Bosch eMTB Mode: le moteur Performance CX Line optimisé
Par Elodie Lantelme -
Vous roulez en VTTAE et votre vélo est équipé d’un moteur Bosch Performance CX Line ? Dès début juillet, vous pourrez bénéficier de la mise à jour “eMTB” développée par le motoriste allemand pour replacer sa motorisation sportive sur l’échiquier électrique. Nous avons eu l’occasion de la découvrir en Italie, pour la première épreuve de l’eMTB Challenge. Convaincant.
Pour Bosch, il était temps de réagir. Rappel du contexte : en 2016, quelque 2 millions d’e-bikes se sont vendus en Europe et, à moyen terme, ce marché pourrait représenter un tiers des ventes de vélos. Or, cette année, en matière de motorisation électrique pour VTT, les regards étaient plutôt tournés vers la concurrence du constructeur allemand. Shimano, en l’occurrence, avec la sortie de son moteur Steps E8000, qui équipe quantité de nouveautés 2017-2018 (dont le Scott e-Spark et le Mondraker e-Crusher Carbon, dont nous vous avons déjà parlé). Ou, plus exotique mais tout aussi excitant, vers Rocky Mountain, qui commercialisera cet été son premier VTT électrique, avec une motorisation “maison”. La réaction de l’actuel leader du marché en matière de moteur pour VTT à assistance électrique est arrivée à Riva Del Garda, en Italie, début mai. Bosch y a notamment présenté sa mise à jour eMTB. Celle-ci ambitionne de garder le meilleur du moteur Performance CX Line, le modèle sportif de référence de Bosch, en gommant les rugosités qui le rendaient parfois difficile à gérer (que celui qui n’a jamais eu à batailler pour retranscrire la puissance au sol de ce moteur dans certaines situations délicates nous jette la première pierre !). Le mode Sport disparaît donc au profit du mode eMTB, qui s’insère entre le Turbo et le Tour. Au final, Bosch conserve 5 modes, étalonnés comme suit : Walk+ (pour la marche quand on pousse le vélo), Éco, Tour, eMTB et Turbo. La particularité de l’eMTB ? Il délivre une aide au pédalage fluctuante, allant de 120 à 300%, en fonction de la force appliquée sur les pédales. Et couvre ainsi la plage allant du mode Tour au Turbo. Pour faire simple, on pourrait dire que l’eMTB a été conçu comme une sorte de « one-by » de la motorisation électrique, grâce à une gestion « intelligente » de l’assistance.
« Il nous a fallu un an et demi de développement pour trouver l’algorithme idéal, précise Claus Fleischer, le directeur section produits Bosch eBike Systems. Nous sommes partis d’un constat : le Performance CX, sorti en 2015 et qui représente un quart de nos moteurs, pouvait se révéler trop puissant en Turbo, et en Sport, on sentait parfois qu’il en manquait un peu. »
Mais si le mode eMTB délivre une assistance pouvant aller jusqu’à celle proposée par le Turbo, pourquoi ne pas avoir purement et simplement supprimé ce dernier ? Et facilité encore un peu plus la vie du pilote. « Nous avons gardé le Turbo pour 3 raisons, poursuit Claus. La première, c’est l’effet “waouh !” que les clients ressentent quand ils l’essayent pour la première fois. La seconde tient à ce qu’on appelle le “bring me back home” (« ramène-moi à la maison »), quand on n’en peut plus après une longue sortie et qu’on souhaite rentrer au plus vite (enfin, sous réserve que l’autonomie restante soit suffisante, NDR). Et la troisième est liée à une expérience : avec Stefan (Schlie, pilote développeur Bosch), nous roulons souvent autour du lac de Grade et rencontrons des montées en gravette assez profonde. Dans ces conditions, seul le mode Turbo permet de ne pas s’épuiser. »
Ce nouveau software équipe d’ores et déjà de série certaines gammes 2018 présentées cet été (Lapierre, Moustache…). Les VTTAE antérieurs mus par un Performance CX pourront également en profiter dès début juillet. Il suffit de prendre rendez-vous auprès de votre vélociste, afin qu’il installe la mise à jour. L’interrogation porte sur la tarification de cette opération : car si Bosch ne facture pas son nouveau software aux détaillants, ceux-ci restent libres de fixer – ou non – un prix pour le temps passé. Alors n’hésitez pas à demander au préalable.
