Test | Cervélo ZFS-5 : confort et performance ne sont pas des antonymes

Après avoir conquis les larges sentiers du gravel et les labourés du cyclo-cross, c’est ensuite vers la sainte terre du VTT que Cervélo a mis le cap. Après une entrée réussie, mais sans artifices, avec son modèle hardtail (cf : Test | Cervélo ZHT-5 : en toute discrétion), le public attendait avec impatience l’arrivée de la marque mythique sur le segment du tout-suspendu !

Milan Vader en personne, sans le confirmer, avait laissé sous-entendre l’arrivée d’un modèle tout-suspendu au sein de la marque originaire de Toronto durant le Roc d’Azur l’année dernière (lire : Interview | Milan Vader (Jumbo-Visma) : prêt pour un nouveau départ !) avant d’être officiellement dévoilé quelques mois plus tard : Nouveauté 2023 | Cervélo ZFS-5 : et le tout suspendu fut. À l’image de Pinarello, Wilier ou encore Factor, le cross-country semble intéresser de plus en plus les grandes marques spécialistes du bitume.

Mettons les pieds dans le plat d’entrée de jeu : ce tout-suspendu de chez Cervélo présente en effet des traits communs avec le Blur, modèle cross-country de chez Santa Cruz. Les deux marques font partie du même groupe (Pon Holdings), et Cervélo a évidemment pu compter sur la grande expérience de la marque californienne dans le monde du VTT. Cette ressemblance se limite toutefois à l’apparence générale, un examen plus attentif permet de pointer diverses différences quant à la construction du cadre, notamment au niveau de la forme des bases et des haubans, mais également du type de carbone utilisé et de la manière de le mettre en oeuvre.

Nous avons eu l’occasion de confronter les deux cousins lors d’un test en face-à-face durant plusieurs semaines afin de pouvoir pointer les différences qui ressortaient (ou non) sur le terrain. Spoiler : les deux châssis ont une personnalité propre et sont loin d’être jumeaux, même si l’on ne peut nier l’air de famille ! Restez attentifs, on vous reparlera plus largement de cette comparaison, dans les moindres détails, durant les prochaines semaines. Pour cette fois, c’est sur le Cervélo ZFS-5 que l’on va se concentrer :

Châssis : 

Comme pour le modèle hardtail de la marque, le ZFS-5 est construit sur base d’un cadre entièrement fabriqué en carbone.

Contrairement à son cousin, le Santa Cruz Blur, le ZFS-5 n’est disponible que dans un seul drapage de carbone. Cervélo n’a pas tenu à développer une version au carbone plus accessible (à l’image du carbone C au sein de chez Santa Cruz) et s’est uniquement concentré sur le développement du cadre le plus léger possible. La marque de Toronto annonce ainsi son cadre nu à 1 472 g (sans amortisseur), ce qui en fait l’un des cadres les plus légers du marché. À titre de comparaison, le Santa Cruz Blur affiche un poids supérieur d’environ 200 g, tandis que le Specialized Epic EVO demeure l’un des ténors de la catégorie, pointant aux alentours des 1700 g comprenant amortisseur, peinture et visserie.

À l’avant, on remarque la discrète présence d’un jeu de direction permettant de faire rentrer directement les câbles et Durits dans le cadre. En plus d’offrir un look plus épuré et soigné, cela permet également d’éviter de devoir percer le cadre, avec les conséquences que cela entraîne sur la rigidité du châssis et sa construction.

Le cadre du ZFS-5 est doté de deux fixations pour porte-bidons au sein du triangle avant, ainsi que d’une fixation supplémentaire sur le bas du top-tube. On notera également la discrète protection de la base arrière au niveau de la transmission ainsi que ce minimaliste anti-déraillement. Des petites attentions soignées, qui même si elles relèvent du détail, ont une importance notable dans l’expérience globale selon nous.

Suspension : 

Comme plusieurs de ses concurrents à l’heure actuelle, le ZFS-5 est disponible dans deux options de suspensions : une version orientée compétition et marathon offrant 100 mm de débattement à l’avant et à l’arrière, ainsi qu’une version plus capable disposant d’une fourche de 120 mm de débattement alors que l’arrière passe à 115 mm de débattement.

Comme pour le Santa Cruz Blur, disponible en version XC ou TR, le cadre du ZFS-5 est le même qu’importe le débattement des suspensions choisi. La différence entre les deux versions se situe au niveau de la course de l’amortisseur arrière (passant de 40 à 45mm) et passe logiquement par un changement de la fourche.

Au niveau de l’architecture de son cadre, Cervélo est finalement resté dans quelque chose d’assez simple avec une suspension à pivot unique et bases flexibles. Même s’il s’agit là du même (ou à tout le moins de son parfait sosie) que celui du Santa Cruz Blur, il nous faut faire une mention particulière pour ce basculeur du plus bel effet grâce à son élégante finition.

