Découverte | Vallées d’Aspe et d’Ossau : les joyaux des Pyrénées
Par Pierre Pauquay -
Dans les Pyrénées Atlantiques, la nature grandiose règne sans partage dans les deux vallées d’Aspe et d’Ossau. Dans cette mosaïque de lacs bleus, de vallées luxuriantes et de plateaux d’estive, le VTT a trouvé sa raison d’être.
Frontière naturelle entre l’Espagne et la France, les Pyrénées se dressent, telle une échine lacérée. Et oubliez toute comparaison avec les Alpes : à part qu’il s’agit de montagnes, rien ne peut les rapprocher. Ni leur caractère, ni leur culture, ni leur géologie.
Vous croyez découvrir des montagnes arides du sud ? Vous admirerez un massif vert, exubérant, dégoulinant de torrents et de chutes d’eau. Vous imaginez un monde chaotique de pierres et de rocs ? La flore des Pyrénées ouvre tout vos sens et tapisse de couleurs les flancs des montagnes. Les renoncules, gentianes, myrtilles et rhododendrons embaument les pays des vallées d’Ossau et d’Aspe, deux nobles terres pour la pratique du VTT.
Une montagne brute
Depuis Pau, la route tout d’abord plate s’élève brusquement en entrant dans la vallée d’Ossau. Dans les Pyrénées, il n’existe pas de préambule. Aucune chaîne comme les Préalpes, aucune colline ne peut annoncer le massif pyrénéen. De la plaine, le voyageur passe de suite à la haute montagne : nous nous rendons vite compte que les dénivelés vont s’avérer redoutables ! Plus on s’enfonce dans la vallée, plus la montagne se montre rude, comparé à d’autres régions montagneuses plus enjôleuses mais transformées parfois en parc de loisir à ciel ouvert. Dans les Pyrénées, on entre comme on débarque sur une île, dotée de son particularisme et de son identité forte.
La montagne pyrénéenne est un diamant brut qui a pu être préservé depuis des générations. A l’époque, ce pays n’était guère ouvert. Le « pays de l’ours et du loup » ne suscitait que crainte, voire aversion. Les forêts sombres, les sommets infranchissables et leurs habitants farouches faisaient rebrousser chemin plus d’un voyageur. La chaîne de montagne des Pyrénées restera d’ailleurs ainsi quasi inconnue jusqu’au XVIIIe siècle. Les cartographes mettront plus de 200 ans à comprendre la topographie du massif.
Des animaux libres
Ce caractère rustre n’a pas complètement disparu. Tenues à l’écart de la ruée vers l’or blanc, les Pyrénées sont restées vertes et villageoises. C’est dans ce décor préservé que nous retrouvons Nicolas, qui nous avait guidés lors de la Grande Traversée du Pays basque. Le matin, nous rejoignons une de ces vallées transversales de la vallée d’Asp. Dans l’ascension vers le plateau de Lhers, les étages pyrénéens se dévoilent.
Les flancs des montagnes se tapissent de fougères et d’arbustes, et non d’alpages. On retrouvera uniquement sur les plateaux les quartiers d’estive. Au demeurant magnifiques car les chevaux, les vaches blondes d’Aquitaine et les moutons paissent ensemble en liberté sur un territoire sans clôtures. Les sonnailles raisonnent dans toute la montagne et sont un hymne à une longue tradition du pastoralisme pyrénéen. Nous n’avons pas rencontré l’isard : il se distingue de son cousin le chamois par son pelage roux. Animal grégaire, il vit en harde qui peut atteindre jusqu’à 100 individus.
La montagne préservée
A la fois soumis aux vents de l’Atlantique et à ceux de la Méditerranée, le climat dans les Pyrénées est imprévisible, changeant. Au sommet, le vent nous accueille et une pluie fine perle sur nos vestes alors que le soleil brille dans la vallée. Ici, aucune construction, aucun monstre de béton ne vient casser la quiétude des lieux. Les promoteurs des années cinquante et soixante n’ont pas œuvré dans les Pyrénées comme ils ont pu le faire dans certaines régions des Alpes.
Peu après le col de Barrancq, un sentier en balcon descend de la plus belle façon qui soit. Il aborde tout d’abord le long plateau via des belles courbes entre torrents et fleurs pour rejoindre la cabane d’Udapet. Nous franchissons des ruisselets aux rives piquetées d’orchis et de chardons. Au pied de nos roues, les prairies touffues sont mangées de buissons et se parsèment de champignons : on se faufile, on évolue dans un écrin vert.
L’icône sauvage
Dans ces montagnes du sud, l’authenticité fait sa force. Rien n’est superficiel, tout est vérité. Il n’est pas étonnant de retrouver une faune et une flore remarquables. Et la plus belle des icônes représentant la nature sauvage est sans doute celle de l’ours. En 1996, il ne subsistait que six ours endémiques des Pyrénées : leur avenir semblait scellé. La réintroduction de plantigrades provenant de Slovénie de 1996 à 2006 a permis de pérenniser la présence du grand fauve. Les Pyrénées compteraient à ce jour une soixantaine d’individus et ils ont l’espace pour y vivre. En 150 ans, la forêt pyrénéenne ne cesse de s’étendre alors que la population vivant et travaillant dans les montagnes diminue. La fréquentation humaine, y compris celle du tourisme, est très inférieure à ce que l’on connaissait au XIXe siècle…
A la limite du plateau, la ligne de crête se casse, de suite. D’épingle en épingle, nous dévalons vers Borce. Cette descente rejoint le meilleur des mondes : assurément l’une des plus belles que nous ayons parcourues.
