Prise en main | Cannondale Habit 2019 : de retour métamorphosé
Par Paul Humbert -
On aurait pu titrer « Cannondale ressort l’Habit » ou « l’Habit est dévoilé » mais passé les jeux de mots (qu’on ne s’est tout de même pas privé de faire), nous aurions occulté le point le plus important: le Cannondale Habit 2019 est complètement métamorphosé. L’Habit ne fait pas le moine, nous répondrez-vous. Peut-être, mais découvrez malgré tout la dernière génération de ce modèle rail/all-mountain que nous avons pu prendre en main le temps d’une journée :
Dévoilé en 2016 comme une déclinaison d’un vélo de cross-country s’ouvrant la porte du fun, l’Habit s’équipait alors de roues de 27,5 pouces… ce qui avait eu du mal à l’insérer dans un segment qui plébiscitait déjà majoritairement les grandes roues.
Côté cinématique, on pourrait croire à une simple itération de ce que Cannondale propose avec le Jekyll et le Trigger, mais il n’en est rien. C’est d’ailleurs une première pour Cannondale, qui conçoit son Habit 2019 avec une cinématique « 4 Bar linkage » de type « Horst-Link ». Cette cinématique multi-pivot est identifiable notamment par l’axe de la roue arrière situé sur les haubans (et non sur les bases, comme pour les Trigger ou Jekyll). Cette proposition permet de conserver une suspension très active au freinage, sensible en début de course, puis bien plus progressive. Sur le papier, on est assez proche d’un autre vélo à succès, le YT Jeffsy (que nous testions ici : www.vojomag.com/test-yt-jeffsy-29-cf-one-coup-de-coeur-sur-les-sentiers/ ).
L’autre grosse nouveauté proposée par Cannondale, c’est l’adaptation de la cinématique à chaque taille de cadre, partant du principe qu’un ou une pilote de petite taille et plutôt léger ne bénéficiera pas de la même courbe de progressivité qu’un pilote de très grande taille et bien plus lourd. Un pilote de 55 kilos bénéficiera ainsi d’une suspension plus linéaire alors qu’un VTTiste affichant 95 kilos recherchera, lui, bien plus de progressivité. Ces différences sont également très sensibles au pédalage ou au freinage.
Adapter un cadre de la taille S à la taille XL est un véritable casse-tête si on souhaite conserver des caractéristiques identiques (et des accessoires, comme l’intégration d’un bidon). On peut commencer par jouer sur les réglages internes de l’amortisseur, mais Cannondale va plus loin. Sur cet Habit, le point de pivot principal va évoluer, tout comme les valeurs d’anti-squat et d’anti-rise, afin de proposer un comportement adapté à chaque taille et poids. La position des autres points de pivot s’adapte également pour offrir un travail de la suspension jugé optimal par la marque. Cannondale tire de cette contrainte un véritable argument de vente en collant à tous les profils de VTTistes, hommes ou femmes, et on salue l’initiative.
Ces choix faits par Cannondale ont été mis en pratique par Luis Arraiz, qui a pu nous présenter son idée baptisée « Proportionnal Response » et qui vient influer sur l’emplacement des pivots de suspension. C’est, pour lui, un bénéfice majeur pour les VTTistes situés aux « extrêmes ». L’option non-retenue qui consiste à ajuster la longueur des bases (ce qui est une option choisie par des marques concurrentes) est bonne, mais le gain lui semble incrémental par rapport à la solution qu’il propose avec Cannondale. L’évolution des centres de gravité du vélo et du pilote, en fonction du rider et du terrain, a été au centre de toutes ses réflexions, et c’est pour lui le point clé : un pilote est tout le temps en mouvement et le travail de la suspensions dépendra également de la manière dont on est posé sur un vélo. Adapter la courbe d’amortissement à la taille et au poids du pilote se révèle donc un gros pas en avant.
Côté géométrie, le vélo est disponible du XS au XL. Les bases affichent 435mm de long, l’angle de direction est de 66 degrés et le reach en taille M est de 430mm.
Ce Cannondale Habit a été très clairement optimisé pour le 29 pouces mais il reste adaptable au 27,5 Plus via le basculement d’un petit « flip chip ».
Côté construction, le Cannondale Habit se décline soit tout en carbone, soit en carbone et aluminium, soit tout en aluminium. Dans tous les cas, la biellette est en aluminium.
