Test | BMC Fourstroke 01 : le haut du panier
Par Olivier Béart -
Très en vue en compétition aux mains de quelques-uns des meilleurs pilotes mondiaux, dont Jordan Sarrou et Titouan Carod, le BMC Fourstroke nouvelle mouture est un VTT taillé pour le XC pur et dur… mais qui en fait a plus d’un tour dans son sac ! Nous avons passé plusieurs mois à son guidon cette saison, voici notre test complet :
Nous avons déjà eu l’occasion de vous présenter en détails les grandes spécificités et la conception du nouveau BMC Fourstroke dans cet article réalisé suite à une première prise en main. Nous allons revenir ici sur quelques-uns des points marquants, mais nous allons surtout nous concentrer sur nos impressions au guidon, acquises sur plusieurs mois et au fil des passages entre les mains de plusieurs de nos testeurs pour des usages très variés allant de la compétition au voyage au long cours ! Car, oui, cette machine a plus d’une corde à son arc !
Châssis
Avec 2130g annoncés, en ce compris l’axe de roue arrière, la patte de dérailleur et le blocage de suspension, le BMC Fourstroke ne bat pas de record, mais il se place dans la moyenne des cadres XC légers… et surtout il ne fait aucune concession aux côtés pratiques qui rendent la vie en sa compagnie plus agréable.
Nous parlerons plus loin de sa suspension, qui ne fait pas l’économie de points de pivots pour gratter quelques grammes, mais on pense par exemple au passage des câbles et gaines, entièrement guidé à l’intérieur pour faciliter les opérations de maintenance. Un point sur lequel on voit qu’il n’y a pas que les pilotes du team qui ont été écoutés lors de la conception, mais aussi les mécanos. Nous avons eu l’occasion de tester un changement de câble et gaine de dérailleur et, en effet, l’opération se passe sans prise de tête.
Parmi les détails intéressants « dans la vraie vie », même s’ils coûtent aussi quelques grammes sur la balance, on pense également au jeu de direction qui intègre deux butées afin d’éviter que le cintre ou le bas de la fourche ne puisse entrer en contact et endommager les tubes diagonal et supérieur. On rencontre ce genre de système dans d’autres marques, mais sa présence mérite à chaque fois d’être soulignée.
Enfin, signalons qu’au niveau du layout des couches de carbone et du choix des fibres utilisées, BMC a voulu jouer non pas la carte de la rigidité à tout prix, mais plutôt du bon compromis dans le but de donner la sensation d’avoir un vélo dynamique, qui rend l’énergie et qui accélère au moindre coup de pédale.
La tige de selle télescopique intégrée
Impossible de passer à côté, et elle mérite bien un chapitre à elle seule : la tige de selle télescopique fait partie intégrante du châssis sur le nouveau BMC Fourstroke ! C’est beau, c’est épuré, mais cela permet aussi de gagner entre 80 et 100g par rapport à une tige de selle télescopique classique placée sur un cadre lambda.
Beaucoup de marques renoncent à équiper leurs vélos d’une tige de selle télescopique intégrée simplement pour ne pas avoir un accessoire aussi sensible sous leur responsabilité en cas de problème. Chez BMC, on a choisi de se jeter à l’eau…
On ne peut que saluer le travail de BMC sur ce point et aussi quelque part son « courage » car beaucoup de marques renoncent à s’engager dans cette voie simplement pour ne pas avoir un accessoire aussi sensible sous leur responsabilité en cas de problème. Chez BMC, on a choisi de se jeter à l’eau, tout en prenant une série de précautions pour éviter les ennuis.
On est donc face à un système entièrement mécanique, fonctionnant avec une cartouche d’air à basse pression, très simple et épuré pour minimiser les sources d’ennuis potentiels, et assurer un fonctionnement souple et fiable. A l’usage, au cours de nos 6 mois de test, on peut dire que ce dispositif a rempli sa mission et s’est montré d’une fiabilité parfaite. Tout coulisse toujours parfaitement malgré de nombreuses sorties dans la boue et le système fonctionne comme au premier jour.
La forme ovalisée du tube, qui évite les rotations, est aussi appréciable quand on règle la hauteur de selle (une opération simplissime, pour laquelle il suffit de desserrer une petite vis sur le cadre) puisque tout reste toujours parfaitement aligné. Cette forme ovale évite aussi la présence de jeu latéral et cette tige de selle donne l’impression de rouler avec un modèle classique (non télescopique) quand elle est en position relevée. Enfin, la manette au guidon est simple et ergonomique.
