Par Paul Humbert -
Laurent Tesch et Benoit Cailteux se sont élancés sur une toute nouvelle épreuve dont vous avez pu découvrir le concept sur Vojo : L’Alps Epic. Comme son nom l’évoque, c’est une course à étapes au format marathon au coeur des Hautes-Alpes. Pour la suite, nous laissons la parole à l’équipage Vojo mag numéro 13 :
« Dimanche 3 juillet, parc de la Schappe à Briançon au pied de la cité fortifiée par Vauban, nous avons rendez-vous avec l’équipe d’organisation et l’ensemble des participants de cette première édition de l’Alps Epic. Au programme, un buffet d’accueil, la présentation des différentes équipes où nous retrouvons avec plaisir quelques participants de la Cape Epic 2015 et le briefing d’avant-course.
Dimanche, 16h, la tension est palpable au départ du prologue, que ce soit parmi les concurrents ou parmi les organisateurs. Personne ne veut rater cette mise en route que nous attendons tous depuis de nombreux mois. Les 31 équipes au départ de cette première édition prennent le départ toutes les 30 secondes. Après moins d’un kilomètre, nous sommes déjà rejoints par l’équipe Rose Vaujany, favorite de l’épreuve, qui imprime un rythme énorme dans la première grosse côte en épingles. Impossible de passer sur le vélo, poussage obligatoire, même pour les meilleurs ! Nous nous élevons rapidement au-dessus de la ville pour atteindre l’ancien fort Dauphin. Une large piste en balcon nous permet de reprendre notre souffle avant de dévaler une descente très rapide, nous ne prenons aucun risque dans cette descente. La semaine est encore longue, ce n’est pas le moment de risquer une mauvaise chute ! Nous passons ensuite sur le pont d’Asfeld avant de faire demi-tour pour remonter une longue piste vers le fort des 3 Têtes. Le rythme est soutenu, le souffle court. On a juste le temps de jeter un oeil sur la ville en contrebas avant de dévaler jusqu’à la ligne d’arrivée. Objectif atteint, pas de bobos pour l’équipe 13. Certains n’ont pas eu cette chance et ont déjà abîmé la carrosserie ! Place à la récupération après cet effort court mais intense. A chaque fin d’étape, un buffet composé de produits locaux est proposé aux participants. C’est aussi une bonne manière de découvrir la région ! Le guide du coureur annonce pour cette étape 1 : “une mise en bouche alléchante” et “vous n’allez pas être déçu”. A la fin de cette journée, le contrat sera rempli au-delà de toutes nos espérances … La journée commence par une liaison neutralisée pour quitter Briançon. Une fois le peloton lâché, nous remontons la vallée en suivant les rives de la Guisane vers le col du Lautaret. Le sentier est agréable et roulant. Après 22 km d’ascension, nous marquons un court arrêt au premier ravitaillement composé encore une fois de produits locaux, il est important de soigner l’alimentation car la pente se redresse maintenant ! Un petit poussage et nous atteignons enfin le chemin du Roy, une petite pépite de sentier technique, légèrement descendant dans sa première partie. A notre droite, le panorama sur le massif des Ecrins est exceptionnel sous ce beau ciel bleu. Les paysages sont magnifiques mais il vaut mieux rester très attentif car le sentier est très étroit et très technique par endroits. Pas question de sortir du sentier car le vide est tout proche ! Nous reprenons progressivement de l’altitude en direction du col du Granon. Le long final sur une piste caillouteuse restera dans les souvenirs. Au sommet, le deuxième ravitaillement nous tend les bras. Le plus dur est fait, nous sommes au point le plus haut de l’étape. La descente dans les alpages au début puis en forêt est très cassante avec de nombreuses épingles pas toujours évidentes à négocier. Une dernière courte remontée sous un soleil pesant nous achève les jambes pour atteindre la Croix de Toulouse, située 700 m au-dessus de Briançon. Le point de vue sur les fortifications est saisissant mais attention, ici débute la descente finale ! Place à nouveau à un cocktail parfait de VTT de montagne avec de nombreux passages cassants, des marches, du rocher, des cailloux fuyants … Nous franchissons la ligne d’arrivée avec les bras en feu ! Le ton est donné, nous allons en baver cette semaine ! Mais quel régal ! Une 2ème étape très montagneuse se présente devant nous. Une bonne gestion de la première partie de l’étape est primordiale avec l’ascension du col de l’Izoard d’entrée de jeu. Le début d’ascension se déroule sur la route mais nous bifurquons rapidement vers la piste militaire, plus raide, qui nous fait rapidement prendre de l’altitude. Le peloton s’étire rapidement. Le ciel est couvert ce matin, nous profitons ainsi d’une certaine fraîcheur pour débuter