Co-création chez Decathlon : la genouillère dont vous êtes le héros

Par Paul Humbert -

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Co-création chez Decathlon : la genouillère dont vous êtes le héros

Et si c’est vous qui passiez aux commandes ? Evidemment, on ne vous demande pas de coudre, de dessiner ou de choisir des matériaux, mais Decathlon propose à des panels de testeurs de prendre part au développement terrain et aux essais de futurs produits. Retour sur plusieurs mois d’un développement atypique d’une nouvelle genouillère et d’une coudière Rockrider « light » : 

Decathlon, c’est une grosse machine, et son département vélo implanté dans le nord de la France donne le pouls à l’activité vélo du groupe. Mais comme vous l’avez découvert lors du lancement des derniers VTTAE de la marque, une partie de l’équipe vélo est également installée à Passy, au coeur des Alpes. 

Le programme co-création Decathlon a un pied dans chaque bureau et a été activé pour la conception des nouvelles genouillères et coudières légères de la marque. Concrètement, la co-création, c’est une plateforme qui fait le lien entre les équipes de développement Decathlon et les clients de la marque. Chaque sportif peut s’inscrire sur le site dédié aux remontées d’expériences terrain, présenter ses centres d’intérêts, et être contacté par la marque quand un projet leur correspond. 

C’est dans ce cadre qu’on retrouve Christophe, Thomas, Trevor, Dimitri et Charles au pied du lac vert en Haute Savoie. Entre les mains, ils ont les premiers prototypes de ce qui deviendra, peut-être, la future genouillère et coudière all-mountain/enduro de Decathlon. Particularité de ce prototype : on ne repère aucune couture. 

Cette idée, on la doit à la petite équipe VTT implantée dans les alpes, un peu par hasard, quand ils ont tenté d’imaginer une protection qui s’intègre à un textile sans couture. Pour modéliser cette idée, ils ont sorti un pistolet à colle pour une première ébauche d’un projet qui allait s’étendre sur de longs mois. 

Pour aller plus loin, la marque s’est ensuite reposée sur ses ressources en interne : ingénieur produit protection, chef produit VTT, modéliste, designer… La marque a lancé son développement en se reposant sur un cahier des charges et un catalogue de fournisseurs textiles et protections. 

Au centre de ceux-là : D3O. Vous connaissez leurs membranes de protection de couleur orange, et la particularité du matériau est de rester souple et flexible au toucher, tout en se durcissant en cas d’impact. Pour ce développement, Decathlon a noué un partenariat avec les chimistes et les équipes de la marque basées à Londres pour proposer, entre autres, un produit de couleur noir, plus facile à porter pour des débutants. 

Une fois les premiers prototypes arrivés, c’est Elise, l’ingénieur essai terrain qui entre en scène pour faire appel à ses testeurs externes à la marque. Ils sont plus de 115 000 inscrits sur la plateforme de co-création mais toutes et tous ne remplissent pas les critères pour participer à ce test grandeur nature. Il faut ainsi aller « piocher » dans le panel VTT all-mountain et enduro et organiser plusieurs sessions de test. Par le biais de questionnaires, Decathlon connaît les habitudes d’usage des protections chez chaque utilisateur. Qui porte un casque, qui porte des gants, qui porte des genouillères, coudières, sous-short… La marque présente son projet, son prototype et surtout sa grille d’évaluation avant de plonger au coeur du projet : sur le vélo ! 

Le test

Les protections, c’est un sujet sensible, et moins facile à aborder qu’il n’y paraît. Porter une protection est une contrainte, et il faut s’adapter aux pratiques, usages et morphologies de beaucoup d’utilisateurs. Decathlon voit dans ce projet une double opportunité : protéger les vététistes, et vendre le produit qui le permettra. On nous l’explique sans filtre :  « Les gens ne mettent pas de protection parce que c’est chiant, mais si on résout les emmerdes, on démocratisera l’usage. » Pourquoi ce développement de Decathlon nous paraît important ? Parce que l’ampleur et l’impact des développements de la marque française touchent tous les sportifs, là où les marques « pointues » toucheront un panel plus restreint de vététistes. 