BMC a aussi présenté cette année un système permettant de faire descendre la tige de selle toute seule sans devoir mettre le poids du corps dessus : l’Auto Drop. Il ne s’agit encore que d’un prototype testé par les pilotes du team, mais la sortie en série est bien envisagée par la marque et ce système sera rétro-compatible avec les cadres existants. Nous ne l’avons pas encore testé, juste vu sur certaines coupes du monde, mais c’est toujours bon à savoir que ce genre de chose devrait arriver par la suite. (Voir ici pour plus d’infos)
Suspensions
BMC reste fidèle à son concept de suspension APS, même si ce n’est sans doute pas le meilleur moyen de gagner du poids pour faire un cadre qui bat des records sur la balance. Mais la marque a voulu privilégier le grip et les performances pures en conservant tous les pivots sur roulements et en n’ayant pas recours à la déformation du carbone comme sur beaucoup d’autres fulls de XC du moment. « Nous ne voulions pas un vélo avec une géométrie très contemporaine, qui soit ensuite bridé par une suspension en retrait », justifient les concepteurs.
La suspension APS, c’est un triangle arrière d’une pièce, relié à l’avant par deux biellettes ; une près du pédalier et l’autre plus haut pour comprimer l’amortisseur. Toutes deux ont été rigidifiées et allégées (on parle de plus de 100g) par rapport à la génération précédente. Il s’agit d’une cinématique propre à BMC, qu’on retrouve sur l’ensemble de la gamme suspendue et qui développe ici 100mm de débattement. Au-delà de l’anti-pompage, un gros travail a été fait sur le grip, car il est synonyme d’efficacité si on peut pédaler sereinement, y compris quand le relief du sol est tourmenté.
Pour l’amortisseur comme pour la fourche, BMC fait confiance à Fox. A l’avant, c’est la très légère F32 StepCast qui prend place, en version Performance Elite comme pour l’amortisseur. Cela signifie qu’à l’intérieur tout est identique aux modèles Factory haut de gamme mais qu’on n’a pas droit au traitement Kashima des plongeurs. Pas vraiment grave, sauf pour le prestige, même si vu le tarif on aurait pu imaginer avoir le top du top. On retrouve un double blocage des suspensions au guidon. Petite originalité : ce blocage est un DT Swiss, de conception assez ancienne, mais toujours très agréable à manipuler. Et surtout, il offre trois positions, dont une intermédiaire bien utile en côte et sur le plat roulant mais un peu chaotique, où une compression freinée mais pas complètement bloquée prend tout son sens.
A noter aussi qu’il y a un petit témoin de SAG au niveau de la biellette, bien pratique pour régler facilement sa suspension les premières fois. On apprécie aussi la présence d’une petite protection efficace pour protéger la biellette inférieure des impuretés. Après plusieurs mois, l’ensemble est resté propre et ce n’est pas trop difficile à nettoyer même s’il y a bien parfois quelques saletés qu’il faut aller décrocher avec un peu plus d’effort. Mais rien de dramatique.
Géométrie
La géométrie a été un des points les plus importants sur lesquels les concepteurs de cette nouvelle génération de BMC Fourstroke ont travaillé. Comme nous l’avons expliqué lors de la présentation du modèle, l’idée est à la fois de faire pivoter le corps du pilote vers l’avant et vers le bas pour obtenir une position XC plus agressive et le meilleur rendement possible, avec aussi un bassin bien vertical grâce à un tube de selle redressé… tout en gardant un comportement sain et incisif pour attaquer en descente grâce à la présence d’un angle de direction très ouvert et d’une tige de selle télescopique intégrée. Vaste programme, et nous verrons plus loin si le contrat est rempli.
Au niveau des chiffres, cela se traduit par une douille de direction très courte, un reach allongé de 15mm en moyenne sur les différentes tailles, des potences plus courtes (signalons d’ailleurs qu’il s’agit d’un très beau modèle maison, au design épuré), une fourche à déport court, et des bases elles aussi raccourcies à 429mm (un chiffre record pour un full en 29″). Bref, quelque chose de bien dans la tendance, et même d’assez radical pour le segment. Pour vous donner une idée, c’est plus agressif que les Agonist et Speedfox pourtant plus orientés All-Mountain !
Equipements, versions et tarifs
Pour 2020, le châssis n’a pas changé, les suspensions et les roues DT Swiss 1501 non plus. Bref, les fondamentaux qui peuvent influencer le comportement du vélo sont inchangés. Mais BMC a décidé de ne plus mettre que du Sram sur toute sa gamme Fourstroke. Exit donc le Shimano XTR de notre version 2019 de test, et nous ne nous étendrons donc pas beaucoup plus sur les performances du groupe, dont vous pouvez retrouver un test complet ici.
