Interview | Julien Absalon : un jeune retraité plein de projets !
Par Olivier Béart -
Après l’annonce de sa retraite avec effet immédiat juste avant la Coupe du Monde d’Albstadt, Julien Absalon a déjà mis les deux pieds dans sa nouvelle vie de coach/team manager ; rôle qu’il exerce tant pour Neïlo Perrin-Ganier au sein de son team Absolute Absalon, que pour sa compagne Pauline Ferrand-Prevot. Nous avons profité de la coupe du Monde de Nove Mesto pour lui rendre une petite visite et parler de ses projets futurs.
Julien, comment te sens-tu après ces deux premières coupes du Monde vécues depuis le bord du circuit ?
Très bien ! Je ressens vraiment bien les choses, je n’ai aucun regret. Même pendant la course Elite hommes, je n’ai pas eu de pincement au cœur. C’est vraiment le signe que j’étais prêt à mettre un terme à ma carrière de coureur. Mais il faut dire que je n’ai pas de quoi m’ennuyer sur les courses ! J’ai été directement mis dans le bain comme team manager et ça me plaît énormément. J’apprends, et je dois le faire vite, mais c’est un beau défi.
Ta fracture de la clavicule et tes soucis d’allergies sont tous les deux des pépins de santé, mais tu prends les deux choses de façon très différente…
Oui, absolument. Ma fracture de la clavicule, je l’avais très mal vécue car cela perturbait mes plans et ma saison. C’était un accident au plus mauvais moment. Ici, les allergies, je les ai clairement ressenties comme un appel de l’organisme me disant : « Je t’ai bien servi, tu m’as bien tiré dessus donc maintenant, laisse-moi tranquille. » J’ai toujours écouté mon corps, et je pense que c’est un des éléments qui m’ont permis de durer au plus haut niveau en VTT. Je ne conçois pas non plus de devoir subir une médication lourde pour pouvoir continuer à rouler et à être performant.
Et l’envie de rouler, de t’entraîner, elle est toujours présente ?
Ah oui ! L’arrêt des coupes du Monde de XC est une chose, mais l’entraînement en est une autre. Je ne ressens aucune lassitude et je vais continuer car j’ai d’autres projets sportifs à l’horizon. Je suis en forme et j’entends bien le rester, ne fût-ce que pour accompagner Pauline et Neïlo à l’entraînement, ou pour pouvoir me fixer de nouveaux défis ! Cet hiver, je m’étais mis un cycle d’entraînement « charges lourdes » en salle, chose que je n’avais jamais faite de toute ma carrière ! Ca a porté ses fruits au niveau de l’explosivité, notamment à Heubach où, avant d’abandonner à cause de mes allergies, j’avais réalisé un super départ. Aujourd’hui, sur les week-ends de course, je fais même plus de sport qu’avant. Là, je suis allé courir ce matin, j’ai roulé les entraînements avec Pauline et Neïlo,… J’en suis à 3h30 par jour alors qu’en tant que coureur on est à 1h30/2h !
Je ne veux absolument pas couper avec le sport. Juste le pratiquer autrement !
J’ai besoin de me « désintoxiquer » de la compétition mondiale, mais je sens que cela va aller très vite car en restant au contact du milieu comme team manager, je reste dans cet univers que j’apprécie énormément. Par contre, je ne veux absolument pas couper avec le sport. Juste le pratiquer autrement !
C’est-à-dire ? Tu as déjà des projets ?
Je n’ai pas encore réfléchi à des projets sportifs précis, mais j’y pense et j’ai déjà quelques petites idées. Pourquoi pas une Mégavalanche, une Transvé, des marathons vtt… ou même de belles courses de trail car je cours de plus en plus à pied et j’aime ça.
Du vélo électrique aussi ? Devenir le premier champion de France de la spécialité est un objectif pour toi ?
Oui, il y aura aussi pas mal de vélo électrique. Mais le championnat de France n’est pas vraiment un objectif. Il se déroule dans le cadre du Vélo Vert Festival et j’y vais pour partager des choses avec le public, faire des sorties accompagnées avec Moustache, etc.
