Rencontre | Dangerholm : une bike-star à l’Eurobike !
Par Olivier Béart -
Difficile d’ignorer sa présence sur le stand Scott à l’Eurobike 2022 : Gustav Gullholm, alias « Dangerholm », nouveau gourou du VTT ultra léger, exposait ses dernières réalisations. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que le bonhomme est populaire, à en juger par les attroupements quasi permanents devant ses machines allégées à l’extrême et au look aussi flamboyant que celui de leur géniteur. Extrêmement disponible pour poser avec ses fans, signer des autographes et donner de bons conseils pour alléger sa monture, il a trouvé quelques minutes pour nous accorder une petite interview.
Nous avons profité de sa présence sur le stand Scott à l’Eurobike pour prendre quelques minutes avec lui en mode « fast interview », histoire d’en savoir un peu plus de cet homme dont nous avons déjà montré certaines réalisations sur Vojo et que nous suivons assidument sur Instagram, mais que nous n’avions jamais rencontré en chair et en os.
Gustav, qu’est-ce que cela fait de voir que tu as autant de popularité ? Tu es la rockstar de cet Eurobike !
« Je ne m’y attendais pas du tout. Tu sais, je suis un gars de la campagne, qui vit dans un petit village en Suède. Je ne suis pas habitué à la foule, et je passe beaucoup de temps seul sur mes vélos. Les réseaux sociaux c’est une sorte de fenêtre sur le reste du monde pour moi. Mais les likes et les followers sur Instagram, cela reste juste des chiffres. Ici, j’ai été vraiment très surpris, et même ému de voir que les gens viennent me voir, demandent pour que je prenne des photos avec eux, me demandent des conseils pour améliorer leur vélo. C’est assez incroyable et tout à coup, tout cela devient réel ! Ma petite notoriété est assez récente et avec la crise sanitaire, je n’avais pas encore eu l’occasion de m’en rendre compte. »
Tu es sur le stand Scott, ils te soutiennent, et pourtant tu fais parfois des choses pas très orthodoxes avec leurs vélos ! Et clairement des choses qui font sauter la garantie !
« Oui, c’est vrai que je me lance parfois dans des modifications un peu… extrêmes, comme pour ce qui est de retirer la peinture. Mais Scott ne s’immisce pas là-dedans. Au départ, je n’avais rien à voir avec Scott. J’appréciais leurs vélos car ils sont toujours très légers, avec de bonnes géométries et un design qui constituent de bonnes bases pour mes projets. C’est en voyant ma fidélité à la marque, le type de projets uniques que je développe, et que mes réalisations avaient un peu de succès que Scott est venu vers moi. C’est une chouette relation, ils me soutiennent, m’offrent des opportunités d’exposer sur leur stand à Eurobike, mais sans me mettre de contraintes. Je suis un peu comme un artiste invité. »
Justement, il n’y a pas que les détails techniques et la légèreté qui comptent sur tes vélos. Ce sont aussi des projets avec une dimension esthétique…
« Pour moi, tout compte. Je prends chaque projet comme un tout, je réfléchis à un concept global, qui allie technique et esthétique. Souvent, les deux se rejoignent car parfois je laisse mes vélos sans peinture ou, quand je les repeins, je fais attention que cela entraîne le surpoids le plus limité possible. Chez Scott, les peintures sont légères, de l’ordre de 90g de plus par rapport à un cadre nu. Mais j’ai déjà vu que cela montait à plus de 200g chez certaines marques. Pour moi, cela n’a pas de sens d’aller dépenser de grosses sommes pour un dérailleur 50g plus léger, tout en gardant une peinture lourde qui n’apporte rien sur le plan mécanique. »
On t’a vu gratter la peinture en direct devant le public tout à l’heure, et leur montrer ta technique. C’est vraiment quelque chose que tu penses qu’on peut montrer ?
« Bien sûr, car il vaut mieux que les personnes sachent comment bien le faire, que de se lancer dans l’inconnu. Ceux qui veulent le faire le feront de toute façon, et ce sera toujours une petite minorité. Alors autant que je puisse leur faire profiter de mon expérience pour qu’ils ne refassent pas les mêmes erreurs. Quant aux autres, ils ne se lanceront probablement jamais, mais ils auront appris quelque chose et vu quelque chose d’original. En passant, quand je vais garder une finition en carbone nu, j’utilise un couteau qui permet de vraiment bien contrôler ses gestes, sa force, et de ne retirer que la peinture. Si je repeins le vélo, je passe au papier de verre sur la fin pour une meilleure accroche de la nouvelle peinture. Il y a plus de risques d’aller trop loin avec du papier de verre qu’avec un couteau. Et dans tous les cas, jamais de machine, tout à la main ! Le seul point délicat, c’est le vieillissement du carbone nu avec les UV. Il faut faire gaffe au stockage du vélo surtout. Ou mettre un fin vernis protecteur. »
Tu présentes plusieurs vélos sur cet Eurobike : ton Gambler DH 29 à 13,42kg qui avait déjà été vu par ailleurs (ci-dessus), et puis deux Spark, un RC et un 900. Explique-nous un peu ce que tu as fait dessus…
« J’ai reçu deux cadres Spark, et j’ai dû concrétiser ces deux projets dans un délai très court d’à peine plus d’un mois. Le premier est un 900 Tuned dont la déco est inspirée par Ironman et qui a pour but de montrer les produits du fabricant allemand de freins Trickstuff ». (Voir ci-dessous)
« Le but est de faire un vélo où on va chercher à gratter les grammes là où c’est possible, tout en gardant de vrais gros pneus solides et bien cramponnés et une fourche Intend en 130mm de débattement. Vous remarquerez aussi les manivelles, qui sont un prototype en titane imprimé 3D. »
Et sur le Spark RC ?
