Découverte | Les circuits VTT de l’Ain
Par Paul Humbert -
Quand un territoire gigantesque décide de fédérer tous ses acteurs pour créer une immense base VTT, ça débouche d’abord sur un gros chantier, puis sur une infinité de possibilités pour les pratiquants. Nous avons pris la direction de l’Ain, qui vient d’officialiser la nouvelle carte de ses itinéraires VTT. Découverte :
Le développement du VTT dans nos régions, ça tient souvent à des initiatives très locales : des clubs, des associations, des offices du tourisme. Chacun développe, officialise et entretient son réseau de pistes, itinéraires et sentiers.
Le point positif dans tout ça, c’est que ces acteurs comprennent et connaissent leur territoire et leur offre pour le grand public.
L’enjeu du travail réalisé par l’Aintourisme a été de réunir et d’assembler tous ces acteurs pour proposer une carte commune et une « offre » cohérente. On parle « d’offre » car c’est de ça qu’il s’agit : une bonne raison d’attirer des vététistes sur ces sentiers, et faire tourner le tourisme local.
Tout rassembler sur une même carte serait trop simple. Avant de pouvoir faire ça, il a d’abord fallu harmoniser les tracés, s’assurer des autorisations de passage et du balisage de ces derniers. Un grand plan d’entretien doit également être mis sur pied et trouver les bons acteurs pour s’assurer de la durée de vie de la base dans le temps.
Ce que l’Ain annonce, c’est une base aux multiples facettes, pour les pratiquants réguliers comme les occasionnels. On a donc souhaité jouer sur les deux tableaux, et aller rouler sur les tracés grand public, avant de pimenter un peu notre découverte.
Les grands plateaux de l’Ain
Quand on dézoome sur la carte, on repère le Bugey et le Pays de Gex, les deux espaces qui viennent d’être unifiés par ce projet de grande base VTT. Pour notre première journée, on file avec Julien, Martine et Romain depuis la rédaction d’Annecy et ses abords encombrés vers le site de La Praille.
Enfin, c’est ce qu’on croyait.
Après une mauvaise lecture des informations par votre serviteur, c’est au plateau du Retord, sur l’itinéraire 14, les balcons du Mont Blanc, qu’on sort nos vélos. Le tracé est une boucle au départ initialement prévue depuis la station des plans d’Hotonnes, mais le hasard aura choisi un autre point de départ pour nous. Tant pis pour notre sens de l’orientation, on file directement vers le point de vue au nord de la boucle.
Le tracé est valloné et se compose principalement de grands chemins blancs. C’est très accessible et plutôt contemplatif. Alors qu’on a quitté depuis quelques heures le tumulte de la Haute-Savoie, ici on est seul, au calme et en pleine nature.
On observe la chaîne du mont Blanc, on identifie clairement les sommets, et pourtant le terrain sur lequel nous évoluons est bien différent et plus accessible. Le territoire de l’Ain a ses altitudes les plus basses à 300 mètres et grimpe jusqu’à 1600 mètres sur les sommets.
On passe le long de grandes prairies qui regorgent de fleurs et on se rappelle qu’on a oublié de se tartiner de crème solaire. Tant pis pour nous.
Une fois notre sens de l’orientation retrouvé, on termine la boucle dans le sens initialement prévu, et on traverse quelques bois pour rejoindre de gigantesques parcs à vaches. Au coeur des fermes, les stars, c’est le Comté, le bleu de Gex ou le Morbier.
Pour notre ravitaillement du soir, ça sera une découverte très locale : la bugiflette. C’est coquin, mais on ne voudrait pas vous priver de cette découverte, alors on vous invite à aller la goûter à l’auberge d’Aranc qui nous a très bien accueillis avec nos vélos.
Mais revenons à nos tracés. L’Ain est une terre nordique et même en été, les grandes étendues respirent le ski de fond et le biathlon. Quand on arrive à la petite station des plans d’Hotonne, on repère une piste de ski-roues et des tracés conçus pour les skieurs qu’on emprunte en été.
L’autre grande influence, côté VTT cette fois-ci, c’est l’évènement La Forestière qui, depuis plus de 30 ans, travaille au développement et à l’ancrage de notre sport sur ce terrain de pratique. Ce qui était au départ une course est aujourd’hui bien plus grand et a considérablement influencé le travail sur cette base VTT. Les passionnés sont à la base de tout.