Si le montage haut de gamme de la version en 120 mm de débattement est équipé de suspensions Fox, l’ensemble du reste de la famille ZFS-5 est monté en suspensions RockShox. Pour notre version, c’est une fourche SID SL Ultimate ainsi qu’un amortisseur SIDLuxe Ultimate, tous deux offrant deux positions (ouvert/fermé). À ce sujet, nous regrettons que cette version luxueuse du ZFS-5 ne soit pas dotée des dernières suspensions RockShox en date, offrant 3 positions, et qui nous avait tant plu lors de notre test (Test nouveauté | RockShox SID 2024 : quand le mieux est l’ami du bien). Seul le terrain sera le juge de paix face à ce choix de Cervélo !

Géométrie : 

Côté géométrie, le ZFS-5 se caractérise, en taille M, par des bases de 435 mm ainsi qu’un reach de 445 mm en cas de suspensions de 100 mm comme c’est le cas pour notre modèle de test. La version 120 mm voit son reach diminuer de 12 mm pour passer à 433 mm. La marque canadienne explique ensuite que « pour créer un vélo rapide, efficace et équilibré, nous avons opté pour un angle de direction de 67,8° associé à un angle de tube de selle bien redressé, de 76,3°. »

Équipements :

C’est dans sa déclinaison offrant 100 mm de débattement avant/arrière, et dans son montage le plus haut de gamme (XX SL AXS) que nous avons reçu ce Cervélo ZFS-5 pour la durée de notre test.

Le nec le plus ultra se trouve du côté de la transmission avec un groupe Sram T-Type XX SL. De ce côté là, difficile de faire mieux ! (lire : Test | Sram Eagle AXS 2023 : sans égal)

Sram s’occupe également du freinage avec une paire de Level Ultimate Stealth à 4 pistons, associés à des disques flottants Sram CLX centerlock de 160 mm. Pour (re)découvrir notre avis sur cette paire de freins, c’est par ici : Test nouveauté | Freins Sram Level et Code Stealth : changer sans changer

L’ombre de Santa Cruz plane au-dessus des roues de ce Cervélo ZFS-5 puisqu’il est équipé d’une paire de Reserve 28XC ! On ne va pas se répéter, on vous a déjà dit tout le bien qu’on pensait de cette paire de roues lors de notre récent test : Test | Roues Reserve 28 XC : tolérance et performance

Elles sont chaussées de pneumatiques Maxxis Rekon Race en 2,4 de section et carcasse EXO. Petite erreur lors de notre séance photo de ce Cervélo ZFS-5 puisque nous l’avons photographié avec une paire de Maxxis Aspen, qui ne sont pas de série sur ce Cervélo… mais sur son cousin maléfique, le Santa Cruz Blur. Et oui, nous avons joué avec les deux paires de roues/pneumatiques pour tester les deux châssis avec un train roulant identique. 

Du côté des périphériques, le poste de pilotage est un Race Face Next Carbon, avec un cintre en 760 mm de largeur et 10mm de rise, tandis que la potence est une 60 mm. La selle est une Prologo Dimension NDR Nack. Attention, vous pouvez apercevoir une tige de selle télescopique sur ce ZFS-5 mais il n’en est pourtant pas équipé de série… Nous l’en avons doté pour les besoins du test, définitivement persuadé à la rédaction du bien-fondé de la tige de selle télescopique sur ce type de châssis.

Versions et tarifs : 

Comme on l’expliquait plus haut, ce Cervélo ZFS-5 se décline en deux versions, l’une offrant 100 mm de débattement, l’autre étant une version musclée à 120 mm de débattement.

À titre de comparaison, notre modèle d’essai commercialisé à 11299€ s’inscrit dans la lignée de la concurrence. Dans des montages similaires à ce Cervélo ZFS-5 XX SL AXS, le Scott Spark RC WC pointe à 10999€, le Specialzied Epic Pro LTD est à 9000€ (mais équipé d’un groupe XO et non XX), tandis que le Santa Cruz Blur XX AXS RSV en carbone CC ets vendu à 11999€. Attention, contrairement au Cervélo, les 3 châssis précités sont équipés d’une tige de selle télescopique de série…

Cervélo ZFS-5 : le test terrain

Vous vous attendez sûrement à ce qu’on vous parle de rendement en premier lieu avec un tel châssis entre les mains… Pourtant le premier élément qui vient à l’esprit lorsqu’on repense à ce Cervélo ZFS-5, et qui résume également les premières sensations au guidon de ce vélo des différents testeurs, c’est son caractère « tapis volant ». Avec un SAG réglé à 25%, le ZFS-5 procure un confort qu’on retrouve habituellement sur des modèles trail affichant 20 à 40mm de débattement de plus. Le tout-suspendu en provenance de chez Cervélo filtre à merveille les chocs et vibrations, comme si l’on survolait le terrain sur lequel nous posons nos roues.