« Là j’ai poussé le travail un peu plus loin, avec non seulement une peinture très légère qui reprend uniquement la partie avant, quand l’arrière est laissé nu, et pas mal de composants polis et/ou fortement modifiés. J’ai vraiment voulu garder l’esprit d’un XC moderne, en 120mm de débattement avant/arrière avec des jantes larges, des pneus en 2.4 et un dropper post (le nouveau modèle des Suisses de Yep). Mais j’ai aussi voulu faire une rencontre avec le lighweight oldschool qui était assez extrême. »
« J’ai notamment mis des roues hyper légères, avec des jantes Müller Radsporttechniek et des moyeux Extralite qui me permettent d’arriver à 1035g la paire de roues avec des jantes en 30mm. »
« A l’avant, je suis très honoré d’avoir pu disposer d’une des premières fourches Intend Samuraï, développées par mon ami Cornelius. Elle pèse moins de 1400g en 120mm, et elle est très rigide. »
« J’aurais pu gratter un peu de poids au niveau du poste de pilotage, mais pour moi l’ensemble Syncros fait intimement partie du Scott Spark et je n’ai pas voulu changer. Je trouve que Syncros fait vraiment du bon boulot, parfaitement dans la philosophie de Scott. J’ai aussi tenu à garder le blocage Twinloc des suspensions, qui fait aussi pour moi vraiment partie du vélo. »
« Au niveau de la transmission, j’ai une paire de manivelles Garbaruk prototype en alu. Et je suis resté sur une transmission mécanique. J’aime beaucoup le fonctionnement du Sram AXS, que j’aime combiner avec les commandes Zirbel très discrètes, mais le dérailleur AXS est très massif, plus difficile à alléger, et j’aime aussi toujours le côté plus épuré du mécanique au niveau du dérailleur. Qui a aussi été modifié avec des pièces carbone et une cage alu custom. Au final, j’arrive à 9,19kg ! »
Et ce n’est pas un vélo de salon car ceux qui suivent ta page Instagram savent que tu roules vraiment avec tes vélos…
« Là, je n’ai pas encore vraiment eu le temps de rouler avec les deux Spark avant de venir à l’Eurobike, mais oui, je fais des vélos pour rouler. J’aime la DH (j’ai d’ailleurs pas mal roulé avec le Gambler à 13,4kg), j’ai fait du BMX donc j’aime aussi les sauts et pour moi un vélo n’est pas juste un bel objet ou une sculpture. Donc oui, je fais toujours des vélos dans le but qu’ils soient à la fois beaux, légers et performants. »
Pour finir, quels sont les bons conseils que tu pourrais donner à une personne qui veut se lancer dans l’allègement de son vélo ?
« D’abord, faites un diagnostic de votre vélo, pour savoir quelles pièces sont plutôt légères ou plutôt lourdes. Cela va vous permettre de définir les priorités. Après, c’est un grand classique mais c’est vrai : commencez par les roues car c’est là que chaque gramme gagné va le plus se sentir. Et quand je dis les roues, je parle aussi des pneus. Ne prenez pas nécessairement les pneus les plus légers du marché, ils doivent rester roulables et cohérents avec votre pratique, mais par contre, essayez de trouver le modèle le plus léger parmi ceux qui vous conviennent. Puis, pesez les pneus d’un même modèle et d’une même marque avant de les acheter. Vous verrez qu’il peut y avoir jusque 50g de différence juste avec les tolérances de production. C’est un moyen simple et pas cher de gratter du poids. Un autre point auquel on pense peu, c’est la selle et la tige de selle. Or, c’est du poids situé très haut sur le vélo, et qui va donc rehausser le centre de gravité. J’ai toujours eu l’impression de gagner en maniabilité et en agilité du vélo avec un ensemble selle/tige de selle léger. Même si on utilise un dropper post, qui est devenu un must, cela n’empêche pas de chercher à alléger ce poste. »
Pour suivre Dangerholm et découvrir plus de détails sur ses nouveaux vélos/projets, dont les deux Spark dont nous avons parlé ici, rendez-vous sur sa page Instagram.