la journée. Les sensations sont meilleures, notre acclimatation à l’altitude semble s’améliorer au fil des jours. Plus haut, la traversée d’une longue zone d’éboulis très délicate à négocier doit se faire obligatoirement à pied sous peine de pénalités horaire. Un superbe sentier très sauvage nous ramène par les alpages sur la route de l’Izoard, il ne reste plus que 3 kilomètres pour atteindre le sommet et basculer dans le Queyras, terrain de jeu plein de promesses pour tous les bikers. Une descente très piégeuse sous la Casse Déserte puis une raide montée nous amène au col du Trochet après une courte séance de poussage. La descente qui suit est un vrai régal avec une multitude d’épingles, nous profitons du moment présent car la 2ème grosse difficulté du jour nous attend un peu plus loin, le col de Furfande, point culminant de l’Alps Epic 2016 à 2500 mètres d’altitude. Roulant et régulier dans sa première partie, le final bien raide va en surprendre plus d’un ! Un court répit nous est offert dans une descente bien ludique avant de pousser le vélo au sommet du col Garnier , dernier col du jour. Les gros efforts du jour sont derrière nous ! Voici venu le temps de profiter d’une des plus belles et longues descentes des Hautes-Alpes avec près de 1200 mètres de dénivelé négatif quasiment d’une seule traite ! Nous traversons tous les étages de la montagne, des alpages à la forêt des bas de vallée, pour arriver enfin au fond des gorges du Guil. L’arrivée est toute proche mais il reste encore à se farcir un dernier raidard avec des cailloux roulants. Seb, le traceur du parcours, craignait la veille que nous le maudissions dans ce passage, il avait raison !! Le final de l’étape est encore une fois splendide avec une découverte des remparts de défense du fort de Mont-Dauphin. Après le buffet d’arrivée, l’équipe de masseuses tente de détendre nos muscles endoloris. Voilà encore un service très utile et apprécié par tous les bikers ! Après la longue et éprouvante étape précédente, nous abordons avec soulagement cette étape plus courte au dénivelé raisonnable mais méfiance, nous sommes sur l’Alps Epic et tout peut arriver ! La première longue ascension de près de 10 km se fait sur une piste large et roulante. Nous démarrons calmement, les jambes sont dures. La récupération n’est pas optimale et cela ne va évidemment pas s’arranger au fil des jours … Au sommet, un beau sentier en balcon avec quelques belles sections techniques nous offre de superbes vues sur la vallée de la Durance et le pays guillestrois. Nous traversons plusieurs petits villages pittoresques isolés à flanc de montagne avant d’arriver à Châteauroux-les-Alpes pour le ravitaillement principal de la journée. Nous voilà au pied de la deuxième longue ascension du jour. Plus de 900 mètres de dénivelé sur 10 km à remonter pour atteindre le point culminant du jour. Une montée roulante dans l’ensemble mais dont le final bien raide nécessite quand même quelques minutes de poussage. Le final d’étape se transforme en une longue galère pour moi (Laurent). En difficulté depuis la première étape, je dois me rendre à l’évidence. Une semaine de repos n’aura pas suffi pour effacer les efforts fournis lors de l’Ultra Raid VTT 360 km en Normandie 7 jours plus tôt ! La dernière courte ascension se termine en mode survie, Benoît est obligé de pousser les deux vélos tandis que je titube sur le moindre caillou … La gestion en duo d’une course par étapes est un des aspects très importants, si pas primordiales, de la réussite finale d’une telle épreuve. Nous avons déjà expérimenté et éprouvé notre duo durant la Cape Epic en 2015, nous avons encore franchi un nouveau palier durant l’Alps Epic. C’est dans ces moments difficiles que l’on peut éprouver la cohésion de l’équipe et la capacité mutuelle à soutenir et encourager son équipier. Difficile dans ces conditions de profiter pleinement de la belle descente en épingles qui plonge sur Embrun. Le bleu turquoise du lac de Serre-Ponçcon se rapproche rapidement. Plusieurs équipes nous doublent dans la descente mais nous sommes bien loin de penser au chrono à ce moment ! La ligne d’arrivée apparaît enfin comme une délivrance tout au bout de la digue, quel soulagement !Prologue : Briançon (12,3 km / 450 m D+)
Etape 1 : Briançon – Briançon (64 km / 2100 m D+)
Etape 2 : Briançon – Mont-Dauphin (71,2 km /3220 m D+)
Etape 3 : Mont-Dauphin – Embrun (51 km / 2040 m D+)
La seule équipe féminine présente sur l’Alps Epic est accueillie comme il se doit au passage de la ligne d’arrivée sous les applaudissements des autres participants et du public. Encore un beau moment de convivialité et d’émotion pour terminer cette étape !
