Mongolia Bike Challenge | Plongée dans les steppes
Par Nicolas Raybaud -
Pour Vojo, Nicolas Raybaud raconte sa participation à la Mongolia Bike Challenge, un marathon VTT de 600km divisé en 6 étapes. Le 19 août dernier, 9 femmes et 99 hommes se réunissaient sous la ger (yourte) royale du complexe touristique 13th Century Camp pour célébrer la 8ème édition de cette course. À travers les immenses steppes, l’aventure a su conquérir le cœur des coureurs venus de 24 pays.
Bienvenue en Mongolie
Si je voyage en Mongolie, c’est pour participer à une course de vélo, mais aussi et surtout pour découvrir un mode de vie nomade, aujourd’hui disparu en Occident.
Située entre deux grandes puissances, la capitale Oulan-Bator est aujourd’hui libérée des tutelles russe et chinoise. La ville reprend ses droits mais la structure urbaine reflète un développement empirique, désorganisé, avec un état de propreté discutable.
Oulan-Bator, « la capitale la plus moche du monde” : voici comment est souvent décrite la ville du “héros rouge”. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) classe la capitale dans le top 10 des villes les plus polluées au monde. La critique est sévère et pourtant, la plus grande surface du pays est une authentique et exceptionnelle nature.
Nous avons pris de la hauteur par rapport à la capitale. Nous observons des fumées de charbon, la reconnaissable architecture soviétique faite de béton, les récentes tours de verre… Puis les « gers districts » (les quartiers de yourtes) en arrière-plan, en périphérie de la capitale, qui tranchent avec l’horizon des steppes.
Dans un pays de trois fois la superficie de la France, 30 % des 3 millions de Mongols sont nomades. Ils vivent en autonomie dans les steppes. La Mongolie a la plus faible densité de population avec 1,94 habitant au km2. C’est un vaste plateau que je compare à un Monopoly. Un vaste plateau montagneux au potentiel incroyable.
Au mois d’août, nous avons eu un climat comparable à un temps d’automne en France. Les nuits sont froides. En journée, la température avoisine les 25°C. En été, il peut faire très chaud, au-delà de 40 °C dans le désert de Gobi. Et jusqu’à -40°C en hiver. Oulan-Bator posséde la température moyenne la plus basse au monde avec -2,4°C ! Si les écarts sont extrêmes, il n’en reste pas moins que la Mongolie est le pays le plus ensoleillé au monde, avec 240 jours de ciel bleu. La période de mai à octobre est la meilleure pour y voyager avec son sac à dos.
Une véritable remontée dans le temps, au rythme de la nature et de nos coup de pédales.
En dehors de la capitale, le réseau routier est très peu développé. Les déplacements se font en majorité sur des longues pistes rectilignes tracées au plus court.
C’est lors d’une véritable remontée dans le temps, au rythme de la nature et de nos coups de pédales, que nous allons plonger dans l’immensité des steppes, tels des cavaliers du roi universel des Mongols, Gengis Khan. Nous sommes des nomades à VTT, nous sommes à la Mongolia Bike Challenge.
Le Mongolia Bike Challenge
Project Adventure Cyclism, une société espagnole, organise la Mongolia Bike Challenge. PA CYCLISM organise des séjours d’aventure cycliste comme l’héroïca Espagne.
L’organisation nous accueille à l’aéroport Gensis Khan, pour nous affréter à l’hôtel de départ de course. Lors des briefings, il faut être attentif car aucune projection de diaporama ou road book ne sont proposés. L’usage des traces GPX est fortement recommandé, mais il faut aussi vérifier le balisage. Des drapeaux sont plantés en bord de piste : ils doivent toujours être positionnés à notre droite. Les briefings se font en Anglais. La plaque de cadre, un dossard, notre bagage de 100 litres et ses équipements et nous sommes prêts à partir.
La routine est stricte pour chaque étape. Le petit-déjeuner est servi 1h30 avant le départ de 8h30, à l’exception des étapes courtes. Les bagages doivent être déposés 15 minutes avant le départ. L’assistance mécanique ou le service de massage sont des options additionnelles payantes. Pour ma part, je n’ai eu aucun problème mécanique ou physique à déclarer.
Le profil des étapes nous plonge progressivement dans l’infini de la Mongolie. Si les premières éditions duraient 10 jours, Willy Mulonia a réduit les étapes pour donner un caractère différent et accessible à chacune d’elle.
Le paysage en Mongolie évoque l’immensité, sans lignes électriques ni bâtiments pour bloquer la vue. Nous roulons sur des double-pistes faites de terre, sablonneuses, dans les herbes hautes, dans la boue, en sous-bois, à travers les rivières. Nous franchissons des montagnes et des descentes abruptes, et rencontrons des nomades et leurs bêtes.
Si le cumul d’ascension reste faible, l’usage d’un vtt tout-suspendu est appréciable pour les longues heures de traversée des steppes.
Il est impossible de retranscrire vraiment ce sentiment d’être minuscule dans des paysages immatériels, taillés pour des géants.
Armé de mon TS 29 pouces, j’ai pu rouler avec grand confort et traction, sur les pentes ascendantes comme dans les descentes rapides et engagées. Les montées ne sont pas longues, mais la trace est faite au plus court. J’ai eu l’occasion de jouer avec le pignon de 50. Quand la piste devient plate et rectiligne, un exercice de vélocité prend place. Cependant, rien de très technique. Les dangers sont signalés et peu nombreux.
