Découverte | Grand Raid Godefroy gravel : un bien beau bal des débutants
Par Olivier Béart -
Si la pratique du gravel est en pleine expansion, les épreuves dédiées sont encore rares. Certains se lancent sur le créneau par opportunisme, mais c’est vraiment par passion que les organisateurs du célèbre Grand Raid Godefroy à Bouillon ont ajouté cette année du gravel à leur programme déjà bien chargé. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que pour une première, ils ont tapé en plein dans le mille ! Vojo y était, voici ce que nous en avons retenu :
Petit rappel pour ceux qui ne seraient pas familiers avec l’univers VTT belge : le Grand Raid Godefroy est une épreuve phare du calendrier marathon belge depuis plus de 30 ans. C’est même une des plus anciennes courses longue distance d’Europe. Il y a 9 ans, l’organisation a été reprise par un groupe d’amis qui lui ont donné un tout nouvel élan. Depuis le départ, ils ont eu à cœur de diversifier leur offre et de réinventer l’épreuve, en l’ouvrant à l’enduro, puis à l’e-bike et en revoyant régulièrement leurs tracés.
Les voir se lancer dans l’aventure gravel n’avait rien de surprenant. Car ce sont simplement et avant tout des passionnés qui ont, eux aussi, découvert le gravel… et qui s’y sont quasiment tous mis en complément du VTT ! On ne parlera donc pas ici d’opportunisme, ni même de démarche mercantile, mais de réel intérêt pour une pratique en pleine émergence, pour laquelle les épreuves spécifiques sont encore rares au calendrier si on excepte quelques grosses machines comme la manche de Worlds Series qui a lieu à Houffalize depuis deux ans.
Les ingrédients d’une épreuve gravel réussie
Cerner les contours d’une nouvelle pratique n’est pas toujours facile. Souvent, au début, les événements se cherchent, tâtonnent, font des erreurs, corrigent, et il faut quelques années pour que ce soit vraiment au poil. Mais ici, on peut dire que pour une première, les gars du GRG ont visé juste directement.
La base de tout, c’est le parcours. Bosser les fondamentaux, il n’y a que ça de vrai. Pour leurs tracés, les organisateurs sont partis complètement à l’opposé des parcours VTT, dans une partie de la vallée de la Semois qui présente notamment comme caractéristique d’être moins encaissée. Ce qui a toute son importance car, si le gravel est un magnifique outil de découverte, il présente le petit désavantage de ne pas être très à l’aise dans les forts pourcentages. Du coup, ici, il y avait de solides grimpettes, parfois même bien techniques, mais ne dépassant jamais les 10% de pente et toutes faisables sur le vélo sans même avoir un très gros niveau physique.
Ensuite, un autre ingrédient de la réussite, c’est la diversité. Ce n’est pas parce qu’on roule sur une majorité de grands chemins forestiers qu’on doit s’ennuyer. Et pour cela, réussir à alterner subtilement différents types de revêtements est une des clés. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il y avait de la variété sur le GRG gravel ! Cendrée, petits cailloux, un peu de boue, de la route, des zones un peu plus étroites avec quelques racines, etc : impossible de s’ennuyer ou de se lasser sur ce tracé.
Enfin, la cerise sur le gâteau, c’est tout simplement la région et les magnifiques paysages traversés. Dès qu’il y avait une petite trouée dans les arbres, on voyait se dessiner de somptueux panoramas sur la Semois et les collines aux alentours. Le tout avec un magnifique soleil pour rendre les choses encore plus agréables. Ah oui, et on allait oublier un détail important : le balisage était presque parfait pour une première !
Eloge de la diversité
On a déjà parlé de la diversité des terrains sur lesquels le GRG gravel a emmené les participants, mais il y avait aussi beaucoup de diversité à d’autres égards. Tiens, prenons les machines par exemple. Sur la ligne, il y a avait bien sûr de magnifiques vélos de gravel dernier cri. Mais il y avait aussi beaucoup de VTT, dont les propriétaires voulaient simplement s’essayer à cette nouvelle discipline sur un tracé off-road présentant moins de difficultés et de portions techniques qu’en VTT. Sans oublier quelques bikes de cyclocross et même quelques e-bikes (pas du tout dans un esprit de « triche » mais simplement de balade à la cool pour accompagner des amis).