En plus de ses ressources internes, Decathlon s’est donc associé au fabricant de membrane D3O qui partage également de son côté une partie de son savoir-faire sur l’intégration de cette dernière. Quand les testeurs externes arrivent, les produits ont déjà été testés depuis un moment pas les équipes de la marque, mais quand on a « le nez dans le guidon », une prise de recul est toujours intéressante. 

Elise précise : « Les notes c’est bien, mais ce qui est super intéressant c’est les échanges collectif, ce qu’on peut avoir [en discutant] avec tout le monde. » Les testeurs échangent avec les équipes pour comprendre certains choix comme ceux du prix, mais aussi et surtout techniques : le choix d’une membrane, sa couleur noire, les textiles utilisés…

Ce qui est particulier, c’est le choix des tailles proposées par la marque. Il n’y a pas de corrélation entre les tailles de t-shirts et coudières ou de genouillères et pantalons. Il est important de mesurer ses cuisses pour choisir la bonne taille. 

Les heures de vélo s’enchaînent en groupe sur différentes sessions, avec des testeurs de différents niveaux, expériences et corpulences. Il faut dire qu’autour du bureau de Passy, les sentiers et belles boucles de test ne manquent pas. On est sur les terres de la MB Race, ou de la récente coupe du Monde d’enduro. Decathlon augmente ainsi considérablement son nombre de retours de tests, à eux de pondérer la valeur de ces derniers. 

Echouer, et recommencer 

L’histoire était trop belle pour se dérouler sans accroc. Après ses premières séances de test, la marque stoppe son développement. En dessous d’une note de 4,2/5, on se remet en question. Les testeurs ont tranché : la genouillère n’est pas assez respirante, elle manque de confort et le « fitting » est à améliorer. 

Pour l’équipe Decathlon et son rêve de projet complètement « seamless », c’est la douche froide. Mais comme James nous l’explique, « on s’est pris un mur, mais c’est devenu une opportunité ». Decathlon a remis en question les technologies utilisées et tout l’assemblage de sa genouillère, sans changer la membrane de protection. 

Chez Decathlon, le calendrier de mise en commerce est calculé sur les saisons, et le projet ne prend pas quelques mois de retard, mais une année complète pour finalement aboutir au printemps 2025. 

« La technologie sans couture était une belle idée sur le papier, mais ça n’a pas marché. » La marque ne souhaite toutefois pas faire de compromis sur « l’usage » et remet en question ses choix techniques en compagnie des modélistes de la marque. 

Pour sa nouvelle version, Decathlon s’écarte donc de son idée de conception originale, sans changer de cap. On retrouve ainsi, en version finale, une paire de genouillères et de coudières construites de la même manière avec une membrane de protection D3O surmoulé sur le tissu frontal. Chaque « plot » de la membrane est creusé pour laisser passer l’air vers le genou. La forme des plots a son importance et a été pensée pour s’adapter aux mouvements, sans contraindre les flexions. Cette forme a été co-développée avec D3O avec des épaisseurs variables. 

La validation de la protection se fait dans le laboratoire de Decathlon dans le nord de la France.

Un textile de type « mesh » est utilisé à l’arrière de la genouillère et pour le maintien, un large bandeau siliconné est positionné 8 cm au-dessus de la membrane de protection. En bas, un textile souple assure un double maintien mais sans silicone pour éviter l’effet « garot » et permettre à la genouillère de bouger légèrement. La marque nous parle d’une technique d’assemblage « préformée » pour cette genouillère. 

Après le premier échec, Decathlon a organisé trois nouvelles demi-journées de tests avec 22 vététistes sélectionnés sur la plateforme de co-création. En plus des séances courtes, des protections sont testées par 11 personnes sur une longue durée pour 760 heures de tests cumulées et 157 lavages. 

Pour l’équipe de Passy, la sortie de ces genouillères et coudières, c’est la concrétisation d’une idée qui a commencé dans un jardin avec un pistolet à colle. Les genouillères sont commercialisées 49,99 € et les coudières 44,99 € sur le site de la marque, au côté des genouillères et coudières « strong » pour plus de protection. La marque a également décliné la technologie sur un gilet de protection complet pour les pratiques VTT et ski/snowboard.