Les conditions de vie
Nous avons eu froid dans nos gers mais la chaleureuse ambiance et les conditions météo étaient rassurantes. Les douches sont froides et les repas sont de traditions mongoles, à base de mouton. Les soupes de mouton avec des légumes, des raviolis ou en beignet sont très populaires dans le pays. Si vous cherchez du café c’est inutile, il est servi soluble. Lui est préféré un thé infusé au lait de yak ou de brebis légèrement salé.
L’un des temps forts de la course est notre nuit sous tente au bord de Tuul River. Si certains sont restés à l’abri sous les tentes et dans leur duvet sarcophage, d’autres auront eu une nuit aux mille étoiles proche du zéro degré celsius.
Une rivière comme douche, un service repas 4 étoiles par le restaurant Rosewood, une adresse prisée de Olan-Bator : cette journée a été la plus belle manière de se reconnecter avec la nature et de de rencontrer les participants, dans l’esprit marathon d’aventure.
Les deux derniers jours, nous séjournons au parc national du XIIIe siècle (13th Century National Park).
C’est un retour aux traditions nomade. Nous avons le réservoir d’un camion-citerne comme source d’eau pour les douches, pour laver nos équipements, et les sanitaires creusés dans le sol.
Nous bavardons, nous marchons, nous dormons, nous roulons, nous profitons et laissons le temps s’étirer.
La MBC côté course
Les participants sont distingués en plusieurs catégories : Khan (pour les professionnel ou un niveau élevé), les amateurs (Sportman), Master et Vétéran. Il est possible de participer au classement par équipe de 3. Chaque jour, nous nous retrouvons, les mêmes coureurs, à mener la course, dont le Lituanien Elijus Civilis vainqueur de cette Mongolia Bike Challenge 2017, le Hollandais Gosse Van der Meer et votre rédacteur.
Une des spécificités des étapes sont les bonifications de temps. Un classement de la montagne : 30 secondes, 20 et 10 secondes sont soustraites aux passages des 3 premiers. Ces sucreries donnent de l’explosivité dans les ascensions. Elijus, Gosse et moi-même jouons activement à ce grand prix du meilleur grimpeur.
3 ravitaillements sont disposés le long des parcours. La veille des étapes, il est possible de laisser son propre ravitaillement à l’organisation, uniquement pour les points 1 et 2. Il suffit ensuite de s’arrêter pour récupérer ses vivres et craquer pour des snacks et un verre de cola offerts.
La première étape est comme un round d’observation. Cela frappe fort dès le début avant de nous laisser glisser dans l’ambiance et l’exigence de la steppe mongole.
La seconde étape, dite “Queen Stage”, est la plus difficile. Elle distingue les hommes et femmes fortes de cette édition. À l’issue de l’étape reine, nous pouvons penser que le classement est figé (1er Van der Meer, 2e Civilis à 5 min, Raybaud à 20min, Busquets à 27 min);
C’est au cours de la 3ème étape que le classement général est bouleversé. Alors que Gosse Van der Meer fait la course en tête, sur une erreur de navigation il cède sa place au Lituanien Civilis. La 3ème place est remise en jeu. Pris dans la confusion à 5km de l’arrivée, tête dans le guidon, après 30 minutes je m’aperçois que j’ai repris le même circuit qu’au départ. Beaucoup auront fait l’erreur. L’Espagnol Guillem Busquets devient alors 3ème du général.
La 4ème étape, la plus longue, est aussi la plus rapide et se terminera au sprint. Nous aurons traversé une flore et une faune incroyables. Les yaks et les moutons nous laisseront le passage avant que la pluie ne s’abatte sur nous. Un divin soleil réapparait, pour terminer à une moyenne de 27km/h.
La 5ème étape est courte : 85km et 1200m de dénivelé positif. C’est un parcours en faux plat montant où 3 Grand Prix de la montagne sont disputés. Nous nous retrouverons Elijus, Gosse et moi-même à mener la course pour une arrivée au Parc national du 13ème siècle, dans la province de Tuv.
La 6ème étape est un contre-la-montre de 25km et 500m de dénivelé. Elijus sera le plus rapide, en 53 minutes, sur un parcours rapide fait de chemins bosselés, de descentes rapides aux virages en devers et d’une montée très raide où il faut redoubler de vélocité.
Clap de fin
Réunis sous la ger royale, la musique de la vielle, instrument à deux cordes, et des chants locaux nous sont proposés. Nous dînons avec les plats traditionnels. Un à un, sous les applaudissements, tous les finishers sont appelés pour recevoir leurs récompenses. Ce cérémonial nous fait oublier la mesure de la performance et renforce le sentiment d’avoir vécu une aventure collective qui offrira à tous de puissants souvenirs.
Chacun y trouve une leçon de vie. Pour ma part, il s’agit d’embrasser pleinement chaque nouvelle expérience : tisser des liens avec des personnes partageant les mêmes idéaux, qui aiment vivre de nouveaux pays et cultures. Et bien sûr, explorer ensemble des paysages inoubliables, sur un vélo ! Il s’agit de se défier. Nul doute que cette épreuve fait grandir un homme. Elle nous réapprend à profiter de l’élémentaire puissance que la nature et l’humanité ont à nous offrir.
Que ceux qui rêvent d’authenticité, de nature envoutante et d’un dépaysement total bouclent leurs valises et prennent leur ticket pour la Mongolie !
Le site de la MBC : www.mongoliabikechallenge.com
Coté course, c’est le Letton Elijus Civilis et l’Australienne Jo O’Shaughnessy qui remportent l’épreuve. Résultats complets : Hommes – Femmes
Plus d’infos sur l’épreuve : www.mongoliabikechallenge.com
Photos : Mongolia Bike Challenge – Christian & Johan Carl Brandt