Petite parenthèse technique : on a vu un nombre assez énorme de crevaisons ! Non que le tracé était particulièrement cassant ou piégeux mais visiblement tout le monde se cherche encore un peu sur les sections de pneus et le type de roues. Quelques petits conseils pour ce tracé : roulez avec des pneus de section comprise entre 40 et 45mm, impérativement en tubeless (oubliez les chambres à air). Beaucoup parlaient aussi de l’utilité de mettre des inserts pour prévenir les pincettes. Nous n’en avons pas encore roulé en gravel donc on ne se prononcera pas mais cela peut effectivement être une bonne idée. Puis il reste à faire un peu attention, à soigner son pilotage… et à avoir un peu de chance !
A cette diversité de vélos, répond également une grande diversité de profils de participants et aussi de niveau. Aux avant-postes, on retrouvait des coureurs très affûtés, à l’image d’Axel De Lie (Lotto-Dstny), le frère d’Arnaud De Lie dont on parle énormément et qui avait remporté la veille sa première victoire World Tour sur route à l’occasion du GP de la ville de Québec.
Le très sympathique Axel s’est d’ailleurs imposé sur la distance reine de 110km en un peu plus de 3h40, devant le Portugais Andre Resende et Bram Rombouts. A l’arrivée, il nous a donné ses impressions : « L’organisation m’a proposé de venir, j’ai demandé à l’équipe et ils ont accepté. Après ma double déception sur la World Series à Houffalize, où j’ai à chaque fois crevé, j’avais vraiment envie de faire quelque chose ici. Je suis vraiment heureux de gagner, mais surtout je me suis vraiment bien amusé. Le parcours était exceptionnel et on s’est livrés à une belle bagarre devant avec deux spécialistes du gravel. Si le calendrier le permet c’est certain que je reviendrai ! »
Puis, pour le gros du peloton, des amateurs éclairés, souvent cyclistes confirmés qui ont commencé à tâter du gravel il y a quelques mois et qui participaient pour beaucoup à leur première course du genre. Et enfin, une belle proportion de randonneurs venus simplement se laisser guider sur un parcours fléché, avec des ravitaillements, dans une région qu’ils avaient envie de découvrir.
Il y avait aussi une très grande variété d’âges. Peut-être pas de 7 à 77 ans, mais bien de 18 à plus de 70 ans. Seul petit bémol, nous n’avons pas (encore) eu l’impression de voir beaucoup plus de dames que sur les épreuves VTT. Dans d’autres pays, les épreuves gravel sont nettement plus féminisées et on espère que nos contrées vont aussi suivre la tendance. On peut en tout cas se réjouir que, pour une première, il y avait déjà 300 participants sur la ligne et notre petit doigt nous dit que cela pourrait rapidement devenir beaucoup, beaucoup plus…
Vu de l’intérieur
Rien de tel que de participer à une épreuve pour pleinement la vivre. C’est ce que j’ai fait et voici ce que j’en ai retenu, en plus de tout ce qui a été dit plus haut. Avant de commencer, il faut tout de même que je vous confie que c’était ma toute première course gravel. Et aussi que j’aime beaucoup le côté technique/pilotage, y compris en gravel, que je pratique régulièrement sur des terrains assez… engagés pour des vélos à petits pneus. Pour tout vous dire, j’avais aussi hésité à m’aligner sur l’enduro avant d’opter pour le gravel par curiosité, attrait de la nouveauté et pour pouvoir vous faire ce récit de l’intérieur.
Bref, je suis arrivé sur la ligne sans aucun a priori, mais avec la crainte de m’ennuyer à cause de ma forme physique pas optimale et de ma soif habituelle de singletrecks et de descentes bien techniques sur tous les tracés que j’affectionne.
Et, au final, j’ai été très, très agréablement surpris. Pas un seul instant je ne me suis ennuyé. Quand ce n’était pas le plaisir d’essayer de garder la roue du gars devant, de rouler en petit peloton convivial, c’était le plaisir de tenir le vélo et de rouler vite dans les belles descentes du tracé… alors qu’elles n’avaient à la base rien de vraiment technique ou compliqué.
C’était aussi le plaisir de rencontrer de nouvelles têtes, de voir rouler côte à côte des gens venus plutôt de l’univers route et d’autres, comme moi, de l’univers VTT. Avec, comme point commun, un énorme sourire à l’arrivée après avoir passé un très bon moment.
Alors, oui, les organisateurs du Grand Raid Godefroy sont devenus des amis au fil des années et je ne suis peut-être pas 100% objectif, mais franchement, si vous ne nous croyez pas, venez en 2024 et si vous ne passez pas un bon moment, je vous rembourse votre inscription !
Plus d’infos : https://www.grandraidgodefroy.be/gravel
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