Test terrain : les genouillères Decathlon / Rockrider all-mountain et enduro light 

Au sortir de notre reportage chez Decathlon, nous attrapons une des premières paires de coudières et de genouillères de la production. Elles arrivent enroulées entre elles dans une petite housse de transport qui se glisse facilement dans un placard ou un sac. Nous avons tout particulièrement pris le temps de rouler avec ces genouillères. D’ailleurs, c’est celles que nous avons le plus portées ces trois premiers mois de l’année. 

Pour les enfiler, on replie le gros élastique du haut et on vient le plaquer au milieu de la cuisse. La tension est élevée, et on a peur d’être trop serré lors de notre première sortie. Cette crainte est levée rapidement puisqu’on s’habitue très vite et on oublie cette genouillère. Une bonne chose. En bas de la jambe, on ne ressent pas de pression supplémentaire, mais on est maintenu sur toute la hauteur de la protection. Les genouillères sont symétriques et peuvent se porter à droite ou à gauche. 

C’est en hiver que nous avons testé ce produit, et roulant en pantalon (et notamment avec l’excellent All Mountain léger de la marque), nous n’avons ainsi pas pu le confronter aux risques d’arrachement dans des ronces ou branchages. On note surtout qu’on n’a pas été gênés par une chaleur excessive, ni n’avoir souffert au niveau du pli de la jambe. Seules quelques marques laissées sur la peau au niveau de l’élastique haut trahiront leur présence. 

Ce qu’on retient aussi, c’est l’excellent maintien de la genouillère sur la jambe, même après des heures de pédalage. Elle bouge un tout petit peu en début de sortie pour trouver sa place, mais la membrane de protection reste souple sur le genou et on n’est jamais gêné par un bandeau qui flotterait ou un bourrelet de tissu. Beau boulot les testeurs ! Evidemment, ce ressenti reste assez personnel et pourra varier en fonction de la taille de chaque jambe et des différentes musculatures. Pour s’assurer de choisir la bonne taille, Decathlon recommande une mesure de votre cuisse à 8 cm au dessus du genou. 

 

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Côté protection, même si on aime se donner pour vous, nous n’avons pas chuté délibérément pendant nos dernières sorties. Si les membranes D3O sont reconnues et qu’on salue l’application sur cette genouillères qui ne crée par l’impression de rouler avec une « plaque » qui vient frotter sur le genou. On ne peut toutefois pas l’imaginer protéger complètement le genou en cas de gros choc. C’est une protection contre les petits bobos, les brulures et les petits impacts. Pour les pratiques plus engagées, Decathlon décline sa gamme de genouillères et coudières en version « strong ». 

En suivant les recommandations de Decathlon pour le lavage (en machine à 30 degrés), nous ne repérons pas de marques d’usures. Seules de petites traces d’auréoles de transpiration peuvent apparaître rapidement sur la partie « mesh » à l’arrière de la genouillère.  

Avec cette genouillères Light, Decathlon réussit son paris : proposer un produit confortable et respirant qui apporte une petite dose de protection pour celles et ceux qui souhaitent rouler léger. C’est une protection au rapport qualité-prix imbattable qui s’adressera à un large panel de vététistes et qui devrait pouvoir convaincre ceux qui ont l’habitude de rouler « tout nu ». Ces genouillères nous rappellent notre découverte de la dorsale Bluegrass Seamless qu’on s’est mis à porter quand nous n’aurions rien mis par le passé. On s’est surpris à les enfiler sous notre pantalon 2 heures avant le début de notre sortie, et à ne les enlever qu’avant de sauter sous la douche en fin de journée. Il nous restera à les tester en plein été et dans la végétation, mais les premières semaines de test auront été très convaincantes. 

Plus d’infos sur le site de la marque : Les genouillères / Les coudières  

Envie de participer aux prochains développements : cocreation.decathlon.fr

Par  Paul Humbert