Les Gets 2024 : les moments marquants du XC
Par Léo Kervran -
La coupe du monde des Gets, c’est fini pour cette année ! Alors que le soleil et la chaleur sont revenus sur la station haut-savoyarde après un week-end bien arrosé et avant un drôle d’été entre longue coupure pour certains et Jeux olympiques pour d’autres, retour en images sur les moments marquants du XC :
L’éclosion de Candice Lill
Celles et ceux qui suivent de près le monde du XC connaissaient déjà la Sud-africaine mais pour les autres, Candice Lill est la grosse surprise de ce début de saison. Il faut dire qu’à 32 ans, Lill passe pour une énigme ou une anomalie à de nombreux égards.
Face à l’éclosion toujours plus précoce de nouvelles stars de la discipline (Kate Courtney avait 23 ans lorsqu’elle a remporté les championnats du monde en 2018, Loana Lecomte et Puck Pieterse 21 ans pour leur première victoire en coupe du monde Elites), la Sud-africaine apparaît décalée d’une génération. Et contrairement à ces pilotes, ainsi qu’à de nombreuses autres grandes figures du XC, elle n’a pas de références fortes dans les catégories de jeunes : ses résultats les plus notables sont une 3e place aux championnats du monde Juniors 2009 et une 5e place au classement général de la coupe du monde Espoirs 2012, avec un podium à Windham.
Son éclosion fut plus tardive et son domaine, c’est plutôt le marathon, tout particulièrement le Cape Epic : depuis 2019, elle a terminé 5 fois d’affilée à la deuxième place du classement général de la célèbre course par étapes (5 victoires d’étape). Série en cours ! L’année dernière, elle a aussi pris la deuxième place des championnats du monde de XC marathon derrière Mona Mitterwallner, de 10 ans sa cadette.
Et pour lui compliquer encore la tâche, en apparence du moins, Lill n’a pas de grosse structure autour d’elle : si elle roule sur Cannondale depuis 2016, elle n’a pas de soutien officiel de la marque américaine et porte les couleurs de ses propres sponsors, ce qu’on appelle une pilote privée (ou privateer en anglais). Aux Gets, c’était la seule du top 30 ! Courante dans les catégories de jeunes, cette situation l’est beaucoup moins chez les pilotes qui se battent pour les meilleures places en catégorie Elite…
Sixième à Nove Mesto, 3e à Val di Sole, 13e à Crans-Montana dans les conditions qu’on connaît, elle a signé aux Gets le meilleur résultat de sa carrière en coupe du monde de XCO en prenant la deuxième place derrière Puck Pieterse. Une confirmation de son excellent printemps et une « éclosion » finalement attendue, une juste récompense au vu de ses performances régulières en marathon et sur le Cape Epic. Et si c’était elle, la surprise des JO de Paris ?
Puck Pieterse toujours au rendez-vous
A l’opposé ou presque de Candice Lill, il y a Puck Pieterse. Modèle de précocité, performante en cyclo-cross (sa première discipline) comme sur route ou en XC, très à l’aise sur un vélo, la Néerlandaise est professionnelle depuis ses 18 ans au sein de l’équipe Fenix – Deceuninck.
Avec d’excellents résultats aussi tôt, on a toujours dans un coin de la tête la crainte que ça ne dure pas, que le corps ou l’esprit ne parviennent plus à encaisser les sollicitations de toutes sortes et toujours plus importantes. Après s’être révélée chez les Elites l’année dernière, ça semble toujours bien se passer pour Puck Pieterse cette saison !
Jugez plutôt : sur les quatre dernières coupes du monde, la Néerlandaise a terminée 4e, 2e, 3e et enfin 1ère aux Gets. Elle est aujourd’hui en course pour la victoire au classement général, alors qu’elle a manqué les deux premières manches au Brésil. Ce week-end, elle faisait figure de favorite et elle fut à la hauteur des attentes, menant un long raid solitaire pour s’imposer avec 2’37 » d’avance sur Candice Lill, 3’07 » d’avance sur Alessandra Keller et repoussant la 10e place de Mona Mitterwallner à plus de six minutes, soit presque un demi-tour.
