La Trans-Nomad 2018 avec Jérôme Clementz
Par Paul Humbert -
La Trans-Nomad continue de s’inscrire dans le calendrier des belles épreuves d’enduro à étapes. Cette année, Jérôme Clementz s’est aligné au départ de l’aventure dans les Pyrénées. De la vallée de Benasque à celle d’Aran, on découvre des paysages et des traces d’exception. Le champion raconte :
Adepte des épreuves enduro en itinérance, je n’avais aucune excuse pour ne pas résister à l’appel des montagnes qui forment la frontière entre la France et l’Espagne et me lancer sur la Trans-Nomad.
Le format
4 jours de courses, une moyenne de 50km par jour, 1800m de dénivelé positif et 3000m de négatif.
Le tracé nous fait passer de la vallée de Benasque sur le Val d’Aran autours de l’Aneto, le plus haut sommet des Pyrénées. Côté logement, nous avons droit à tout: 2 jours de camping pour s’échauffer, 2 jours en bungalow pour tenir jusqu’au bout de l’épreuve et enfin, une nuit à l’hôtel pour récupérer de 4 jours intenses.
Le départ se fait tôt le matin avec une dépose en navette pour gagner un peu d’altitude et ensuite chacun est libre de prendre son rythme en liaison ou en spéciale.
Au départ, on retrouve 80 participants, de 11 pays différents, ce qui constitue un groupe hétéroclite entre aventuriers, habitués de courses par étapes enduro ou XC (Swiss Epic, Cape Epic, TransProvence), locaux et fans de vélo qui tentent leur 1er enduro.
L’aventure
Nous sommes au milieu des montagnes, et dès notre arrivée on se rend compte que ce n’est pas la zone la plus fréquentée ou habitée en Europe. Les montagnes sont imposantes et sauvages. Contrairement à certaines parties des Alpes, il y a peu de stations de ski aux alentours et on remarque très peu la présence de l’homme dès qu’on s’enfonce dans une vallée.
Les journées sont bien physiques et, chaque jour, nous avons le droit à une liaison de 1000m ou plus ainsi que des portages bien ardus. Le cadre est magnifique, la compagnie de mes collègues (Remy Absalon, Ludo May, Monika Buechi et Myriam Saugy) rend la difficulté plus supportable mais la Trans-Nomad se mérite et il s’agit sans doute de la course la plus difficile niveau physique à laquelle j’ai participé dernièrement. Cependant ça vaut vraiment la peine de souffrir, car les paysages sont uniques et les spéciales magiques.
Une fois au sommet, nous avons droit à des tracés de toute beauté. Ici pas de trous de freinage, pas de sol compacté par les passages. On se rend compte qu’on fait partie des rares privilégiés à avoir posé nos crampons sur ces sentiers. On passe des chaumes verdoyantes à des forêts de pins ou de sapins remplies de belles épingles. Le lendemain, nous sommes dans des paysages lunaires de haute montagne et on bascule plus tard sur des pistes tracées par les acteurs locaux.
Ce n’est jamais trop physique niveau pédalage, ce qui permet de vraiment se faire plaisir mais aussi de tenir la longueur car certaines spéciales font plus de 10′ et 800m de dénivelé. Le balisage est léger et la navigation à vue prend tout son sens. Il faut bien ouvrir les yeux, lire le terrain et ne pas se faire surprendre.
Chaque jour a sa particularité au niveau paysage. Le 1er jour, après une liaison de 1700m de dénivelé, nous arrivons à un lac d’altitude à l’eau bleue turquoise. Le 2ème jour, à la frontière française, nous avons une vue sur des chaumes verdoyantes à l’infini. Le 3ème jour, après 20km de montée, nous plongeons dans un canyon immense. Enfin, pour la dernière étape, à plus de 2900m, on se croirait sur Mars avec au 1er plan l’Aneto.
L’organisation est au petit soin, que ce soit au camp ou lors du ravitaillement, nous avons le droit à de la nourriture en quantité, un service de mécanique et des volontaires souriants. Le soir dans la « chill area », la bière est offerte et certains en profitent pour se réhydrater correctement et relater leurs exploits.
D’autres profitent d’un massage, réparent leur monture ou pansent leurs plaies suite à de petite mésaventures. Quoi qu’il en soit, on voit beaucoup de sourires et des gens heureux d’être là à se dépasser et se faire plaisir.
Les chronos
La Trans-Nomad est une aventure mais également une compétition. Chez les hommes le niveau est relevé avec Ludovic May (BMC), Thomas Misser et Markel Uriarte (Orbea), Remy Absalon (Scott SR Suntour), le local César Gairin et moi-même. Je prends de l’avance en remportant les 2 premiers jours, profitant de mon expérience. Remy, qui fait sa première course du genre, apprend vite, remporte le jour 3 et nous nous échappons au général. Le dernier jour les français roulent propre pour ne pas tout perdre. Thomas Misser, vainqueur de 2 EWS master, montre qu’à 40 ans il a encore un sacré coup de guidon et prend le meilleur temps sur la dernière étape.
Au final, je l’emporte devant Rémy et Thomas, César Gairin remonte à la 4eme place le dernier jour, juste devant Markel Uriarte.
Ma régularité m’aura permis de rester devant, mais ce n’est jamais facile sur ce format car durant 16 spéciales, 1h40 de chrono et 15.000m de dénivelé négatif, la moindre faute ou problème mécanique peut vous être fatale (ou presque). L’idée est donc de rouler dans sa zone de confort et d’essayer d’être tendre avec son matériel, tout en anticipant les obstacles.
Chez les femmes Monika Buechi l’emporte devant Myriam Saugy et Mirian Guerra
Conclusion
Les Pyrénées c’est énorme pour le vélo !
Je ne regrette absolument pas d’avoir fait le déplacement, le terrain de jeu est exceptionnel et varié. Les paysages sont uniques et différents des autres massifs européens. On a une sensation de liberté et d’espace qu’on trouve rarement ailleurs. La Trans-Nomad est une merveilleuse façon d’explorer les environs en 4 jours bien denses. L’adrénaline de la course, plus les camarades permettent de rajouter un coté aventure à ce voyage.
Grâce à ce genre d’épreuve, pas besoin de sortir la carte ou d’avoir peur de passer à côté du bon trail. Il y a juste à se laisser guider, faire l’effort de pédaler ou pousser jusqu’au sommet et d’apprécier la vue pour se faire plaisir en descente.
Jérôme Clementz : www.instagram.com/jeromeclementz/
Photos : Kike Abelleira