Sur cette partie de la base, en VTT, on reste sur un engagement technique mesuré et le tout est propice à la balade en famille et aux grandes journées de pédalage. Il est facile de combiner plusieurs tracés sur certaines zones de la base VTT.
Dans la petite maison de l’office du tourisme, on retrouve Maxime Ballet, responsable sport nature, qui nous présente son action auprès des vététistes : « Les gens qui passent ici sont là pour être dehors et découvrir la région. On les aiguille en fonction de leur niveau de pratique et en fonction des points de vue qu’ils ont envie de retrouver. On a des petites boucles, et des grands itinéraires en combinant des tracés jusqu’au grand colombier, avec 60 km et 1500 m de dénivelé. On a également l’itinéraire de la grande traversée du Jura qui se divise en deux avec laquelle et on peut construire un tracé de 94 km. »
Au coucher du soleil, on prend la direction du site de la Praille. Cette fois-ci, nous sommes accompagnés par Johann Leiritz, qui a piloté toute cette refonte de la base VTT. Son premier vrai souvenir de VTT, et celui qui l’a marqué, c’est les championnats du Monde de Metabief en 1993. Depuis, ce sport et le potentiel qu’il peut révéler l’accompagne dans ses métiers du tourisme.
Il nous guide dans ce secteur beaucoup plus boisé, toujours sur les pistes de ski de fond, et on croise les derniers rayons du soleil sur une crête entre la Praille et le domaine de la terre ronde.
On quitte les parcours quelques mètres et on retrouve le terrain du massif du Jura : de la pierre calcaire et une terre plutôt lourde quand il pleut, mais pour nous c’était un super grip et une transition fun après quelques kilomètres de randonnée.
Les balades à vélo, c’est aussi l’occasion de prendre du recul sur le travail réalisé. Pour Johann, cette base c’est un terrain de jeu accessible presque toute l’année, à l’exception de deux ou trois mois d’hiver. Avec des bassins de population comme Lyon et Genève à proximité, les parcours ont de quoi accueillir pas mal de « voisins ». C’est en tout cas l’objectif affiché.
Tout mis bout à bout, c’est presque 100 parcours qui sont proposés aux cyclistes et vététistes, et lors de la fusion des deux bases, presque 300 kilomètres ont été ajoutés, ce qui en fait une des plus grosses bases VTT françaises.
Mais est-ce qu’on peut plaire à tout le monde ? Johann répond : « Je pense qu’on doit couvrir 80 % des attentes des pratiquants. Il y aura toujours des puristes qui choisiront des terrains avec plus de gravité, mais je pense qu’on peut déjà répondre à beaucoup d’attentes en allant d’un parcours facile autour du lac en famille jusqu’à de la DH sur le bike park. »
Pour la blague, on a estimé le nombre de panneaux d’aiguillage : il y en a entre quinze et vingt mille sur le territoire. Si vous avez la tête en l’air, l’application Ain-Outdoor référence toutes les traces et peut vous localiser.
Surprise au programme, la site de La Praille accueille des services bien pratiques : de l’eau pour remplir nos bidons, un jet pour laver nos vélos, une chouette auberge (et son non moins chouette poulet aux morilles) et des bains scandinaves.
Chauffés au bois, ils sont situés à l’arrivée des itinéraires ski et vélo, et un créneau peut être réservé pour terminer sa sortie. On ne vous dira pas qui d’entre nous aura fait déborder le plus d’eau en rentrant dans les bains, mais même en pleine canicule, l’expérience vaut le coup.
Notre découverte continue avec Johann du côté d’Hauteville, et on est rejoints par Sébastien Beaudon qui marquera une transition toute trouvée vers le côté plus technique de notre aventure. On quitte les grandes pistes et on se faufile sur les premiers sentiers qui montent. On s’arrête au sommet des falaises qui dominent la vallée, et on redescend pour une découverte du bike park de Cormaranche.
L’Ain côté bike parks
L’histoire de Sébastien, c’est celle d’un passionné qui a aidé son sport à grandir. Ayant découvert le vélo de descente après des années de ski de fond, il tombe amoureux de son sport et ne lâche plus son vélo. Après des années à pratiquer plutôt seul, il se rend compte qu’il n’est pas qu’un simple illuminé dans sa montagne, et il se dit qu’il serait intéressant d’en faire profiter plus de monde.