Lors des championnats du monde 2023, elle fut la seule à opposer un peu de résistance à Pauline Ferrand-Prévot et Loana Lecomte, qui ont tout de même fini par dominer l’épreuve. Manche retour lors des Jeux olympiques dans trois semaines ?
Cannondale, la force du collectif
Enfin la victoire pour Alan Hatherly ! Omniprésent sur les podiums mondiaux depuis 2021 et son arrivée chez Cannondale, dernier homme à pouvoir résister à Nino Schurter dans sa « chasse gardée » de Val di Sole ces dernières années, le Sud-africain ne s’était encore jamais imposé sur une coupe du monde de XCO. Aux Gets, l’anomalie fut enfin réparée, et avec la manière !
Obtenu après un duel avec Mathias Flückiger et une échappée solitaire de trois tours, cette victoire fait suite à celle sur le Short Track vendredi soir et conclut ainsi un week-end parfait. Surtout, elle rend hommage et met en lumière la force du collectif du Cannondale Factory Racing et l’énorme travail mis en place par la structure depuis 4 ans.
Fin 2020, elle recrute du même coup Simon Andreassen et Alan Hatherly, qui portaient alors les couleurs de Specialized et tout juste sortis des rangs Espoirs. A l’aube de la saison 2023, les deux hommes sont rejoints par un prometteur Espoir écossais, Charlie Aldridge. Cette année, le Cannondale Factory Racing compte trois victoires en coupe du monde (XCO et XCC confondus), six podiums et deux titres de champion continental.
Aux Gets, ce fut un festival : doublé pour Hatherly et Aldridge sur le Short Track, victoire pour Hatherly et 3e place pour Andreassen sur le format olympique. Si Aldridge semble encore légèrement en retrait face à ses deux coéquipiers quelques années plus âgés, l’Ecossais apprend vite et un triplé avant la fin de saison n’est pas à exclure…
Et au-delà de l’image séduisante ou impressionnante que cela renvoie, un collectif fort donne aussi plus de chances de victoire. On l’a vu en début de saison au Brésil avec les pilotes Specialized (Koretzky, Blevins et Vidaurre) ou chez BMC en 2022 (Sarrou, Colombo et Carod) notamment, de vraies stratégies peuvent être mises en place pour manoeuvrer les adversaires. De quoi rajouter une dimension supplémentaire à la course !
Un avenir radieux pour le XC français
Un podium et deux top 10 en plus chez les U23 hommes, un podium après s’être battue pour la victoire chez les U23 femmes : aux Gets, les Espoirs français ont brillé !
Derrière les excellentes saisons d’Olivia Onesti et Luca Martin, c’est tout un collectif qui se distingue, chez les hommes notamment. Mathis Guay, le champion de France, passe une mauvaise journée (3 top 10 depuis le début de saison mais 22e aux Gets) ? Martin Groslambert et Yannis Musy répondent à l’appel, le premier terminant pour la troisième fois d’affilée dans les 10 premiers et le second pour la première fois, récompense d’une belle progression.
Le Canada et les USA ont visiblement une génération dorée dans cette catégorie aujourd’hui mais avec la Suisse, l’équipe de France est juste derrière et a de quoi envisager l’avenir sereinement.
Braidot & Avondetto, l’Italie au top avant les JO
Encore un collectif qui s’est illustré aux Gets, mais cette fois à l’échelle nationale : très discret en début de saison, Luca Braidot s’est réveillé depuis le passage à Val di Sole et est sur une série de trois podiums d’affilée (4e en Italie, 3e à Crans-Montana et 4e aux Gets).
Avec deux victoires en coupe du monde à son palmarès, le champion d’Italie est un candidat très sérieux à la victoire lorsqu’il est en forme et il l’a encore montré ce week-end. Parti seul en début de course, repris par Alan Hatherly et Mathias Flückiger puis incapable de suivre le rythme du duo, il ne s’est pas effondré pour autant et a trouvé les ressources pour se battre avec Sam Gaze, Simon Andreassen et Simone Avondetto pour une place sur le podium. C’est moins spectaculaire qu’une victoire mais cela en dit beaucoup sur son état de forme !
