Interview | Nino Schurter : "A Rio, Sagan n'a aucune chance" ⋆ Vojo

Peu avant les championnats du Monde 2016 de XC qui se dérouleront à Nove Mesto, nous avons profité de la présentation Scott à Lenzerheide pour passer un peu de temps avec Nino Schurter. Focalisé sur les JO, plus fort que jamais et ultra motivé par sa rivalité avec Julien Absalon, le pilote suisse s’est confié à nous. Interview.

Vojo : Nino, on sait que l’athlète est en forme, mais comment va le papa et la petite famille ?

Nino Schurter : « Super bien aussi ! Ma petite Lisa a maintenant 8 mois. C’est gai de la voir évoluer et grandir. Elle avait commencé à passer ses nuits mais maintenant elle se réveille de nouveau un peu. Mais ça va passer et ce n’est pas très important comparé au bonheur que sa présence me procure. »

Cette année 2016 est évidemment un peu particulière avec les Jeux Olympiques. Comment fais-tu pour gérer cette saison ? T’es-tu focalisé uniquement sur les JO ou as-tu d’autres objectifs ?

« Les Jeux sont évidemment mon objectif principal. C’est le seul titre majeur qui manque à mon palmarès. Toute la saison est donc axée sur Rio, mais le vtt ce n’est pas comme la route avec le Tour de France et des coureurs qui ne visent que cet objectif. Dans notre discipline, les courses sont plus courtes et je cours finalement assez peu. Je peux donc me permettre de faire toute la Coupe du Monde et les Worlds sans que cela compromette les JO, que du contraire. »

Il n’y a pas que les JO. Les championnats du Monde de Nove Mesto sont aussi pointés dans mon agenda. Je tiens fort à ce maillot arc-en-ciel.

« Il n’y a pas que le physique dans la vie d’un athlète, le mental est aussi très important et il n’y a rien de mieux que des victoires pour gagner en confiance. Depuis le début de saison, ça s’est plutôt bien passé de ce côté en Coupe du Monde mais les championnats du Monde de Nove Mesto sont aussi pointés dans mon agenda. Je tiens fort à ce maillot arc-en-ciel. »

Tu as gagné deux des trois manches de la Coupe du Monde 2016 à ce stade, dont Albstadt au terme d’un sprint mémorable. Mais à La Bresse, tu n’as pas eu de chance et tu es tombé sur un grand Julien Absalon qui jouait à Domicile. A Nove Mesto, tu seras chez Jaroslav Kulhavy…

« Oui, c’est vrai, à La Bresse, j’ai eu deux crevaisons et je n’ai donc pas pu jouer devant. Mais je finis 4, ça prouve que j’ai les jambes même si, en effet, Julien Absalon aurait été difficile à battre ce jour-là. A Nove Mesto, Jaroslav sera le plus redoutable. Il a gagné là-bas l’an dernier en Coupe du Monde et il sera devant son public. Mais j’aime cette course et je sais que je peux gagner. Le tracé convient par contre moins à Julien. »

Kulhavy, c’est aussi lui qui t’a « chipé » la victoire dans les derniers mètres à Londres… tu y penses encore parfois ?

« Non, pas vraiment. C‘est la course, c’est comme ça. Par contre, j’en ai tiré certaines leçons et si on arrive dans le dernier tour avec Jaro à Rio, je ferai tout pour le lâcher avant et je ne me ferai pas avoir deux fois de la même manière, même si le finish de Londres était assez particulier. »

Que penses-tu de la piste des Jeux Olympiques de Rio ?

« C’est un tracé très rapide. Il y a des similitudes avec Londres et c’est assez différent des pistes qu’on connaît le reste de l’année en Coupe du Monde. Il faut beaucoup de puissance car il y a de longues portions plates. J’ai beaucoup travaillé cela à l’entraînement et j’ai gagné pas mal à ce niveau. Par contre, il y a plus de montées qu’à Londres et ça, c’est bon pour moi. Je préfère. La course dans son ensemble n’est pas très technique mais les parties techniques sont intéressantes et parfois assez complexes. »

Quels seront les hommes à battre ? Julien Absalon ? Jaroslav Kulhavy ?

« Bien sûr, ce seront les deux hommes les plus dangereux. Julien me mène la vie dure depuis deux ans. On se livre de magnifiques bagarres et chacune de mes victoires face à lui a une saveur particulière. Mais la piste de Rio est peut-être un peu moins bonne pour lui car c’est un peu trop plat à son goût je pense. A mes yeux, Kulhavy sera le plus dangereux. Il s’est blessé au poignet, mais il est déjà revenu presque à 100% et à Rio il n’aura plus de séquelles. »

Et parmi les outsiders ? Des gars comme Maxime Marotte ou encore le jeune Lars Forster qui est la surprise de la sélection Suisse ?