Le mode eMTB : galop d’essai
Nous, ce que nous nous demandions, c’est ce que ça donne sur le terrain, et si le bénéfice est à la hauteur des promesses marketing. Pour ceux qui n’auraient pas la patience d’aller au bout de l’article, la réponse est oui. Pour les autres, voici pourquoi, après un court galop d’essai en compagnie de Stefan Schlie, suivi de la participation à la première édition de l’eMTB Challenge, la nouvelle épreuve spécifique e-bike lancée par… Bosch.
Première remarque : sur notre Trek Fuel, dès l’allumage, la console Purion indique 9 km d’écart d’autonomie entre le Turbo et l’eMTB, au profit de ce dernier, et 12 km entre l’eMTB et le Tour, moins énergivore. Une donnée à tempérer, évidemment, car elle évolue en fonction du dénivelé, du poids du pilote, de la température, etc. M’enfin, ça donne déjà une idée.
Au signal de Stefan, le petit groupe s’ébranle. Dès les premiers tours de roues, se dégage une impression de pédalage plus naturel. Alors que le moteur Bosch exigeait de se situer dans une plage de rotation des jambes bien précise et de mouliner pas mal pour délivrer son assistance dans des conditions optimales, avec la mise à jour, on éprouve moins le besoin de « faire le hamster dans la cage ».
Avec l’eMTB, le pédalage se rapproche de sensations naturelles. L’assistance en plus…
L’explication nous est donnée par Claus : « Notre nouvel algorithme permet de délivrer la puissance avec une cadence de pédalage environ 10% moins élevée, d’où des rotations de jambes plus naturelles et proches des sensations de roulage hors-VTTAE. » Ce qui s’apprécie particulièrement dans les faux plats en montée, à l’instar de celui qui entame notre galop d’essai. Le but de ce rapide roulage ne consistera pas à cumuler les kilomètres (même pas 15 au total sur cette session), mais à multiplier les situations parlantes qui, jusque-là, mettaient en avant le maniement délicat du mode Turbo.
La première ne tarde pas. Sur une promenade piétonne qui s’élève raide au-dessus de la mer pour mener au Bastion de Riva Del Garda, le prof de trial intime de se mettre debout et de faire du sur-place. En appui sur les pédales placées à la même hauteur, il invite à jouer en allant d’avant en arrière avec les manivelles. Un exercice impensable en Turbo et même en Sport avec l’ancien paramétrage, tant la violence de la poussée vous catapultait de droite et de gauche ou obligeait à la contenir les doigts sévèrement agrippés au frein. Le pilotage très heurté ne favorisait pas les économies d’énergie de la batterie ni du pilote !
Avec l’eMTB, l’assistance est délivrée de façon plus linéaire, plus coupleuse. Sans à-coup, donc sans ce fameux (et désagréable) « klong » dans les manivelles caractéristique du mode Turbo autant que de la latence entre un léger tour de pédale et l’arrivée de la grosse cavalerie. L’onctuosité de la réponse moteur au coup de pédale se confirme sur les ateliers suivants : redémarrage pied posé en montée puis franchissement de marches successives. À chaque fois, l’eMTB répond présent côté puissance, mais sans brusquer (à condition de d’abord poser les deux pieds sur les pédales avant de les actionner, dans le cas du redémarrage). L’ennui, c’est qu’on ne dispose plus d’excuse pour ne pas franchir les différentes marches : seule la technique de pilotage (ou son absence) fera la différence.
Une image pour illustrer ce changement : le mode Turbo, c’est un peu comme si Hulk vous décrochait un coup de poing dans le dos pour vous faire avancer. Puissant, mais pas forcément agréable ni, au final, efficace. L’eMTB, ce serait plutôt Superman qui pousse au train et ne vous lâche jamais quand vous en avez besoin. Plus facile à contrôler à basse vitesse, dans les sections techniques notamment, et donc plus efficient.
C’est aussi ce que confirmera notre retour sur la dalle raide de 5 mètres au-dessus du lac étrennée avec l’e-Spark. Avec le Scott motorisé par Shimano, nous n’étions pas montés dans la trace la plus pentue. Cette fois-ci, on s’y engage en mode eMTB et on parvient en haut sans encombre. On réessaie en mode Turbo, on sort aussi, mais en bataillant avec le vélo. Une sensation qui se retrouvera à chacun des 6 passages effectués en alternant les modes.