Mais cela va déjà être sympa de rentrer dans l’histoire en participant simplement au premier championnat de France de la spécialité. Pourquoi pas gagner, oui, je suis un compétiteur dans l’âme, mais on ne sait pas comment cela va se passer car beaucoup de facteurs interviennent : technique, stratégie, etc.
Que penses-tu du format des premières courses de vélo électrique ?
J’attends de voir ce qu’il en sera exactement sur le terrain pour ce premier championnat de France, mais sur le papier je suis un peu déçu du format sur une boucle de 4,5km. Car si on veut attirer du monde, des participants, c’est mieux que ce soit plus long. Cela évite que les derniers se fassent trop vite mettre un tour et sortir de la course, ce qui n’est pas drôle du tout, et cela permet aussi de faire rentrer en ligne de compte des paramètres comme la gestion de la batterie, le côté « cérébral » du VAE.
C’est différent du XC classique et cela doit se voir. Les épreuves pour vélo électrique vont se chercher encore un peu je pense, mais c’est normal. C’est pour cela que je ne veux pas que ce que je dis soit interprété comme des critiques. Je me pose quelques questions, mais je veux être constructif. Je pense que la vérité se situe plus du côté d’épreuves typées rallye avec des spéciales en montée, de la descente, du physique, du technique, des chronos longs, d’autres plus courts, de la gestion de batterie, etc. Je reconnais que c’est plus dur à organiser par contre ! Bref, tout reste à faire dans ce nouveau sport et je suis content de participer à ce premier championnat de France, ça permettra de voir et de parler en connaissance de cause pour la suite.
Au niveau du vélo, tu vois déjà des évolutions techniques qui seraient souhaitables et que tu aimerais amener dans le cadre de ton partenariat avec Moustache ?
Le Moustache est un vélo déjà très abouti. Il a une géométrie au top, très joueuse et facile. Il est très agréable pour faire de la technique en montée et il tourne facilement. Il est aussi très travaillé au niveau de la répartition des masses, mais je pense qu’il y a encore beaucoup de choses à faire au niveau du développement de suspensions spécifiques. D’origine, il y a des manivelles en 170mm, voire 165mm dans certaines marques pour ne pas toucher au sol. Moi ça me perturbe et j’ai vite remis des 175, tout en travaillant les suspensions avec Suntour pour garder le vélo plus haut dans le débattement sans perdre en efficacité. C’est un exemple parmi d’autres.
Revenons au team : vu ton retrait, on imagine qu’au bord des circuits, tu es très attentif aux performances de jeunes pilotes… et aussi des moins jeunes. Tu veux étoffer l’équipe l’an prochain ?
Oui, c’est évident que je veux développer le team la saison prochaine. C’est indispensable pour les partenaires qui m’ont fait confiance et qui l’ont maintenue après ma décision d’arrêter, mais ça l’est aussi pour Neïlo (Perrin-Ganier) car ce serait trop de pression pour lui de devoir supporter seul le poids de la réussite sportive de la structure. Je suis donc très attentif, je regarde les courses, les résultats et je pense déjà à l’an prochain.
Je voudrais miser sur la jeunesse, mais aussi avoir au moins un pilote Elite confirmé dans la structure, pour que les jeunes aient aussi un pilote top niveau en activité comme modèle et inspiration dans le team Absolute Absalon.
Et Pauline ? Tu es très présent à ses côtés, et encore plus sur ces deux dernières courses.
Oui. Nous avons un accord avec le team Canyon pour qu’en bonne intelligence, Pauline puisse partager notre staff. Nous mutualisons le mécano, le physio… et moi (rires). J’apprécie beaucoup de pouvoir être plus présent à ses côtés. Avant, je devais me concentrer sur ma course, je pouvais la voir un peu rouler en début d’épreuve, puis je m’informais juste du résultat à la fin mais je ne pouvais pas être présent au bord de la piste. Maintenant je peux aller avec elle à l’échauffement, être dans la zone technique pendant la course, l’accompagner au pied du podium, etc. Cela me plaît et cela joue un grand rôle dans mon épanouissement en tant que jeune retraité !