Etape 4 : Embrun – Ancelle (62,4 km / 2580 m D+)
Coup de théâtre ce matin pour l’équipe 13 / Vojomag ! Sur base des conseils du médecin de l’organisation, je ne prendrai pas le départ. La fin d’étape difficile hier a laissé trop de traces, mon corps demande du repos de façon insistante et alarmante.
La mort dans l’âme, je vois s’éloigner Benoit et le reste du peloton de l’Alps Epic pour cette 4ème étape.
C’est donc Benoit qui se charge du résumé de cette étape :
“Plus roulante sur le papier mais l’arrivée plus haute que le départ rendra l’étape difficile. » Voilà le programme de la journée et nous voilà prévenus ! Encore une fois, le départ est magique, nous longeons les rives du lac d’Embrun aux eaux turquoises.
Ça part vite ce matin et les 5 premiers kilomètres avant d’aborder la première ascension de cette journée se font à vive allure. Au fil des étapes, les équipes commencent à se connaître et très vite, les groupes se forment suivant le rythme de chacun.
La gestion de l’effort est le maître mot durant toute cette première longue montée qui nous fait prendre rapidement de l’altitude, les grosses pierres qui encombrent le chemin ne rendent pas la chose facile et nous obligent constamment à changer de trajectoire.
Ayant légèrement augmenté le rythme en fin d’ascension, je bascule seul au sommet avec vue sur le lac de Serre-Ponçon en guise de récompense. Quel régal pour les yeux !
S’ensuit une piste roulante avant d’emprunter un petit singletrack avec vue directe sur les Aiguilles de Chabrières qui nous emmène tout d’abord vers le petit village de Réallon puis dans une vallée plus étroite et sauvage vers le hameau des Gourniers à l’entrée du parc national des Ecrins.
Après un rapide ravitaillement, nous prenons la direction de la station de ski de Réallon tout en alternant pistes et sentiers.
A l’entrée de la station, un signaleur nous annonce une section de portage pendant 20 à 30 minutes et, effectivement, le sentier devient de plus en plus ardu, pentu et truffé de racines au milieu d’une belle forêt de mélèzes, essence emblématique des Hautes-Alpes et des Alpes du Sud en général.
Dans la descente qui suit, je me fais surprendre par une racine qui accroche ma pédale. Le temps de le dire, je passe par-dessus le vélo et me retrouve un étage plus bas ! Dans ma chute je perds mon GPS … grrrrr … je cherche dans les herbes et heureusement, je remets la main dessus …
Au prochain carrefour, il n’y a pas de flèche et je m’aperçois que je n’ai plus la trace GPS … Je suis donc mon instinct en continuant tout droit et décide volontairement de lever le pied afin de laisser revenir une équipe qui pourra me guider. Coralie R. (3ième en équipe mixte à la Cape Epic en 2015) et son compagnon David C. me rejoignent et me confirment que nous sommes sur la bonne trace.
Nous aurons le plaisir de rouler ensemble sur des pistes alternant chemins roulants et quelques raidillons nous obligeant parfois à pousser le vélo. Le décor est magnifique à travers ces alpages sous les sommets aux pics acérés des Aiguilles de Chabrières.
Au km 55, nous abordons la dernière difficulté du jour pour monter jusqu’aux crêtes de Saint-Philippe. Je prends mon rythme dans cette ultime ascension de 4 kms, les 2 premiers kms se font sur la route puis nous bifurquons sur un petit sentier qui nous emmène jusqu’au sommet des crêtes, un dernier poussage (et oui c’est ça l’Alps Epic, quand tu crois que c’est fini, il y en a encore…) nous permettra d’admirer cette magnifique vue sur la vallée du Champsaur-Valgaudemar.
Il reste une dernière descente en singletrack très piégeuse où la vigilance est de mise avant de passer la ligne d’arrivée dans le petit village d’Ancelle. Je termine 9ème de cette étape, content de moi avec le sentiment de pouvoir encore mieux faire. Et surtout en espérant rouler à nouveau demain avec Laurent et passer la ligne d’arrivée à Gap ensemble.”
L’ambiance est très détendue à l’arrivée, la fontaine et la bière d’Ancelle ont beaucoup de succès !! L’Alps Epic, c’est aussi ça, la rencontre et le partage entre les coureurs, quelque soit son niveau ou son classement.“
Etape 5 : Ancelle – Gap
En route pour le bouquet final entre Champsaur-Valgaudemar et pays gapençais, nous arrivons déjà à la 5ème et dernière étape du Alps Epic. Les visages sont fatiguées, les jambes douloureuses mais nous regrettons déjà que cette belle semaine s’achève si vite.