Elle ne montre pas de pièges comme si la trace avait été nettoyée de toutes les aspérités, cailloux et autres marches. Dans le fond de la vallée, Le village de Borce se vêt de schistes et d’ardoise qui se fondent avec les parois des montagnes. Il est également un important lieu de repos pour les pèlerins du Chemin de saint-Jacques, la Via Tolosana.
Le gîte est d’ailleurs un ancien hospitalier. En amont du village, le somptueux Chemin de Mâture, bien connu sur le GR10, fut taillé dans la falaise en 1772, afin d’amener vers Pau les immenses fûts de hêtres provenant de la forêt de Pacq. Il ne servira que six ans, le temps pour la marine Royale de Louis XV d’épuiser les ressources forestières.
Montagne de lumière et de parfum
Les traces diffèrent selon l’exposition du versant, selon l’altitude. L’après-midi, au-dessus d’Accous, nous évoluons sur la montagne située plein sud où une magnifique chênaie se déploie. L’éclat de la lumière, mêlée à la pureté de l’altitude et du ciel du midi, nous éblouit et inonde le chemin devenu blanc craie. Sur la crête, les pistes se muent en superbes voies pour les VTT. Epousant les courbes du relief, nous nous laissons glisser sur la crête de Bergout. Face à nous, tout le massif de la vallée se découvre, hérissé de pics. Point de contreforts ou de collines, la barrière se dresse, fière et droite.
Le chemin est raide : nous effectuons une chute libre. Quelle chance de bénéficier ce jour d’un Orbea Occam ! A l’image de cette descente, la région peut se montrer redoutable pour celui qui ne peut dompter son VTT. Les itinéraires peuvent s’avérer très techniques et fatigants. Ici, les 140 et 150 mm de débattement du vélo ne sont pas un luxe.
Le sentier sinue dans une jungle de chênes. Par de belles courbes, nous rejoignons la rivière contournant le duvet des sphaignes et de la mousse. Nous traversons un jardin suspendu avec ses tufs caractéristiques.
Une dernière montée sur un alpage et c’est une nouvelle descente phénoménale. Notre montre indique quatre heures de l’après-midi : cela fait plus d’une heure et demie que nous descendons à travers la caillasse, les bois, et les alpages. Le VTT prend dans les Pyrénées toute sa mesure et son identité. Le soir, les bras endoloris, le dos un peu cassé et les images plein la tête, nous pensons au lendemain qui va nous conduire au bout de nos rêves pyrénéens, dans la vallée d’Ossau.
Le souffle des Pyrénées emplit nos poumons. Les couleurs, les odeurs et les sons du béarnais emplissent tous nos sens. Nous vivons une expérience intime avec ce monde qui nous était inconnu. L’eau est abondante, on la trouve partout. A chaque hameau, chaque détour de sentiers, nous trouvons des sources et des ruisseaux. Les Pyrénées sont un véritable château d’eau pour toute la région du sud-ouest. Ces montagnes sont encore jeunes géologiquement, mais vieilles comme le monde. Leur naissance date de l’ère du Tertiaire, il y a 50 millions d’années, quand l’écorce terrestre s’est soulevée, entre la poussée des blocs ibériques et européens. Face à nous, le massif granitique de la chaîne frontalière donne une idée de l’ampleur du phénomène.
Montagne inconnue
Le col de Castet se détache. Il est taillé dans la masse de granit, comme si des mains de géant avaient arraché cette partie de la montagne. La vue sublime sur les crêtes et la vallée d’Ossau nous pousse à la découvrir, à mieux la sentir. La chaleur martèle les visages, les montagnes commencent à se brumer de bleu et à se voiler. La moiteur rappelle que l’océan n’est jamais très loin. Derrière nous, les Pic Montaut (2016 m), de la Ténèbre (2321 m), d’Isabe (2407 m) prennent des allures de sommets himalayens. Ce n’est pas leur altitude qui renforce cette idée mais plutôt leur élan et leur isolement. Nous embrayons sur le circuit contournant l’alpage du Castet. Cette partie d’itinéraire est un régal : de crête en crête, nous traversons ces petits cols, sans difficulté.
Sur ces chemins, nous rencontrons des troupeaux de moutons et de chevaux qui, sans bergers, sans chiens, se déplacent seuls dans le massif. En signe d’apothéose, le voyage dans les Pyrénées se clôture avec la découverte du plateau du Benou : le paysage est resté le même. La vue porte vers les sommets. Au-delà, les Pyrénées entrent dans un monde sauvage et secret. Là commence le pays de l’ours…
Quelques bonnes adresses :
- Restaurants
Maison Lavillete
05 59 83 99 84
Place de la mairie, 9
64260 Bielle
Hôtel de France
1, place de l’Hôtel de ville
64260 Arudy
https://www.hotel-defrance-arudy.com
- Logement
Green bike pyrénées
27, avenue Pasteur
64260 Louzie-Juzon
- Où réparer?
A Oloron, nous avons découvert un magasin comme on les aime, tenu par un amoureux du vélo, Pascal ainsi que son épouse. Ils perpétuent une passion, née en 1962. Faites y un tour, vous serez accueillis avec bienveillance.
http://www.cycles-igouassel.fr/magasins/oloron
- Infos
ADT des Pyrénées-Atlantiques
Il est possible de télécharger les itinéraires VTT et enduro sur
https://www.pyrenees-bearnaises.com/explorer/nature/velo/vtt/itineraires-vtt/
Pour ce reportage, nous avons emprunté en grande partie les traces des circuits 31 et 65.