l’ensemble proposé par Commencal n’en reste pas moins très séduisant, efficace et attachant grâce à une suspension aujourd’hui parfaitement aboutie et à une géométrie qui met le plaisir au centre des préoccupations. Au final, c’est cela qu’on retient et qui justifie un coup de coeur même si, objectivement, il ne peut pas encore briguer la note maximale et s’il doit son passage de 3,5 à 4 étoiles à son tarif qui le place parmi les meilleures affaires du moment. Et aussi car nous préférons les vélos imparfaits mais de caractère à d’autres plus policés mais qui en deviennent parfois insipides.
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