Le mode eMTB sur… l’eMTB Challenge
On enfoncera le clou en prenant le départ, le lendemain, de la première épreuve de l’eMTB Challenge. Plus de 30 km et 1000 m de dénivelé positif spécifiquement étudiés par Bosch pour mettre en avant les spécificités des e-bikes. Au menu, de l’orientation pour aller chercher les balises, des spéciales en montée avec des zones “no foot” où chaque pose de pied valait 10 secondes de pénalité, des spéciales plus roulantes et d’autres sections chrono descendantes. Au total 5 ou 6 portions chronométrées, selon que vous avez opté pour la catégorie Amateur ou Pro (qui comptait une descente engagée en plus).
Et on a vraiment touché du doigt le bien-fondé du mode eMTB durant cette épreuve. Surtout parce que notre Trek de prêt était monté avec des Bontrager ChupaCabra au profil, comment dire ?… peu accrocheur sur les feuilles mortes encore nimbées d’humidité des pourtours du lac de Ledro. Au départ de la première spéciale, en montée exclusivement, je choisis donc l’eMTB. Bien m’en aura pris. La zone « no foot », qui mêle virage, franchissement de cailloux, de racines et de petites marches empierrées, est franchie avec succès. En haut, le goût de fer dans la bouche et le cœur dans le rouge autant que les joues donnent la mesure de la violence inattendue de l’effort : qui a donc dit que l’e-bike était pour les fainéants ?!
L’autre section en montée, la spéciale 3, sera encore plus significative. Les vingt premiers mètres s’élèvent droit dans un talus herbeux, suivis d’une série d’épingles, toujours ascendantes. Histoire de jouer un peu, j’active le mode Turbo. Dès premiers mètres, ça fait flizzz, flizzz à l’arrière. L’accroche insuffisante des Bontrager couplée à l’arrivée violente de l’assistance en Turbo me font douter de parvenir hors de la “no foot zone” sans poser le pied. D’un geste un peu désespéré, je réactive le mode eMTB, charge l’arrière autant que possible sans trop délester l’avant, pour ne pas cabrer. La puissance passe mieux à l’arrière, les pertes d’adhérence se font moins violentes donc plus contrôlables, et ça sort. Désormais, ce sera eMTB sur chaque spéciale !
Sur les sections 5 et 6, les relances en montée teintées de franchissement de petites racines et de quelques passages de pierre permettent d’apprécier la facilité du fonctionnement “autonome” du mode eMTB. Dès que l’on appuie plus fort, la puissance arrive à mesure et laisse apprécier le pédalage autant que le panorama (enfin, quand on arrête de pester après les pertes d’accroche de la monte pneumatique…).
A l’arrivée, les 2 bûchettes sur 5 laissent à penser qu’on aurait pu utiliser davantage le mode eMTB en liaison et s’économiser un peu plus pour garder de la fraîcheur en spéciale. Car au départ, les 35 km d’autonomie affichés en eMTB ne nous tranquillisaient pas. Et si on n’allait pas au bout de ces plus de 30 kilomètres et 1000 mètres de positif annoncés ?Du coup, on avait opté pour le mode Éco et ses 50% d’assistance. Claus Fleischer, du haut de ses 67 kg, nous confiera avoir choisi le mode Tour pour toutes les liaisons et l’eMTB pour le chrono et être revenu sur Riva avec 1 bûchette d’autonomie dans sa besace.
Verdict :
Avec le lancement de l’eMTB, destiné à up-grader son moteur Performance CX Line, Bosch sort un mode de gestion intelligente, qui ajuste la puissance délivrée à la cadence de rotation des manivelles et la force d’appui sur les pédales. En attendant de plus importantes nouveautés (et un test plus poussé de l’eMTB), la petite start-up née en 2009 et spécialement dédiée à l’e-bike au sein du groupe Bosch, montre ainsi à la concurrence qu’elle entend bien garder sa place de leader tant en termes de technologie que d’événementiel.
Lien utile : www.bosch-ebike.com/fr/
Photos ©Bosch/Ralph Klohs et EL