La gamme 2020 se résume à trois modèles, plus le cadre seul. Il y a le One qui ose la peinture dorée pour le haut de gamme, monté en Sram XX1 Eagle AXS, freins Sram Level Ultimate et roues carbone DT Swiss XRC 1200 Spline en 25mm de large. Vient ensuite le Two qui mixe Sram GX et XX1 Eagle avec un pédalier carbone, ainsi que des roues DT Swiss 1501 en alu. C’est celui qui se rapproche le plus de notre modèle d’essai. Et enfin le Three qui joue le rôle de modèle d’accès avec un groupe Sram NX Eagle et des roues maison à moyeu Shimano Deore.
Et les prix ? Vous voulez vraiment qu’on en parle ? Parce que, autant vous prévenir, ça risque de tendre un peu l’atmosphère alors que jusqu’ici tout semblait vraiment rose. Bon, allons-y : le Three est facturé 4999€ malgré son montage un peu juste sur papier par rapport au châssis, le Two est à 6999€ et le One à 9999€. Finalement, c’est le One qui s’en sort le mieux par rapport à la concurrence dans les versions très haut de gamme. Ainsi, à titre d’exemple, Scott sort un Spark RC Team Issue avec dérailleur Sram AXS à 4999€ et un RC World Cup doté de roues carbone à 5999€. Même Specialized fait mieux (de peu) en rapport prix/équipement avec son Epic, et ne parlons même pas de marques comme de vente directe comme Rose dont le Thrill Hill sort à 6999€ en AXS et roues DT carbone, et dès 2599€ avec un montage similaire au BMC Fourstroke 01 Three. Bon, ok, aucun d’eux n’a une belle tige de selle télescopique intégrée, mais tout de même. Signalons aussi la disponibilité en cadre seul à 3999€.
Voyons maintenant sur le terrain si le BMC parvient à justifier son tarif élitiste…
BMC Fourstroke 01 : le test terrain
Malgré le travail sur la géométrie pour placer le poids plus en avant et avoir une position plus agressive, le premier contact avec le nouveau Fourstroke n’a rien d’extrême. Les appuis sont équilibrés et la fameuse attitude « nez dans le guidon » dont on parlait souvent du temps du 26″ n’a décidément plus cours aujourd’hui. En taille M, c’était en tout cas parfait pour nos testeurs entre 175 et 180cm. Quant au réglage de la suspension, il est plus facile que sur la précédente version. On peut se permettre de mettre 25% de SAG sans avoir une suspension manquant de réactivité ou trop sensible au pédalage.
D’emblée, la sensation de légèreté est bien présente. Il accélère sans se faire prier et dégage une impression de dynamisme tout à fait évidente. Ce n’est pas une bombe comme un Specialized Epic ou un Cannondale Scalpel, mais ça envoie sévère. On est plus sur quelque chose entre le Spark et le BH Lynx Race, des fulls très performants, mais qui ne misent pas tout sur le rendement pur et qui jouent aussi la carte de l’aisance dans le technique, voire même du confort comme facteurs de performance.
Nous avons eu l’occasion d’emmener le BMC Fourstroke dans les Alpes Suisses et dans le Massif Central en plus de la Belgique, et dans les longues ascensions, la sensation de légèreté qu’il dégage, ainsi que la neutralité de sa suspension au pédalage sur les grands chemins sont de véritables atouts. On oscille entre la position bloquée et intermédiaire de l’amortisseur, et on obtient un magnifique compagnon pour avaler de grands dénivelés.
En descente, c’est aussi un véritable festival. La géométrie fait merveille, le vélo est équilibré et stable grâce à ses suspensions efficaces et à sa géométrie, mais il sait aussi se montrer joueur et vif dans les changements de direction. Il aime aussi qu’on le fasse jumper au-dessus des obstacles, on fait facilement basculer le poids du corps sur l’arrière pour asseoir le vélo sur sa suspension et son pilotage est une pure jouissance.
C’est vrai dans le très technique, mais ça l’est aussi sur des chemins plus faciles. Il faut un peu de temps d’adaptation et faire preuve d’un peu de poigne, mais quand on l’a apprivoisé, il devient aussi d’une grande efficacité et très gai à piloter dans les petits singles plats, rapides et sinueux. Pour les pilotes plus lourds et si on habite dans une région à fort dénivelé, la Fox F32 pourra montrer ses limites dans les appuis et les descentes les plus techniques, tant le châssis est précis et la suspension arrière aussi efficace qu’onctueuse. Une F34 SC, éventuellement en 120mm pourrait selon nous aussi très bien avoir sa place à l’avant de cette machine. bon point par contre pour les roues. Même si des modèles en carbone auraient été plus légers et encore plus dynamiques, les DT 1501 alu sont homogènes et un bon prolongement du Fourstroke. Quant aux pneus Vittoria Barzo, ils sont polyvalents et peu gourmands en énergie mais nous préférons un Mezcal à l’arrière.