Cannondale équipe sa gamme avec des amortisseurs Fox mais aucun d’entre eux ne propose la technologie « Gemini », qui propose une variation du débattement. Le vélo a été jugé suffisamment bon pédaleur sans cette option, qui conviendra mieux aux grands débattements. On nous conseille d’ailleurs de régler le vélo avec un SAG de 25%.
Les passages de gaines et de câbles sont entièrement guidés en interne afin de permettre un entretien facile.
Un bidon trouvera également sa place sur tous les modèles.
Une application lancée par la marque permet, une fois votre vélo scanner, de bénéficier de technologies de réalité augmentée pour découvrir les entrailles de la machine : les passages de câbles, les plans « éclatés » du montage des biellettes et roulements, ou encore les couples de serrage, vis par vis.
Le cadre peut accueillir des pneus jusqu’à une section 2,6. L’ensemble du vélo a été bodybuildé et on retrouve des freins 4 pistons et des pneus costauds.
Dans la gamme, on compte 6 modèles qui seront disponibles entre novembre et décembre 2018. Deux modèles en aluminium (Habit 4, 5) s’échangent à 2299€ et 2799€.
Les trois modèles (Habit 3, 2, 1) en carbone sont vendus à 3799€, 4999€ et 6999€.
Un modèle « femme » (Habit Wmn 1) est disponible en trois tailles : XS en 27,5 Plus et M, L en 29 pouces pour 3799€.
Prise en main : Cannondale Habit Carbon 2
Direction Freiburg, en Allemagne, et le bureau des ingénieurs de la marque en Europe. Chose amusante, c’est au même endroit que nous découvrions la première version du Habit il y a deux ans. Le cadre est le même mais c’est sur des sentiers bien différents que nous allons tester la machine. Nous sommes équipés du Cannondale Habit Carbone 2, qui offre un triangle avant en carbone et un triangle arrière en aluminium pour la modique somme de 4999€.
Cannondale opère une réelle transformation dans son identité visuelle et nous sommes instantanément charmé par ce vélo qui a tout d’un « playbike ». La géométrie semble saine, la cinématique également ; on ne croule pas sous le débattement, et les composants sont délibérément choisis pour encaisser tout excès d’enthousiasme.
Pour notre mètre quatre-vingt-trois, nous grimpons sur un vélo en taille L, qui est la taille idéale. Luis, le « chef suspension », ajuste notre SAG, pour 72kg à 25%. Nous mettrons difficilement à l’épreuve le travail effectué sur l’adaptation de la cinématique, nos mensurations étant somme toutes assez « standard » dans l’industrie du cycle. C’est en la compagnie de Luis, d’autres journalistes et de Jérôme Clementz que nous partons sur les sentiers.
Le poids ne nous a pas été communiqué, mais on reste dans un ressenti plus que correct pour le programme. Le vélo grimpe d’ailleurs très bien. La position est agréable et si on bloque l’amortisseur sur les larges pistes, on pédale parfois « tout ouvert » sur les sentiers sans s’en rendre compte.
En descente, on oublie très clairement l’ancien Habit. Le vélo est toujours vif et joueur, mais il est bien plus capable et fun que son prédécesseur. On peut se permettre d’être brouillon et on vient sauter et chercher les mêmes trajectoires que sur un vélo d’enduro. On retrouvera d’ailleurs le célèbre « Canadian Trail », qui présente un grand nombre de sauts et de passages défoncés. Le confort est moins grand que sur un « gros » vélo, mais tous les autres repères restent les mêmes. Le vélo est rigide, toutefois, il conserve suffisamment de souplesse, surtout dans les roues, pour aller chercher du grip et du confort.
Cette nouvelle génération du Cannondale Habit est très pertinente en 29 pouces et la taille de roues aurait déjà dû équiper son prédécesseur.
Du côté de la suspension, on apprécie le fait de rester assez haut et la progressivité dès le milieu de course, mais nous avons tout de même libéré un peu de pression en milieu de ride pour aller chercher plus d’assise et de débattement. Toujours bien active, la suspension offre une très belle lecture de terrain.
Nous ne comptons qu’une belle journée de vélo au guidon du nouveau Cannondale Habit 2019 mais nous avouons être charmé et prêt à signer pour de longues heures à son guidon. Cannondale a très nettement revu sa copie et le positionnement de son vélo, qui trouve légitimement sa place sur le marché aux côtés de vélos comme le Santa Cruz 5010, le Specialized Stumpjumper en version ST ou le YT Jeffsy. Les déclinaisons en aluminium semblent également très bien finies et accessibles et seront à considérer de près pour un test plus longue durée.
Plus d’infos sur le site de la marque : www.cannondale.com