« Maxime a fait 2e de l’épreuve pré-olympique l’an dernier, c’est clair qu’il peut monter sur le podium. Lars m’a impressionné pour sa première saison chez les Elites. C’est une belle chance qu’on lui donne de pouvoir apprendre à ce niveau et d’acquérir de l’expérience déjà maintenant sur une course aussi particulière que les JO. Matthias Flückiger a aussi eu de beaux résultats cette saison. Entre Suisses, on va se supporter et une fois qu’on a le maillot national sur les épaules, on oublie qu’on est de teams différents. Tous les sélectionnés réagissent comme cela : on travaille tous pour le team et ce sont mes coéquipiers. »

Tout le monde parle aussi évidemment de la participation de Peter Sagan aux Jeux Olympiques et VTT plutôt que sur la route. Qu’est-ce que cela t’inspire ?

« C’est une très bonne chose pour notre sport et l’image du vtt en général ! Cela va attirer plus d’attention sur l’épreuve et c’est aussi génial de voir que malgré ses succès sur la route, il pense encore au vtt. »

Même Julien, Jaro ou moi, si on partait de la même position que Sagan, on n’arriverait pas à revenir tout devant pour aller chercher une médaille.

« J’imagine qu’il sera bien préparé mais honnêtement, je ne pense pas qu’il pourra venir jouer aux avant-postes. Ce n’est pas lui manquer de respect que de dire cela mais il va partir loin derrière avec un gros numéro. Même Julien, Jaro ou moi, si on partait de la même position que lui, on n’arriverait pas à revenir tout devant pour aller chercher une médaille. »

Et toi, la route, c’est définitivement oublié ?

« J’en fais évidemment toujours beaucoup à l’entraînement, mais en course à un niveau pro, c’est fini. J’ai essayé au Tour de Suisse, c’était une chouette expérience mais mon sport, c’est le VTT et pendant au moins les 4 prochaines années, c’est très clair : je ne ferai que cela. »

Venons-en au vélo : il y a eu des changements importants de ce côté avec notamment ton passage au 29 pouces !

« Oui, c’est un gros changement. On a fait beaucoup de tests et dans la perspective de Rio, c’est le meilleur choix. Je vais donc rouler toutes les courses d’ici là en 29 ». Après, pour la suite, j’aurai toujours les 4 options, puisque les nouveaux Spark et Scale sont déclinés tant en 29 » qu’en 27,5 ». »

Comment as-tu été impliqué dans le développement des nouveaux Scott Spark et Scale ?

« Depuis plusieurs années, je fais des retours aux ingénieurs sur les précédentes versions du Spark et du Scale. Ils sont vraiment à l’écoute et ça leur a servi de base pour développer les nouvelles plateformes. Avant, je ne parvenais pas à trouver ma position sur le 29 » et sur le Spark 27,5 » j’étais sur une solution un peu spéciale avec 120mm de débattement derrière et 100mm devant. Les nouveaux vélos ont une géométrie très contemporaine qui me convient parfaitement pour les tracés actuels. Le 29 » a aussi beaucoup évolué en rigidité et en maniabilité. »

Si tu regardes dans le rétroviseur, quelle est ta plus belle victoire à ce jour ?

« Sans aucun doute mon premier titre de champion du Monde à Canberra en 2009 face à Julien Absalon. Il était l’homme à battre, celui qui gagnait tout, et on a fait un super finish à l’issue duquel je le bats au sprint… déjà. Je suis devenu le plus jeune champion du Monde de l’histoire du VTT et je le suis toujours à l’heure actuelle. Je n’avais pas eu une super saison avant cela et ça a tout débloqué. Ca a aussi marqué le début d’une longue série d’affrontements avec Julien Absalon. C’est pour cela que cette victoire est la plus marquante à ce jour. »

Comment décrirais-tu tes relations avec Thomas Friscknecht ? Team manager ? Mentor ?

« On peut dire que c’est mon mentor, oui. On travaille depuis 2003 ensemble et il est mon team manager depuis 2009. Il me connaît mieux que personne, on peut discuter de tout ensemble. Son expérience est très précieuse pour la gestion des courses, les choix de matériel. Il roule encore énormément et à très haut niveau pour se tenir à la page. C’est un champion exceptionnel et je lui dois beaucoup. »

Quid de l’avenir ? Tu arrives en fin de contrat, vas-tu poursuivre avec la même équipe ?

« Oui, et c’est une info toute chaude : je viens de resigner pour 4 ans avec Scott avec, déjà, les Jeux Olympiques de 2020 à Tokyo en ligne de mire. Le team s’appellera Scott-Sram, et Frischi restera le team manager et Jenny Rissveds a aussi resigné pour 4 ans. L’âme suisse va rester avec une implication plus forte de Sram. Je pense que ce sera le team parfait pour me permettre de continuer au plus haut niveau pendant encore au moins 4 ans. »

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Plus d’infos sur les Scott Spark et Scale de Nino Schurter dans notre présentation détaillée : www.vojomag.com/scott-spark-rc-scale-armes-de-schurter-vente-libre