Dans la pente, mais pas que, la tige de selle intégrée du BMC est un plaisir à manipuler. Le débattement de 80mm suffit amplement sur ce type de machine et on ne peut rapidement plus s’en passer. Elle a fait partie intégrante du développement du nouveau BMC Fourstroke et cela se sent. Bravo.
Autre qualité marquante de ce BMC Fourstroke, c’est son aisance en côte. Avec des bases aussi courtes, on aurait pu craindre de manquer de grip, ou que le vélo soit délicat dans les ascensions raides et techniques, mais il n’en est rien. C’est même un véritable cabri et, tant que vous avez de la force dans les jambes, il vous aidera à grimper et à faire passer le maximum de puissance au sol. C’est tout simplement un des meilleurs XC du moment en la matière.
Ce comportement à la fois sain et ludique en descente, sa légèreté et son rendement, le grip qu’il procure dans les ascensions ainsi que le vrai confort de roulage qu’il procure : tout cela contribue au final à faire du Fourstroke un vélo qui n’est pas réservé qu’au XC pur et dur, mais aussi un excellent marathonien, ainsi qu’un très bon randonneur sportif qui pourra plaire et donner beaucoup de plaisir à des bikers moins entraînés mais qui ont envie de se faire plaisir avec un très beau vélo similaire à celui roulé par les pros. Le Scott Spark est aussi de cette même veine, le BH Lynx aussi, mais cela reste rare d’avoir des vélos qui parviennent à séduire des pilotes de top niveau et des riders comme vous et moi. Le grand écart est très difficile à réussir et ce Fourstroke est sans aucun doute un de ceux qui le réussissent le mieux.
Au final, lui avons-nous trouvé des défauts à ce BMC Fourstroke ? Eh bien non, pas vraiment, et nous avons pourtant eu plusieurs mois pour chercher, avec plusieurs pilotes qui se sont succédé au guidon. Le seul point qui fait mal et sur lequel on pourrait vraiment bloquer, c’est le rapport équipement/prix. Attention, on n’a pas dit qualité/prix, car la qualité de l’ensemble est plus qu’au rendez-vous ! Mais le tarif de ce Fourstroke est clairement au-dessus de la concurrence et même s’il a de sérieux arguments à faire valoir sur le terrain, il risque de rebuter une partie de son public à cause de cela.
Verdict
Concevoir un vélo de XC très performant et actuel : le contrat est rempli. Mais, sans peut-être vraiment le vouloir, les développeurs de chez BMC ont fait beaucoup plus. Ils n’ont pas juste fait une bête de course, ils l’ont aussi rendue accessible pour vous et moi. Pour qu’on puisse se prendre pour des champions et, au final, pour qu’on ait une énorme banane après chaque sortie. Sur de nombreux points, ce BMC Fourstroke 01 nous a rappelé le Scott Spark qui demeure à nos yeux encore aujourd’hui une référence. Mais après avoir longuement roulé le BMC, nous le disons sans hésitation : le Fourstroke nous a encore plus séduits que le Scott. C’est un peu le même genre, mais avec une géométrie encore un peu plus actuelle, une suspension encore un poil plus efficace, une tige de selle télescopique intégrée particulièrement aboutie et qui donne un coup de vieux à tous ces autres modèles qui n’en sont pas équipés. Mais voilà, tout cela a un prix et malgré toutes ses qualités, c’est votre portefeuille qui risque de dire non et de vous obliger à partir sur un autre modèle, peut-être pas tout à fait aussi performant et abouti, mais nettement plus accessible. Si BMC parvenait à baisser un peu ses prix, il y aurait moyen de faire un carton…
BMC Fourstroke 01
6999€ (modèle TWO 2020)
10,45kg(taille M, sans pédales, pneus tubeless)
- Châssis hyper abouti (géo, suspension,...)
- Tige de selle télescopique intégrée
- Hyper performant mais malgré tout accessible
- Tarifs salés
- Rapport prix/équipements (versions Two & Three 2020 surtout)
- RAS
Évaluation des testeurs
- Prix d'excellence
- Coup de coeur
- Rapport qualité / prix
Plus d’infos sur le site de la marque : https://fr-fr.bmc-switzerland.com/models/mountain/fourstroke.html
Et dans notre article de présentation complète du modèle : https://www.vojomag.com/test-nouveaute-bmc-fourstroke-2019-radical-en-toute-discretion/