Cette impression ne se limite pas aux premiers tours de roues. Bien au contraire, elle perdure et se renforce sur les sentiers plus accidentés et lors des sections descendantes de nos parcours de test. Dans les divers passages techniques et franchissements, le ZFS-5 garde une bonne assiette et reste composé… On pourrait franchement croire avoir plus de 100 mm de débattement !

Il faut dire que les roues Reserve 28XC ne sont pas tout à fait innocentes dans ces ressentis ! À la fois dynamiques et tolérantes, elles permettent de pousser le curseur du confort vers le haut, sans perdre pour autant en précision ou en rigidité. Comme on vous l’expliquait récemment lors du test de cette paire de roues, les Reserve s’étaient distinguées par leur capacité à absorber les vibrations et les impacts venus du terrain pour donner plus d’efficacité au vélo dans les passages techniques (lire : Test | Roues Reserve 28 XC : tolérance et performance)

Avec une géométrie pourtant tournée vers l’efficacité, le Cervélo ZFS-5 s’avère être un vélo également très capable… parfois au point de se lancer trop franchement dans des descentes engagées ou sur des sauts dont la réception dépasse largement le programme du vélo et ses 100 mm de débattement. Malgré son plus petit débattement et même s’il ne s’agit pas là du châssis le plus fun de la catégorie, le ZFS-5 s’inscrit bien dans cette ère de cross-country moderne.

La grande sensibilité des suspensions, et de la cinématique, sur la première partie du débattement joue grandement dans ce caractère facile, stable et confortable. Le vélo est agréable à piloter dans la pente, offrant de bonnes sensations et du plaisir de pilotage, parfois absent sur ce type de châssis exclusif.

Avec de telles capacités en descente, ce sont finalement les freins Sram Level Ultimate qui nous rappellent qu’on se trouve sur une « petite machine » et qu’il serait question de ne pas trop pousser le curseur vers le haut.

Ce confort et cette efficacité, on les retrouve également lorsque la pente devient montante ! Les relances sont très franches et le vélo pédale particulièrement bien au train, offrant une position efficace que l’on peut tenir pendant un bon bout de temps. Le vélo est taillé pour la compétition et cela s’en ressent, aucun watt n’est perdu dans la bataille ! Cette fois-ci, ce n’est pas par le confort des suspensions que l’on se sent voler, mais par notre facilité à imprimer un rythme important.

Malheureusement, nos craintes quant à l’absence d’une position intermédiaire au niveau des suspensions vont se concrétiser. Sur les montées plus techniques, où la position bloquée ne permet pas d’offrir le grip nécessaire, la position ouverte demeure la seule option. Mais celle-ci mène à devoir composer avec un vélo ayant tendance à s’affaisser. Résultat ? Le pédalage n’est plus aussi incisif et on perd du rythme au niveau du pédalage, véritable clé pour venir à bout de certaines ascensions techniques ou montées sur sols humides.

Il convient également de rappeler que le Cervélo ZFS-5 est un vélo imaginé et destiné pour la compétition. Si, comme nous vous l’avons expliqué quelques lignes plus haut, il offre beaucoup de confort, il demeure toutefois un châssis exigeant à piloter, et parfois même « capricieux ». À basse vitesse, c’est un vélo qui se manie sur des oeufs, et sur lequel il est nécessaire d’avoir une attention de tous les instants… comme en course.

C’est également un trait de caractère que l’on peut retrouver lors des plus longues descentes cassantes : le ZFS-5 est le bon compagnon tant qu’on est dans le coup, mais sur lequel il ne faut pas compter en cas d’erreur. Le cadre de ce Cervélo n’est pas taillé pour pardonner les erreurs, et l’avant du vélo peut s’avérer un peu usant, en raison de cette nécessité de le placer correctement et du poste de pilotage assez rigide.

Cervélo a définitivement rempli sa mission : créer un vélo rapide et capable, permettant à ses athlètes de performer sur la scène internationale. Mais la marque canadienne a toutefois réussi bien plus que cela, puisqu’en plus de mettre sur pied un vélo compétitif, le ZFS-5 s’avère être un châssis ayant de la personnalité, agréable à piloter et définitivement confortable. Avec une géométrie contemporaine permettant de rapidement se sentir en confiance, le ZFS-5 s’avère précis et capable, même pour le commun des mortels dont nous faisons partie. Nous regrettons toutefois l’absence d’une position intermédiaire au niveau du blocage des suspensions, conduisant à un comportement trop souple dans les montées techniques… Dommage ! Disponible dans deux versions de suspensions (100 ou 120mm), cette version testée se veut la plus légère et efficace, mais également la plus exigeante à piloter. Il s’agit d’un vélo taillé pour la course, il ne faut pas complètement l’oublier ! 

Pour plus d’informations : https://www.cervelo.com/fr-FR/bikes/zfs-5