Je rejoins Benoit pour cette dernière étape, pas question pour moi de passer la ligne d’arrivée à Gap autrement que sur le vélo ! Le ciel est couvert et il fait un peu moins chaud que les jours précédents. Cette dernière étape s’annonce plus roulante avec malgré tout deux longues ascensions au programme. Cela sent l’écurie et le rythme est tout de suite élevé dès les premiers kilomètres. On ne s’affole pas mais comme j’ai retrouvé pas mal de sensations durant ma journée de repos, profitons-en !
La première longue ascension vers la petite station de ski de Chaillol se découpe en deux parties, une première portion roulante sur un chemin bien large, puis une deuxième portion plus raide sur un sentier plus étroit avec quelques zones de poussage. Nous remontons calmement le peloton tout en gérant notre rythme. Des nuées de mouches nous suivent depuis pas mal de temps, vivement la descente !
La première partie de la descente est très plaisante avec un beau sentier en balcon, elle devient ensuite ludique avec le passage dans un petit bikepark. Quel plaisir d’enchaîner ainsi les virages relevés !
De retour dans la vallée, nous profitons du chemin roulant le long du Drac pour bien nous alimenter avant la dernière ascension du jour. La première partie est à nouveau bien roulante, c’est un terrain qui ressemble beaucoup mieux à nos parcours habituels, on en profite pour hausser encore un peu plus le rythme ce qui nous permet de dépasser rapidement plusieurs équipes. Sur le haut, la pente se redresse en traversant les pistes de ski. Les jambes sont bonnes, pas de soucis, cela passe comme une fleur !
Et voilà le sommet du col de la Gleize après deux derniers kilomètres sur route, il ne reste plus qu’une dernière descente très rapide pour rejoindre Gap. C’est le moment de lâcher les freins et de se faire une dernière fois plaisir sur ces beaux sentiers ! L’arrivée de l’étape se situe en bordure de Gap avant de rejoindre calmement la place de la République pour passer la ligne d’arrivée de cette première édition de l’Alps Epic. Une aventure inoubliable !
Bilan d’une semaine riche et intense …
Voilà près de deux semaines que nous sommes rentrés au pays et ne tournons pas autour du pot, nous venons de vivre une de nos plus belles expériences à VTT !
La qualité des parcours est à souligner en premier lieu. Une très bonne préparation est indispensable pour aborder cette épreuve dans les meilleures conditions. Les ascensions sont en général bien roulantes mais nous sommes en montagne et quelques poussages sont inévitables. Ne comptez pas trop vous reposer en descente. Le traceur de l’organisation est un adepte de sentiers techniques et cela transpire bien dans ses choix de parcours.
L’équipe d’organisation a d’emblée réussi pour cette première édition à mettre en place une atmosphère de convivialité et de proximité entre les coureurs et tous les membres de l’organisation que ce soient les bénévoles, les masseuses, le service médical, les mécanos, le service restauration. Le nombre réduit d’équipes au départ ont bien sûr facilité ce sentiment mais nous ne doutons pas que ce point important sera conservé à l’avenir.
La très bonne ambiance entre les coureurs est aussi un point à souligner. Venus de tous les horizons (12 nationalités différentes au départ) et tous niveaux confondus, nous avons profité de cette semaine pour nouer des contacts intéressants pour les projets futurs …
Nous retiendrons aussi la qualité des hébergements proposés et leur proximité par rapport au site d’arrivée. Des navettes de transport pour rejoindre les hébergements étaient malgré tout prévues pour nous éviter certains efforts inutiles en fin de journée, ce qui est toujours appréciable après une longue journée d’efforts !
Certains ont polémiqué avant l’épreuve sur le montant d’inscription trop élevé. Vu la qualité et le niveau de prestations proposés, nous sommes d’avis que celui-ci est tout à fait justifié d’autant plus lorsqu’on le compare avec d’autres organisations de la catégorie Epic. Notons au passage que l’édition 2017 de l’Alps Epic propose des solutions alternatives aux hébergements en hôtel afin de réduire le ticket d’entrée et que des réductions intéressantes sont octroyées à ceux qui se décideront rapidement. A bon entendeur …
Pour terminer, ajoutons simplement que cette épreuve mérite de grandir au fil des ans tant l’aventure est belle et le terrain de jeu infini ! L’organisation ne se repose en tous les cas pas sur ses lauriers puisque les reconnaissances du parcours 2017 ont déjà débuté.
Alps Epic, rendez-vous l’année prochaine ! »
Photos : Jean-Luc Armand, Manu Molle, Rémi Fabregue