Simone Avondetto fait lui partie des révélations de l’année. Champion du monde U23 en 2022 sur ce même parcours, le pilote du Wilier-Vittoria Factory Team s’est illustré au début du printemps avec une 6e place sur la première manche de coupe du monde, à Mairiporã, suivie d’une 10e position lors de l’étape suivante à Araxà.
On aurait pu croire qu’il s’agissait d’une étoile filante pour essayer de décrocher une place dans la sélection italienne des Jeux olympiques, car il est rare d’être aux avant-postes dès sa deuxième année Elites chez les hommes, mais Avondetto a montré qu’il n’en était rien. Sixième à Val di Sole devant son public, il a décroché aux Gets son premier podium dans la catégorie reine. Si les deux hommes tiennent le même niveau de forme dans trois semaines, ils pourraient bien avoir un rôle à jouer sur l’épreuve olympique !
Des glissades à la pelle
Après les pluies du samedi, qui ont transformé la piste de DH en véritable patinoire, le circuit de XC apparaissait bien gras et boueux dimanche matin. Les passages successifs des athlètes l’ont séché peu à peu, offrant aux courses de l’après-midi (Elites Hommes et surtout U23 Hommes) des conditions presque sèches sur les principales trajectoires, mais les femmes n’ont pas eu cette chance.
Que ce soit les Espoirs à 9h ou les Elites à 11h, elles ont dû faire face à un terrain extrêmement piégeux, aussi bien sur les racines qui sont partout dans les sous-bois que dans les grands dévers en herbe qu’on trouve à plusieurs endroits du circuit. Certaines ont pu s’illustrer avec leur sens des trajectoires et leur aisance dans ces conditions (on pense notamment à Alessandra Keller et surtout Jenny Rissveds, impressionnante de facilité) mais pour toutes les autres, il s’agissait plus de survivre ou de limiter la casse qu’autre chose…
En images, petit florilège de ce qu’il s’est passé devant nos objectifs.
Mais aussi…
L’arrivée de Warner Bros Discovery à la tête de la coupe du monde a des bons et des mauvais côtés mais il faut bien admettre que le nouveau portique de départ, entièrement recouvert d’écrans, a de l’allure. En revanche, on repassera pour la consommation d’énergie.
Le niveau technique des parcours augmente… mais celui des pilotes aussi ! Fini le temps où Nino Schurter était l’un des rares, sinon le seul, à éblouir le public avec ses whips. Chez les U23 tout particulièrement, de nombreux pilotes régalent les spectateurs, spectatrices et photographes de gestes techniques toujours plus impressionnants ou dans des endroits improbables.
Au revoir Maxime et merci pour les émotions ! Aux Gets et dans une tenue spéciale pour cette étape française de la coupe du monde, le pilote Decathlon-Ford disputait sa dernière coupe du monde à domicile puisqu’il prendra sa retraite sportive à la fin de la saison (lire Maxime Marotte annonce sa retraite sportive).
Deux fois champion de France Elites de XCO et de XCM, l’Alsacien nous a fait vivre de grandes émotions pendant près de quinze ans, en passant tout proche de grands résultats (4e des JO de Rio, 2e de la coupe du monde de Petrópolis pour quelques centimètres derrière Nino Schurter). Aux Gets, le public ne s’y est pas trompé en l’acclamant pendant toute la course et encore de longues minutes après son passage sur la ligne d’arrivée.
Chez BMC, Steffi Häberlin a peut-être le sponsor le plus original du circuit : la Suissesse est soutenue par la Raclette Suisse. Si, si.
L’enfer dans les racines d’un côté, les boulevards du 4X de l’autre. Dire que le circuit des Gets est contrasté serait un euphémisme.
Malgré une météo plutôt fraîche (mais on a vu avec la descente que même la pluie ne semblait pas poser de problème), le public était bien présent aux Gets.
A l’année prochaine !