C’est ainsi que naît le bike park de Cormaranche. Les passionnés de DH connaissent la compétition qui s’y déroule, et son terrain parfois piégeux, mais le bike park abrite des pistes plus faciles d’accès, rouges, bleues et vertes.
Sur les pistes faciles, un revêtement est apposé pour rendre la pratique plus facile en conditions humides et pour préserver les pistes.
Il y a juste ce qu’il faut de pente, et des virages bien shapés pour retrouver tout le dynamisme de nos vélos. Entre deux prises, on joue à chaque virage.
Ce qui fait la particularité de ce « spot », c’est sa gestion. Intégré dans la base VTT, il bénéficie de la dynamique générale. Depuis l’école primaire du village de Cormaranche en Bugey, on grimpe dans une navette qui rejoint le sommet des pistes toutes les 20 minutes. Les chauffeurs sont payés par la collectivité et une participation de 14 ou 18 euros est demandée. Imbattable.
Sur le bike park, on compte 7 pistes de descente et 5 d’enduro accessibles une grande partie de l’année. Les journées d’ouverture étant communiquées sur le site du bike park. Ce terrain, c’est également celui de l’Uchav, le club de « gros vélo » de la région.
Depuis le sommet du bike park, Sébastien nous pointe du doigt, au loin, la ferme Guichard où les gourmands ont leurs habitudes. Ce n’est pas le sujet, ce qui nous intéresse, c’est qu’une trace balisée « enduro » passe juste à côté et on s’élance dans cette direction.
Le rythme hausse d’un ton, on passe dans des pierriers puis on s’arrête devant un panneau de balisage un peu particulier.
La section qui suit est ouverte aux vététistes toute l’année, hors période de chasse (de mi-septembre à mi-mars). On plonge dans une sapinière magique où après un petit dévers, on bascule dans un pumptrack naturel au grip exceptionnel.
On en redemande, et il ne faut pas pousser nos modèles du jour pour nous refaire des passages pour la caméra.
Romain, en VTTAE, est inaltérable.
On termine la descente sur des enchaînements de descente bien travaillés avant de rejoindre un des endroits préférés de Sébastien : une petite cascade cachée à quelques dizaines de mètres de la trace. On trempe les pieds et on profite de la fin de la journée. Sébastien fait partie des gens pour qui partager ses meilleurs sentiers est un véritable plaisir, et on lui en est reconnaissant.
Le bike park de Cormaranche n’est pas le seul spot « gravity » de la base VTT de l’Ain. À vrai dire, on en a découvert un autre sans le savoir, sur le site de Crozet où sévit l’association de l’enduro du ghetto. On y avait suivi François Bailly-Maître, Morgane Charre et les membres de l’association pour une découverte des traces rouges et noires typées enduro sous la remontée mécanique.
Là-bas, les énervés en tout genre pourront trouver de quoi s’en mettre sous la dent, même quand les remontées sont fermées. Les pistes sont belles, particulièrement bien shapées, et des gros sauts attendent les plus téméraires.
Après deux journées entre crêtes, vallons et plateaux, on retiendra la variété de l’offre proposée par l’Ain et sa nouvelle base VTT. Si une grande partie de l’offre s’adresse à des vététistes occasionnels, des amateurs de balade ou des débutants, une autre partie, toute aussi officielle et référencée, s’adressera aux pratiquants avertis.
Il y en a pour tous les goûts et il est bon de savoir qu’une collectivité a compris que c’est cette variété qui fera la force de son offre pour les vététistes et cyclistes de tous bords. Il est finalement assez facile de repérer ce qui s’adressera le mieux à votre pratique sur le site et l’application Ain-Outdoor, les reliefs annonçant la couleur.
L’enjeu suivant sera celui de l’entretien de cette base, pour proposer une belle offre toute l’année, et pendant des années. Il faudra également entraîner du monde dans la dynamique : les hébergeurs accueillant les vélos, les restaurateurs…
De notre côté, une idée a germé pendant cette découverte : on imaginerait bien une première partie de séjour sur les bike parks à VTT avant de changer de vélo et d’aller découvrir les grands itinéraires « faciles » en gravel. Les chemins s’y prêtent et on va tenter le jeu du « super-combo » en enchaînant les plus belles boucles. À bientôt dans l’Ain !
Plus d’infos : Ain Outdoor – Ain Tourisme – Bike Park de Cormaranche.